Multiplier les occasions de faire parler de soi augmente les chances d'être repéré. Mener les approches en toute discrétion est recommandé. Ne jamais fermer la porte après un refus, une autre opportunité, plus intéressante, peut se présenter. Il y a ceux qui appellent et ceux qui se font appeler. Malheureusement, tout le monde n'a pas la chance d'être dans la seconde catégorie, c'est-à-dire de se faire offrir un emploi sur un plateau. Quand cela arrive, tout commence généralement par un coup de téléphone. La personne que vous avez au bout du fil veut vous parler de votre carrière : pas de doute, c'est un chasseur de têtes. De prime abord, il sait tout de vous ou presque. Généralement, ces recruteurs de haut vol ont l'avantage de posséder un réseau professionnel important. Leur connaissance du terrain est approfondie et leur base de CV imposante. Ainsi, leur approche et leur système de filature facilitent la mise en confiance des cadres, alors même que la conjoncture économique n'incite pas forcément ces derniers à changer de poste. Ils travaillent toujours pour le compte d'entreprises qui souhaitent le plus souvent débaucher une bonne pointure, principalement un haut potentiel (ou une valeur sûre), opérationnel immédiatement, pour lui confier des responsabilités. C'est la raison pour laquelle il y a un certain nombre de prérequis pour pouvoir bénéficier d'un tel privilège. Pour augmenter ses chances d'être repéré par un chasseur de têtes, un cadre doit marquer son parcours professionnel d'un certain nombre d'empreintes. Et les occasions ne manquent pas. Il est vrai que la compétence est indispensable et qu'il faut des qualités humaines remarquables. Mais les premiers ciblés sont généralement les plus connus personnellement. C'est ainsi que, pour faciliter son identification, un cadre veillera, en premier lieu, à être inscrit dans l'annuaire des anciens de son école. Même si ces documents sont peu répertoriés sur la place, ils représentent néanmoins un vivier d'informations sur les compétences de la place pour les cabinets de recrutement. Ces derniers vont même jusqu'à cibler les compétences marocaines à l'étranger connues à travers leurs associations. Colloques, séminaires…, des occasions de faire connaître votre expertise Pour autant, la meilleure façon de s'assurer que les chasseurs de têtes auront vent de votre parcours et de vos compétences, c'est, tout simplement, de leur faire parvenir un CV, fait remarquer Mohammed Bennouna, DG du cabinet F2V, spécialisé dans la force de vente. Il s'agit de les informer que vous êtes en recherche active, du moins que vous vous tenez à l'écoute des opportunités. A priori, les cadres affûtés doivent adresser leur candidature aux cabinets spécialisés dans leur secteur d'activité et, si possible, aux consultants en charge des postes correspondant à leur recherche. Attention ! Cette démarche doit être entourée de la plus grande discrétion pour éviter les quiproquos avec l'employeur : un départ en catimini (ou qui y ressemble) est toujours perçu comme une trahison. Mais cette démarche n'est pas suffisante. Pour attirer l'attention, il faut, en plus, se transformer en «pro» des relations publiques. Et par conséquent donner aux chasseurs de têtes le plus d'occasions possibles d'entendre parler de vous. Evidemment, les médias constituent une bonne opportunité pour se faire remarquer. Et dans ce domaine, il n'est pas nécessaire de viser le journal du soir pour se faire repérer. Vous lisez un article concernant votre secteur dans la presse professionnelle et économique? Décrochez votre téléphone, contactez le journaliste auteur de l'article et proposez de le rencontrer. S'il couvre votre domaine, il sera ravi d'avoir un informateur. Il n'est évidemment pas question de lui lâcher des informations confidentielles. Jouez la carte de la sincérité avec le chasseur… Et puis, quand vous changez de job, faites-le savoir. Ne négligez pas les rubriques «nominations» des quotidiens ou des hebdomadaires spécialisés. C'est une manière de faire part à autrui de votre parcours professionnel. On peut aussi profiter des différentes manifestations publiques, colloques, séminaires ou autres, sur des thèmes techniques, pour faire des apparitions, donner son point de vue et montrer son expertise. Outre les participants, dont certains peuvent être des contacts utiles, les médias relayeront certainement vos sorties si elles sont pertinentes. Attention cependant à ne pas coloniser la presse : des interventions à tout-va sont susceptibles de vous décrédibiliser. En somme, n'intervenez que quand c'est utile. Une participation active dans des structures associatives, politiques, sportives et autres est également un bon moyen de donner un écho à vos capacités. Multiplier les occasions de faire parler de vous permet ainsi de multiplier les chances d'être repéré par un chasseur de têtes. Encore faut-il que ces derniers disposent d'un poste correspondant à votre profil. … mais essayez en même temps d'en apprendre le plus possible sur le poste à pourvoir Une fois les contacts noués avec le chasseur, sachez jouer la sincérité. La proposition du chasseur est peu claire ? A vous d'en savoir plus. Car il peut ne pas tout vous livrer sur le client. Au moins, sachez l'essentiel sur le poste à pourvoir, la culture de l'entreprise, les raisons du départ de la personne à remplacer… Mohamed B., haut cadre dans une boîte informatique, est tombé de haut lorsqu'il a découvert que le poste qu'on lui avait proposé au départ ne correspondait pas à la