Rabat International Fashion Fair 2025: La mode mondiale débarque à la capitale    Taxis vs VTC : Les syndicats ouverts au dialogue [INTEGRAL]    Vignette : le paiement électronique est gratuit (DGI)    Tourisme: L'ONMT entame une tournée régionale pour fédérer les acteurs clés du secteur    Rougeole : 47 cas d'infection recensés dans neuf établissements pénitentiaires    CHU Ibn Sina, l'ouverture en 2026 est-elle réalisable ?    Ould Errachid souligne l'importance de la dimension parlementaire dans la dynamique des relations maroco-françaises    Artisanat : publication de dix enregistrements de marques déposées auprès de l'OMPIC    La croissance au Maroc s'établirait à 3,2 % en 2025, selon l'ONU    Maroc-Azerbaïdjan : L'accord de coopération militaire approuvé par le président Aliyev    Tempête de neige dans le sud des Etats-Unis: Plus de 2.000 vols annulés    Football : Opération réussie pour Yahya Attiat-Allah après sa blessure    Réunions des commissions chargées de la révision des listes électorales    Le Roi félicite Joseph Aoun pour son élection à la présidence du Liban    Moroccan Actor Saïd Taghmaoui's Los Angeles home lost to fires    Spain honors Moroccan relief teams in ceremony celebrating solidarity after devastating floods    RNI: Aziz Akhannouch préside une réunion du bureau politique    Essaouira: Trois nouvelles liaisons aériennes vers Paris, Lyon et Nantes dès avril    Casablanca. La diversité culturelle au cœur des célébrations d'Id Yennayer 2975    Paris. Le caftan à l'honneur    Histoire : Caligula a tué le roi romain de Maurétanie à cause d'un manteau de pourpre    Températures prévues pour le samedi 11 janvier 2025    CDM (f) U17 Maroc 25: La CAF dévoile son programme qualificatif    Côte d'Ivoire: M. Ouattara affirme ne pas avoir pris de décision au sujet de sa candidature à la Présidentielle de 2025    L'influenceur Doualemn expulsé puis renvoyé en France : «L'Algérie cherche à humilier la France», clame Bruno Retailleau    Le chinois Jingye Group rejoint le gazoduc Afrique atlantique    CCAF : Un arbitre burundais pour Lunda-Sul vs RSB.    Découverte des épaves de deux navires archéologiques au large d'El Jadida    Sao Tomé-et-Principe. Carlos Vila Nova nomme une nouvelle Première ministre    L'Afrique du Sud et l'Algérie vont adorer cette décision américaine    Le Jardin Zoologique National : 6 millions de visiteurs en 13 ans    Cour des comptes : El Adaoui au Parlement mercredi    Des experts US s'informent à Rabat de l'expérience marocaine en matière juridique et judiciaire    A Scandal Tarnishes Mandela's Legacy... His Grandson, the "Icon" in Algeria, Accused of Theft and Crime    19th-century shipwrecks discovered off El Jadida coast    LDC: Le Raja sans ses supporters face à l'AS FAR    Football: La FRMF et les Ligues Nationales tiendront leurs AG le 13 mars prochain    Le régime algérien refuse de reprendre ses "porte-paroles" de la France... Un pays qui jette ses citoyens au-delà de ses frontières    Los Angeles : Saïd Taghmaoui témoigne du cauchemar des incendies    Poutine "ouvert au contact" avec Trump sans condition préalable    Air Arabia inaugure un nouveau vol direct Rabat-Oujda    La CGEM réitère l'importance de la promulgation de la loi sur la grève    Marrakech. 15.000 marathoniens attendus le 26 janvier    La FRMF et les Ligues Nationales tiendront leurs Assemblées Générales le 13 mars prochain    PLF 2024 : Lekjaa annonce une réduction du déficit budgétaire à 4 % du PIB en 2024    La décision du Ghana de rompre ses relations avec le "Polisario" suscite un large intérêt dans la presse italienne    FLAM 2025 : Un festival du livre ouvert sur l'Afrique, pour connaisseurs et non-initiés    Adieu L'artiste...    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Une histoire marocaine en fin de conte
Publié dans La Vie éco le 05 - 08 - 2005

S'il faut beaucoup «d'histoire pour faire un peu de littérature», comme disait Gide, il en faudrait davantage pour faire un peu de cinéma. Croire le contraire ou passer outre la carence fictionnelle pour faire du chiffre, c'est pisser contre le vent. Le contraire, c'est faire beaucoup de cinéma (dans toutes les acceptions du mot) pour avoir un peu d'histoire.
