Le Maroc compte 9 millions d'hectares de forêts représentant 12 % du territoire . 2 millions d'hectares sont aménagés pour l'exploitation. Le Moyen-Atlas se taille la part du lion avec 410 000 hectares exploités. Bûcherons, bergers, charbonniers, collecteurs de bois, fonctionnaires… la forêt fait vivre de nombreux métiers. Dans les provinces de Khénifra, Ifrane et El Hajeb, les hectares de forêts s'étendent à perte de vue. En ces jours de canicule aoûtienne, le décor paraà®t paradisiaque. Des cimes de cèdres, centenaires pour la plupart, dont le vert des branches contrastent avec le foncé du bois, pour le bonheur des yeux. Ce cadre enchanteur, c'est au Moyen-Atlas qu'il se trouve. A partir de 1 000 m d'altitude, différents arbres et espèces végétales se côtoient, formant un gisement d'or vert des plus importants d'Afrique du Nord. En 2003, les recettes forestières ont atteint 659 MDH contre 359 MDH une dizaine d'années plus tôt En effet, au Maroc, la forêt occupe 9 millions d'hectares, soit près de 12 % du territoire national. Parmi cette variété florale, peu nombreux sont les arbres dont l'exploitation est la plus poussée. Et pour cause, dans notre pays, sept types de bois sont exploités de manière régulière : cèdre, chêne-liège, chêne vert, thuya, arganier, genévrier et pins. Cette ressource naturelle représente par ailleurs une source de revenus pour les populations usagères et les collectivités locales de l'ordre de 5 milliards de DH annuellement. «Toute notre vie se résume en un mot: la forêt», annonce d'emblée un conducteur de camion de charbon croisé sur un barrage des Eaux et Forêts dans la province de Khénifra, sur la route menant de cette dernière à Ajdir, site naturel d'une rare beauté choisi par SM Mohammed VI pour son discours annonçant la création de l'Institut royal de la culture amazighe (IRCAM). Le mot est dit. Entre les populations de ces régions et la forêt, une longue histoire d'amour qui date depuis toujours. Dans ces contrées montagnardes, la forêt est plus qu'un élément du décor. C'est un gagne-pain. Une véritable source de richesse qui fait vivre des générations de bûcherons, bergers, charbonniers… Des métiers entiers se sont créés autour des richesses forestières. Des grands «tacherons de forêt», ceux qui, à coup de millions de dirhams, ont obtenu les autorisations nécessaires à l'exploitation forestière, aux simples citoyens, bûcherons occasionnels, qui, pour arrondir des fins de mois ou pour se procurer du bois de chauffage, n'hésitent pas de puiser dans les bois de l'Atlas, de la Maâmora ou du Rif. Cependant, et sur les 9 millions d'hectares d'étendues vertes, les forêts ouvertes à l'exploitation ne dépassent pas les 2 millions d'hectares. «Et c'est le Moyen-Atlas avec ses cédraies et ses chênes qui arrive en tête des zones aménagées avec près de 410 000 hectares exploités, suivi par les régions centre et Nord-ouest (Maâmora) qui totalisent respectivement 280 000 et 204 000 ha», souligne-t-on auprès des Eaux et Forêts. L'essentiel de l'exploitation se fait sur des lots attribués aux enchères publiques qui sont régulièrement organisées par l'administration de tutelle. Les régions concernées chaque année sont définies dans un plan d'aménagement forestier établi pour une période allant de 20 à 25 ans. Le procédé est similaire à celui utilisé en urbanisme. Le plan définit ainsi les zones exploitables, celles qui doivent être reboisées, les volumes de bois concernés par l'exploitation ainsi que les zones ouvertes à la chasse et à la pêche. Mais le rôle économique ne se limite pas uniquement à l'exploitation du bois par des personnes ou des sociétés distinctes. La forêt demeure après tout un excellent atout pour notre économie. Ainsi, les différentes forêts nationales assurent une couverture des besoins du pays en bois d'Å"uvre et d'industrie à hauteur de 30 %, soit 600 000 m3/an, selon les chiffres fournis par le Haut commissariat aux Eaux et Forêts. Autre donnée révélatrice, leur participation au bilan énergétique national, à hauteur de 30%, «soit 10 millions de m3/an de bois de feu ou près de 4 millions de tonnes-équivalent pétrole», révèle une source de ce département gouvernemental. Enfin, les ressources forestières dont dispose