réalité. «J'ai su par la suite que l'entreprise n'avait pas d'idée précise sur le poste en question du fait qu'il n'existait pas auparavant. Chose qui ne m'a pas aidé par la suite. Parce qu'après avoir intégré la nouvelle entité, j'ai eu du mal, au moins au départ, à connaître ma marge de manœuvre», dit-il. Résultat : il faut y réfléchir à deux fois avant de se lancer dans une aventure. Demandez donc plus de détails à votre interlocuteur et prenez le temps de bien étudier les propositions avant de vous engager, même verbalement. Si vous n'avez aucune intention de bouger, autant le dire clairement dès le départ. Il est déconseillé d'aller jusqu'au bout des entretiens pour se désister, juste parce qu'on cherchait à en connaître un peu plus sur le client final. Néanmoins, il convient toujours de laisser une porte ouverte, même si la proposition n'est pas intéressante ou si les discussions n'aboutissent pas. Enfin, gardez toujours un contact avec votre chasseur. En bon professionnel, il aura au moins eu le mérite de vous faire réfléchir sur les différentes options de carrière possibles. Bon à retenir Précautions à prendre – Avoir des relations suivies avec un nombre restreint de chasseurs, en les ciblant selon vos affinités et leurs spécialisations. – Donner des nouvelles aussi quand tout va bien sans attendre d'avoir besoin d'eux. – Rendre service à ceux en qui vous avez confiance, s'ils ont besoin de renseignements sur un candidat. – Faire avec eux un point de carrière régulier. Ne manquez pas de les tenir au courant de vos nominations. – Mettre à jour sa fiche dans l'annuaire des anciens, assister à des colloques, parler aux journalistes… – Ne pas se faire griller en faisant semblant d'être intéressé par une offre alors qu'on n'a pas l'intention de bouger. – Ne pas débiner son entreprise ou son patron : cela risque d'être mal interprété. – Ne pas orienter un chasseur vers un candidat incompétent. Trois questions Ne jamais dire non d'emblée et se focaliser sur l'essentiel : «que me propose-t-on ?» Comment un profil pointu peut-il séduire un chasseur de têtes ? Ali Serhani : Tout d'abord, «chasseur de têtes», cela fait plutôt penser à un safari ou à un western. Je préfère personnellement le terme de «chasseur de compétences». Je dirai que ce dernier n'attend pas d'être «séduit » par qui que ce soit puisqu'il privilégie l'approche directe. C'est dire que c'est lui qui décide qui il approche. Généralement, il travaille dans l'ombre, il n'use pas de la diffusion publicitaire pour se faire connaître. Sa publicité est faite à travers ses clients, qui sont généralement des entreprises structurées et qui apprécient sa valeur ajoutée. Mais également à travers les hauts potentiels qu'il a placés. Mais il est vrai que certains hauts potentiels font en sorte d'attirer l'attention des chasseurs de compétences. Attirer l'attention d'un chasseur de compétences peut se faire tout simplement par l'image que l'on se construit sur la place. Les diplômes sont une chose importante mais l'image que vous véhiculez a également une importance. Il se peut que vous soyez diplômé d'une grande école et que vous soyez techniquement excellent et reconnu sur la place, mais si vous êtes exécrable, soyez sûr que vous ne serez jamais approché car si le recruteur cherche un profil adapté pour une structure donnée, il cherche avant tout un rassembleur, un meneur d'hommes et surtout un «chef» qui fera en sorte de contribuer à la croissance de l'entreprise, côté chiffre d'affaires, parts de marché et, surtout, côté image qu'elle véhicule à son tour. De nombreux candidats ont compris cette donne. Ils se font connaître sur la place par leurs interventions à travers des interviews, conférences, séminaires ou leur participation à des œuvres caritatives au sein d'organisations très médiatisées ou tout simplement en anticipant, via un réseau bien constitué. C'est ce qu'on appelle, dans le dernier cas, «réseautage» ou «Networking». Comment doit-on s'y prendre lorsqu'on est approché ? On ne peut pas reprocher à une personne approchée d'être méfiante. C'est tout à fait légitime et compréhensible car on ne sait pas sur qui et sur quoi l'on va tomber ! Cependant, rien ne l'empêche d'en savoir plus sur le chasseur de compétences, sans être obligé d'entrer dans les détails au premier coup de fil. Les détails arriveront plus tard. Le chasseur de compétences, à son tour, doit impérativement prendre certaines précautions d'usage : par exemple, se présenter et annoncer le but de son appel et proposer à la personne approchée de se renseigner sur le cabinet avant un prochain contact, laissé à l'initiative de cette personne en question. Fournir les adresses web et e-mail ainsi que les numéros de téléphone. Ce n'est que lorsque ladite personne prend la décision de rappeler, que la procédure de sélection peut commencer. Que faire après ce premier contact ? La réponse est simple : rester ce que l'on est, sans artifice, car le chasseur de compétences sait discerner les faux arguments. De même, la personne approchée doit savoir que l'on a déjà une idée sur son profil. A partir de ce moment-là, les deux parties entrent dans un processus de sélection qui constitue un préambule à tous les entretiens qui suivront. Enfin, deux conseils importants : la personne approchée doit se focaliser sur l'essentiel, à savoir : «Que me propose-t-on ?», et ne jamais dire non de prime abord, même si elle se trouve bien dans son emploi actuel. Elle ne perdra rien à étudier la proposition du recruteur. brahim habriche