Affaire laboratoire SmithKline Beecham contre famille Diwane C'est une décision qui fera date dans les annales de la justice marocaine. Le tribunal de Première instance de Casablanca a condamné un laboratoire pharmaceutique à payer des dommages et intérêts à une victime qui a utilisé son médicament. SmithKline Beecham, c'est de lui qu'il s'agit, a été contraint à dédommager la famille Diwane de 3 millions de DH pour sa responsabilité dans la paralysie de l'enfant. La nouvelle est tombée ce lundi 7 novembre comme un couperet sur la tête des patrons du Laboratoire pharmaceutique SmithKline Beecham. Le juge Nourredine Kaccine, du Tribunal de première instance de Casablanca, les a condamnés a payer la bagatelle de 3 millions de Dh dans l'affaire les opposant à la famille Diwane. Après un marathon judiciaire qui a duré cinq années, l'affaire Diwane contre Smitkline Beecham connaît finalement un bon dénouement au profit du petit Achraf Diwane, l'enfant paralysé suite à l'injection d'un vaccin Engerix B. Sur un ton calme et avec des mots précis, le président de l'audience, entouré du substitut du procureur du Roi et de son greffier, appelle les avocats des deux parties à la barre et prononce son jugement qui fera date dans les annales de la justice Marocaine. En effet, sur la base de l'article 433 du code de la procédure pénale qui stipule “quiconque, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou inobservation des règlements, cause involontairement des blessures, coups ou maladies entraînant une incapacité de travail personnel de plus de six jours, est puni d'un emprisonnement d'un mois à deux ans et d'une amende de 120 à 500 DH ou l'une de ces deux peines seulement”. Dans ce cas de figure, le juge Nourredine Kaccine a retenu seulement l'amende de 500 DH, en écartant la prison, et a condamné la partie défenderesse à payer des dommages et intérêts de l'ordre de 3 millions de DH sur les 10 millions de DH réclamés par la partie civile. Ce qui ne devait donc jamais arriver arriva. Le laboratoire, qui avait rejeté toutes les accusations portées par la famille Diwane, soulagée après l'annonce du verdict, s'est vu condamné à une lourde peine jamais prononcée au Monde contre un laboratoire pharmaceutique. La décision du juge Kaccine établit pour la première fois sur le plan international l'existence d'un lien de causalité entre l'administration du vaccin Engerix B et la paralysie post vaccinale. C'est ce qui a déplu bien évidemment aux responsables du laboratoire incriminé qui ont, à l'instar de la famille Diwane, vite interjeté appel (voir entretien avec Ali Sedrati, le représentant légal du Laboratoire Smitkline Beecham). Rappelons que les faits remontent au mois de février 2000 lorsque les parents d'Achraf Diwane (âgé de 19 mois seulement), ont vacciné leur enfant contre l'hépatite B dans un dispensaire du quartier Derb Soltan El Fida à Casablanca. Vaccin administré, le petit Diwane, se réveille deux jours après, avec des difficultés de respiration, des pleurs ininterrompus, sur fond d'une paralysie avérée et des troubles de déglutition. Une évolution tragique de la santé physique et cérébrale d'un petit Achraf âgé de 19 mois. Le diagnostic est on ne peut plus triste : l'enfant souffre de tétraplégie d'installation brutale, aggravée de troubles respiratoires dus à l'injection du vaccin, Energix B, contre l'hépatite B. C'est alors que les parents d'Achraf ont décidé de porter l'affaire en justice, celle-ci traîne depuis le mois de novembre 2000, et demande à titre de dommages et intérêts la bagatelle de 10 millions de DH. Lors des dernières plaidoiries, les avocats de la famille Diwane ont à plusieurs reprises attiré l'attention du tribunal sur l'état de santé de l'enfant et sur le lien de causalité entre le vaccin Enregix B et le dommage subi par Achraf Diwane. Et pour appuyer leur défense, ils ont particulièrement rappelé les trois expertises médicales réalisées pour le compte de l'instruction (voir LGM 442) et qui établissent ce lien de cause à effet entre la maladie et le vaccin incriminé. Sans adosser toute la responsabilité au médecin traitant du petit Achraf avant sa paralysie, Abdellah Moutaïb, la défense de la famille Diwane a tenu à préciser au tribunal que c'est suite à son ordonnance prescrivant le vaccin incriminé que les parents Diwane ont vacciné leur fils. Du côté du laboratoire pharmaceutique, les avocats, contrariés, estiment que le procès est loin d'avoir livré toutes ses facettes et tous ses prolongements. En rejetant toutes les accusations portées contre le laboratoire, Ali Sedrati étaye ses propos par le fait que Smithkline Beecham n'a commis aucune infraction puisque le prospectus du médicament indique clairement dans sa partie “effets indésirables” le risque de paralysie. Ce qui représente aux yeux de Ali Sedrati, une contradiction totale avec l'accusation du parquet qui base son réquisitoire sur l'article 443 du code de la procédure pénale. En plus, ajoute Ali Sedrati, le vaccin incriminé a été homologué par l'Etat marocain pour sa vente libre dans le pays, ce qui désengage totalement le laboratoire SmithKline Beecham dans cette affaire. Deux arguments pourtant fondés qui n'ont pas été retenus par le Tribunal de première instance de Casablanca qui par cette décision entre de plain-pied dans l'histoire de la jurisprudence mondiale en la matière.