Grippe aviaire au Maroc C'est formel, catégorique, sincère et même publiquement et solennellement juré : pas un seul cas de maladie humaine transmise par la pathologie virale de la volaille et des oiseaux migrateurs n'a été enregistré, à ce jour, nulle part dans les quatre coins du Maroc. Les officiels sont stricts sur ce point et les consommateurs peuvent s'approvisionner normalement en poulets sans courir le moindre risque. La rencontre du lundi 31 octobre a marqué un tournant dans la politique gouvernementale de communication grand public en se démarquant de la langue de bois en niant en bloc toute alerte aux «prétendues» épidémies qui secouent périodiquement le Royaume. La première rencontre médiatique de la «transparence», orchestrée par la triplette au front anti-grippe aviaire, les ministres de la Santé Biadillah, de l'Agriculture Laenser et le Haut Commissaire Lhafi aux Eaux et Forêts, a permis de faire le point sur la situation dans le Royaume après les chaudes alertes en Asie et en Europe en promettant d'autres sorties pour maintenir la population informée de tout ce qui se trame. Selon les premières certitudes, le scénario catastrophe n'aura pas lieu au Maroc même si le pays est une zone de passage des oiseaux migrateurs. Même aussi si le risque est réel, le taux de probabilité de la déclaration d'une pandémie grippale générée par le virus de la volaille reste très faible. Plus de peur que de mal et, dans tous les cas de figure, le professeur Biadillah est formel : “quelle que soit l'éventualité de l'apparition de la grippe aviaire au Maroc, nos plans d'action en concertation avec l'OMS sont bouclés et opérationnelles.” De la grippe animale à la grippe humaine “En tout état de cause, nous sommes prêts à faire face à tout fléau quelles que soit son envergure et sa gravité”. Mais nous n'en sommes pas encore là et l'urgence de tous les dispositifs préventifs, de surveillance et de contrôle mis en place par les trois départements partenaires précités s'en tient toujours à la phase initiale de neutraliser toute pénétration du virus grippal au Maroc à travers ses régions fertiles en priorité, destinations de prédilection des oiseaux migrateurs porteurs du virus dont ils raffolent pour s'y reproduire avant de remonter vers le Nord. Si les experts de l'OMS sont convaincus de l'imminence d'une pandémie de grippe qui constitue la nouvelle menace mondiale après le SIDA et le SRAS asiatique, toujours est-il que le calme est de rigueur chez nos décideurs institutionnels qui ne voient aucune raison de s'alerter at home. Mais comme mieux vaut prévenir que guérir, nos experts docteurs, après avoir bâti le plan d'action à plusieurs tiroirs, un «immeuble à plusieurs étages» comme le dit si bien le Haut Commissaire Lhafi, ont poussé la réflexion plus loin encore en tentant de passer du stade de la grippe aviaire à celui de l'éventualité d'une pandémie de grippe humaine. Et la planète se trouve bien loin des risques qui avaient décimé la population du globe par millions de victimes lors des graves pandémies qui s'étaient déclarées en 1889 (6 millions de morts), et en 1918, la plus meurtrière avec ses 40 millions de décès, 1957 et ses 4 millions de victimes et, plus près encore, 1967 qui a enregistré 2 millions de trépas. Ce bilan macabre est partagé entre l'Europe et l'Asie, la première nommée ayant payé le plus lourd tribut. Le risque pour l'homme reste éloigné pour l'instant car les spécialistes assurent que « jusqu'à présent, les animaux essentiellement touchés par une grave épizootie sont les oiseaux, canards, oies et volaille d'élevage». Plus de 200 millions de volatiles de basse-cour ont été décimés depuis le déclenchement de l'épizootie causant une perte de plus de 10 milliards de dollars, infectant 121 personnes et en tuant 62. Au Maroc, un scénario catastrophe serait incommensurable dans ses conséquences économiques et sanitaires. Déjà, la psychose qui s'est installée a fait chuter de 40% la consommation nationale de la volaille. Et quand on sait que le secteur avicole génère un chiffre d'affaires de plus de 13 milliards DH et emploie plus de 200 000 personnes entre emplois directs et indirects, une condamnation de ce secteur aurait des incidences incalculables. Ce n'est naturellement pas encore le cas et le plan national est prêt à se mettre en œuvre. Les quatre phases majeures de ce plan comprennent la détection précoce de l'apparition d'un nouveau virus grippal, la limitation de la diffusion éventuelle du nouveau virus, l'adaptation du système de santé nationale à l'accroissement massive et rapide des besoins de prise en charge et, en dernier lieu, la limitation de l'impact global de la pandémie sur la société.