La course à la ruine A Casablanca, qui de vous n'a pas entendu parler du vélodrome ? Qui de vous y est déjà allé ? On a tous entendu parler de cet endroit où des lévriers font la pluie et le beau temps, mais de là à aller visiter… La Gazette du Maroc enquête pour vous. «Attention attention …le lièvre va partir …le lièvre part.» La foule s'enthousiasme et les cris fusent de partout, l'espace d'une vingtaine de secondes, d'une montée d'adrénaline et les jeux sont faits. Le vélodrome comme l'appellent les habitués, ou le cynodrome tel que nommé par les organisateurs, est un rendez-vous très particulier ou débauche et retenue, jeunes et moins jeunes, instruits et moins instruits, se réunissent, le temps d'une course, pour évacuer leur stress, prendre leur dose de jeu…vider leurs poches. Il est 19 heures, les premiers clients font leur entrée. A la porte, un agent de police, un contrôleur et un gardien. « 2DH par personne, le pronostic du quarté est gratuit, le programme des autres courses est à un dirham» nous lance le contrôleur. On paye, on prend les pronostics et on pénètre cet univers nouveau où le jeu, les chiens et les êtres humains ne font qu'un. A peine entrés, on nous aborde: « 36-46». On “ n'y pige que dalle ” et on poursuit notre chemin. Nous emboîtant le pas, un jeune, la trentaine, bien habillé, lunettes de soleil… «Vous êtes un habitué ?». «Oui, je travaille ici, je suis caissier»(voir encadré : les caissiers). C'est d'ailleurs l'un des rares «bien sapés» rencontrés lors de cette soirée. Sur l'estrade, une cinquantaine de joueurs, réunis en petits groupes, pronostics, résultats et programmes à la main. D'autres sont seuls, cogitent, inscrivent des chiffres, consultent les résultats, soulignent des noms de chiens… On s'installe sur cette estrade, qui rime avec “crade”, bien en hauteur et au milieu, pour dominer le champ de course, les réactions des joueurs et le mouvement de la foule. A peine assis, un agent de police nous interpelle. «Situation critique à l'horizon !». On descend, on le suit… Il nous demande gentiment le programme, le remet à un monsieur, mal rasé à la tenue débraillée… Ce dernier inscrit des combinaisons, pour les six courses programmées, ainsi que son pronostic pour le quarté et nous remet le programme. Avant de s'en aller, l'agent nous lance «Dourou mâah ila kherjat chi nemra !» (voir encadré : le prix du pronostiqueur). Et au pronostiqueur de répliquer «idourou mâak nta li jebtihoum …» On rejoint notre place sur l'estrade, hébétés. «C'est quoi ce mic-mac?». «Est-ce que les dés sont pipés ?». «Est-ce la manière utilisée par les agents de sécurité pour se faire des à côtés ?»…Sur le programme et pour chaque course, une combinaison à quatre chiffres est inscrite. On retrouve le fameux “36-46 ” qu'on nous a soufflé à l'entrée. A droite de l'estrade, l'administration qui s'apparente beaucoup plus à un KGB. Une jeune demoiselle en sort, traverse le petit sentier qui sépare l'estrade du terrain de course et monte l'escalier qui mène vers une petite tour qu'on appellera «tour de contrôle».