Raconter une histoire à un auditoire en captant son attention puis en provocant chez lui plaisir et émotion est un art qui se fait rare. Les contes de nos grands-mères, ces hajjaà ̄ate oà1 le fantastique le plus débridé se mêlait au réalisme le plus magique, ne sont plus de mise. Qui racontera aujourd'hui une histoire qui nous ressemble à des enfants gavés de clips échevelés et de séries formatées par un imaginaire macdonaldisé ? Se poser une telle question n'est pas un signe de repli identitaire comme on pourrait le suspecter en ces temps de parano planétaire oà1 toute velléité de différence est mise à l'index ou rangée dans une anormalité civilisationnelle.
Raconter une histoire est aussi le titre d'un excellent petit ouvrage de Jean-Claude Carrière, publié par l'Institut de formation pour les métiers de l'image et du son (FEMIS.) En conclusion de ce livre, le grand scénariste français évoque une discussion qu'il avait eue avec le neurologue Oliver Sacks, auteur de L'Homme qui prenait sa femme pour un chapeau, et auquel il demanda un jour ce qu'est un homme normal. «Un homme normal, peut-être, est celui qui est capable de raconter sa propre histoire. Il sait d'oà1 il vient (il a un passé, une mémoire en ordre), il sait oà1 il est (son identité), et il croit savoir oà1 il va (il a des projets, et la mort au bout). Il est donc situé dans le mouvement d'un récit, il est une histoire.» Et Carrière d'extrapoler cette relation individu-histoire à une société entière et de citer Kundera dont il a d'ailleurs adapté un roman difficilement transposable à l'écran, L'insoutenable légèreté de l'être. Etre incapable de se raconter et de se situer dans le temps «pourrait conduire des peuples entiers à s'effacer, coupés d'eux-mêmes par défaut de mémoire constamment ravivée.»
Tout cela pour dire que notre imaginaire littéraire et artistique souffre d'une carence fictionnelle caractérisée. On a déjà parlé ici de la production romanesque toutes langues confondues dont le volume est un indice incontestable de sous-développement littéraire (une cinquantaine de romans en plus de cinquante ans). Et on ne parle même pas de la qualité intrinsèque de cette portion congrue (ou incongrue) dont certains responsables égrènent triomphalement quelques titres et embaument leurs auteurs dans des hommages trop appuyés et maintes fois ressassés.
Et puis il ya le cinéma. Cet art visuel qui s'ébroue quelque peu sans pour autant prendre son envol – et n'en finit pas de compter ses plumes – ne peut croà®tre et se développer sans raconter une histoire. Or, s'il faut beaucoup «d'histoire pour faire un peu de littérature» comme disait Gide, il en faudrait sans doute davantage pour faire un peu de cinéma. Croire le contraire ou passer outre la carence fictionnelle pour faire du chiffre, c'est pisser contre le vent. Le contraire, c'est, on l'a bien compris, faire beaucoup de cinéma (dans toutes les acceptions du mot) pour avoir un peu d'histoire. On ne remonte pas l'histoire à l'envers comme un film qui défile à reculons, ou alors il faudrait en faire un genre narratif en y mettant le talent du conteur et le savoir-faire du technicien.
Raconter une histoire au cinéma, c'est d'abord écrire un scénario qui en contient une. C'est l'évidence même et c'est cette évidence-là qui est le point essentiel ou le nÅ"ud gordien, comme disent ceux qui aiment justement se faire des nÅ"uds au cerveau.
Si «le bon sens est la chose du monde la mieux partagée», comme l'écrivait Descartes au début de son Discours de la méthode, la simplicité est bien la chose la moins bien partagée dans le monde du cinéma marocain. Voilà pourquoi raconter une histoire marocaine est un dur labeur et cela se voit à l'écran des salles, qui sont de plus en plus rares. Mais ça, c'est une autre histoire, à moins qu'elle ne soit la même…
Bouclons la boucle avec le même grand scénariste plein d'érudition, Jean-Claude Carrière, qui, à la question «comment raconter une histoire ?», répond que d'Aristote à Boileau, en passant par les conteurs chinois ou les auteurs des manuels pour scénaristes, les conseils n'ont pas changé : «Il faut avant tout être intéressant, bien choisir son histoire en fonction de son auditoire, la raconter sur un bon rythme, veiller à ce que l'attention du public ne faiblisse pas, redouter les longueurs, ménager les surprises, rester dans les limites d'un certain vraisemblable, ou d'une certaine logique».
Mais si d'aventure, après toutes ses précautions, la mayonnaise ne prend pas, que font en général certains de nos raconteurs d'histoires en images ? Ils demandent à dissoudre le public, cet ignare ennemi des beaux-arts. Pendant ce temps- là , Carrière cite un poète soufi :
«La nuit s'est achevée, et mon histoire n'est pas terminée.
En quoi la nuit est -elle coupable ?»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.