Une manifestation de diplômés chômeurs à Laâyoune a été réprimée ce weekend par les forces de l'ordre, quelques jours après la visite sur place de Jonathan Lis, assistant de l'eurodéputé britannique Charles Tannock, chargé de l'élaboration d'un rapport sur les droits de l'homme au Sahel et au Sahara. Selon des sources proches d'une association de défense des droits de l'homme, deux diplômés chômeurs ont été transportés à l'hôpital Hassan Boumehdi de la ville de Laâyoune, suite à une intervention policière le samedi 31 août. Un rapport du CODESA fait état de "14 cas de blessures. Certaines victimes de violence ont perdu conscience sur la voie publique". Selon la même source, "lors de cette intervention, des éléments de la police et des forces auxiliaires ont usé de matraques, de barres de fers et d'autres procédés intentant à la dignité humaine en proférant des menaces et des insultes contre les manifestants". Parmi les protestataires, figurait un groupe de diplômés chômeurs dont le ministère de l'Intérieur avait promis en 2011 l'intégration directe au bureau de l'Office chérifien des phosphates (OCP) à Laâyoune après que les membres de ce groupe aient accepté de suivre le programme de formation OCP-SKILLS. Ces derniers demandent aujourd'hui à l'Etat marocain de respecter ses engagements pris en juin 2011. Un rapport de l'UE sur les droits de l'homme Cette manifestation et l'intervention des forces de l'ordre sont intervenus trois jours après la visite au Sahara de Jonathan Lis, assistant de l'eurodéputé britannique conservateur Charles Tannock1. Ce dernier est chargé par le parlement européen d'élaborer un rapport sur la situation des droits de l'homme au Sahel (et au Sahara) suite à la montée de l'extrémisme et des tensions sécuritaires dans la région. Son rapport doit être voté le 17 septembre prochain devant la commission des Affaires étrangères du parlement européen avant d'être adopté en séance plénière d'ici fin octobre, selon le calendrier communiqué par l'UE. Si l'essentiel du projet de rapport est consacré à la situation au Mali, la partie dédiée au Sahara est, selon le texte initial, clairement défavorable au Maroc. Charles Tannock demande notamment à ce que les accords commerciaux entre l'UE et le Maroc n'incluent pas le Sahara "à moins que le consentement et l'intérêt de la population sahraouie ne puissent être clairement démontrés", reprenant ainsi l'avis juridique (non-contraignant) de l'ONU en 2002. Le parlement européen "craint particulièrement que l'UE ne conclue pas de nouvel accord avec le Maroc en matière de pêche tant que cette controverse ne sera pas résolue", poursuit le texte, en référence à la ratification à venir du nouveau protocole à l'accord de pêche Maroc-UE. Par ailleurs, selon ce projet de rapport, le parlement européen se dit "gravement préoccupé par le récent rapport du rapporteur spécial des Nations unies sur la torture", suite à visite au Sahara en septembre 2012. Le texte rappelle aussi "les inquiétudes exprimées dans le rapport du HCDH de 2006 concernant les restrictions de la liberté d'expression, d'association et de réunion au Sahara occidental". Concernant la surveillance et la protection des droits de l'homme au Sahara, le projet de rapport rappelle que l'ONU n'a pas étendu en avril dernier le mandat de la Minurso et "encourage les Nations unies à apporter une solution à ce problème ou à créer un nouvel organe permanent et impartial en matière de droits de l'homme qui sera chargé de surveiller et de rendre compte de la situation globale des droits de l'homme, ainsi que d'enquêter sur les différentes plaintes; demande que cet organe englobe la section du Sahara occidental contrôlée par le Maroc, les camps de Tindouf ainsi que les autres territoires sous contrôle du Front Polisario". Ce texte n'est pas définitif, notamment les éléments de langage relatifs au Sahara : plusieurs amendements ont été déposés, à la fois par des eurodéputés pro-polisario et pro-marocains, ce qui pourrait faire changer la version finale du rapport d'ici son adoption finale par le parlement européen. 1 Charles Tannock est eurodéputé, rapporteur sur la situation des droits de l'homme dans la région du Sahel pour la Commission des Affaires étrangères du parlement européen. A ne pas confondre avec le représentant spécial de l'UE pour le Sahel, le français Michel Dominique Reveyrand-de Menthon, ni avec le représentant spécial de l'UE pour les droits de l'homme, le grec Stavros Lambrinidis.