Selon le ministère de l'Agriculture, elle atteindra 86 millions de quintaux. Pour les spécialistes, elle ne dépassera pas les 80 millions. L'évolution de l'actuelle de campagne céréalière ressemble à l'histoire du verre à moitié vide ou à moitié plein. En effet, vu les conditions exceptionnelles dans lesquelles elle avait démarré, les observateurs, qui s'attendaient à ce que le record de 1996 (94 millions de quintaux) soit battu, ont été déçus. Mais à y regarder de plus près, il apparaît que le résultat est tout à fait satisfaisant parce qu'avec 86 millions de quintaux (Mqx), on réalise toute de même la 3e meilleure production de ces 12 dernières années et la meilleure de la décennie. L'annonce tardive des chiffres de cette campagne, a expliqué vendredi 12 mai Mohand Laenser, ministre de l'Agriculture, est due à la nécessité de présenter un chiffre officiel le plus proche possible de la réalité. L'idée est aussi de mettre fin aux prévisions (pronostics !), quelquefois sur ou sous-évaluées, avancées par diverses sources. Concernant la répartition par variétés, cette production est constituée de blé dur à hauteur de 19 Mqx, soit 22,1 % du total. Le blé tendre compte pour 49 % ou 42 Mqx. L'orge totalise 25 Mqx, soit 29 % de la production. Pour toutes ces cultures, le rendement a considérablement progressé par rapport à la moyenne des cinq dernières années. C'est ainsi qu'on a enregistré 19 q/ha pour le blé dur (+ 33 %), 11,4 pour l'orge (+ 11,4%) et 20,6 % pour le blé tendre (+40%). Encore une fois, l'orge tire les rendements vers le bas puisqu'il occupe 42% des superficies cultivées et n'assure que le quart de la production totale. Tandis que le blé tendre assure plus de 50% de la production pour seulement 39% des superficies emblavées. Les pluies d'avril ont rallongé le cycle végétatif De manière générale, les céréales ont bénéficié de conditions favorables tout au long de la campagne, avec des précipitations assez abondantes et bien réparties dans le temps et sur les différentes régions du pays, laissant espérer une production record. Ainsi au 10 mai, le cumul pluviométrique moyen national a atteint 364 mm, soit environ 5% de plus qu'en année normale (347 mm, moyenne sur 30 ans) et seulement 12 % des superficies concentrées au niveau de l'Oriental, le Haouz et le Souss ont enregistré un déficit. Cependant, certains facteurs laissent planer des doutes quant au rendement final officiellement annoncé. Ainsi, les fortes températures survenues au moment de la floraison, les attaques d'insectes, les maladies cryptogamiques contre lesquels les traitements sont peu pratiqués, des grêles, des mauvaises herbes mal traitées ou tardives ont causé des dégâts estimés par des producteurs à environ 25% du rendement escompté. Même si les conditions climatiques du mois d'avril, dominées par un climat frais, humide et des pluies tardives, ont rallongé le cycle végétatif et contribué au bon remplissage du grain, entraînant une amélioration du poids spécifique, des observations visuelles sur le terrain et des avis de producteurs font penser que le rendement prévisionnel annoncé est légèrement surestimé et qu'il sera difficile, voire impossible, de franchir la barre des 80 Mq. Seulement 730 000 qx de semences sélectionnées utilisés Par ailleurs, la faible utilisation des intrants est de nature à limiter les espoirs d'une récolte élevée et, de l'aveu même du ministère de tutelle, l'utilisation de semences sélectionnées et d'engrais reste faible et devrait être développée.Ainsi, pour les semences sélectionnées, seulement 730 000 quintaux subventionnés (entre 80 et 100 DH/ql) ont été commercialisés là où il faudrait environ 8 Mqx, soit 9% des besoins. Idem pour les engrais avec 660 000 t vendues, soit approximativement le même niveau que la campagne précédente. Or, ce niveau est faible puisqu'il est inférieur de 12% par rapport à la moyenne des cinq précédentes campagnes. Cette quantité ne couvre même pas les besoins du tiers des 5,3 millions d'hectares emblavés qui nécessitent au moins 2 millions de tonnes, selon le type d'engrais utilisé. De même l'analyse du sol reste peu prisée par les agriculteurs malgré la prise en charge de 50% de son coût et les nombreux avantages agronomiques et financiers qu'elle peut apporter. En résumé, nous sommes passés à côté d'une campagne record.