le pays couvrent 17 % des besoins alimentaires du cheptel national en fourrage, ce qui représente quelque 1,5 milliard d'unités fourragères ou l'équivalent de près de 3 milliards DH par an. Un fort potentiel touristique non exploité Malgré la beauté des différents sites, très peu sont les investissements touristiques effectués dans la région. Les petites routes sinueuses, très peu entretenues et qui gardent, l'été venu, les séquelles des rigoureux hivers durant lesquels la température chute bien en dessous de zéro, bifurquent de temps à autre vers un petit gà®te, abri de montagne datant de plusieurs décennies, ou sur des auberges plus récentes, fruit d'investissement audacieux. C'est l'exemple de l'auberge d'Arougou, sise à quelque 500 mètres d'une célèbre source d'eau du Moyen-Atlas, dans la province de Khénifra. En pleine forêt, une dizaine de chambres, un restaurant-café et une énorme piscine dont le bleu contraste avec la verdure ambiante, constitue l'essentiel de l'investissement. Aux alentours, des chênes, bien sûr, mais aussi des vignes, figuiers, mûriers, pour le plus grand plaisir des sens. Juché sur le flanc d'une montagne, le site a été financé par les capitaux propres d'un Marocain résident aux Etats-Unis pour près d'un MDH. Le prix des chambres varie entre 120 DH et 200 DH. Et quelques mois après son ouverture, le site ne désemplit pas. Une réussite qui a poussé d'autres investisseurs à initier des projets pareils. A quelques kilomètres de l'auberge d'Arougou, une autre auberge est en construction, avec, cette fois, plus de services et de loisir à proposer. Une écurie équestre pour les randonnées montées est en effet prévue. Mais au-delà de ces rôles économique et social, la forêt est avant tout une garantie écologique, un énorme poumon pour notre pays. Economie Un élément socio-régulateur La forêt marocaine n'est pas uniquement un espace de verdure à portée purement écologique. Ce n'est pas non plus seulement une source de revenus pour l'Etat, les collectivités locales et les milliers de Marocains qui y vivent. La forêt au Maroc, comme partout ailleurs, est un élément socio-régulateur. En témoigne le nombre d'emplois qu'elle génère. Selon les chiffres fournis par le Haut commissariat aux Eaux et Forêts, ce sont quelque 100 millions de journées de travail que la forêt offre. Les entreprises forestières emploient à elles seules quelque 28 000 personnes alors que le secteur de la transformation crée près de 14 000 emplois. A ceci s'ajoutent les 6 000 emplois dans la collecte de bois de feu, 40 000 emplois dans le domaine de parcours et 4 544 emplois dans la fonction publique. La forêt est également un espace ouvert à près de 30 000 chasseurs et 3 000 pêcheurs. Focus Un mètre cube de cèdre est vendu à 6 000 DH Au Maroc, sept types de bois sont exploités de manière régulière : cèdre, chêne-liège, chêne vert, thuya, arganier, genévrier et pin. Le produit forestier le plus prisé est incontestablement le bois. Sur la liste des bois marocains les plus chers, la palme d'or revient au cèdre. Le mètre cube de cette matière, noblement considérée dans l'Antiquité, est cédé à 6 000 DH. Solidité, malléabilité et aisance de travail font que ce bois soit très demandé par les charpentiers et autres ébénistes. Loin derrière arrivent d'autres bois destinés à la consommation locale, notamment pour la menuiserie de construction et la construction de meubles. C'est le cas du pin par exemple dont le mètre cube est vendu entre 500 et 600 DH. En plus du bois, le liège, extrait des forêts du Gharb notamment, est également demandé. Le prix de la stère est indexé sur les cours internationaux. Il peut ainsi varier entre 700 DH et 2 000 DH. Le liège marocain souffre cependant de la concurrence de plusieurs pays méditerranéens, Espagne et Portugal notamment. Abattage clandestin 30 000 ha de forêt dévastés chaque année Autre danger qui menace le patrimoine forestier national, en plus de l'exploitation massive et les incendies fréquents, l'abattage clandestin. Il est le fait de riverains pour des raisons purement économiques, le kilo de bois de chauffage étant vendu à 0,90 DH. La perte chaque année est estimée à environ 30 000 ha, soit 0,3 % de l'espace forestier marocain.