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Problématique des séismes au Maroc
Publié dans La Gazette du Maroc le 28 - 02 - 2005


Dialogue national sur les Risques Majeurs
En vue de la préparation de la Conférence internationale des Nations Unies sur la prévention des catastrophes tenue dans la ville nippone de Kobé du 18 au 22 janvier 2005, Le ministère de Mohamed El azghi a organisé un atelier national consacré à la problématique des séismes au Maroc à la lumière des enseignements d'Al Hoceïma dont nous venons de commémorer, le 24 février, le premier anniversaire.
" Cet atelier était l'occasion de revenir sur la problématique des séismes au Maroc, notamment sur les enseignements tirés du dernier séisme d'Al Hoceïma, afin de relever les insuffisances et les faiblesses, et identifier les mesures efficaces à prendre pour améliorer la préparation de notre pays pour faire face aux catastrophes ", expliquent les responsables du Département gouvernemental chargé de l'Eau, de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement. Les experts et spécialistes du PNUD, CNRST, CEPRIS et les décideurs chargés de la protection civile et de l'Habitat et de l'Urbanisme se sont attelés à mettre l'accent sur les aspects significatifs liés au réseau de surveillance sismique au Maroc et la calibration, les risques au Maroc, l'analyse préliminaire du séisme d'Al Hoceïma, les mesures prises et le code de construction sismique.
Cet atelier a abouti à l'élaboration du projet de réalisation de cartes de microzonage et d'aptitude à l'urbanisation de la Province d'Al Hoceïma.
Des recommandations sur plusieurs fronts
Les recommandations formulées par les participants ont intéressé diverses mesures impératives et préventives à prendre pour pallier les carences et défaillances constatées en matière de gestion des risques sismiques.
Au plan de la gestion de la catastrophe, les protagonistes ses sont accordés sur la nécessité de disposer d'un plan d'urgence national avec des procédures opérationnelles bien définies et de la mise à disposition des intervenants locaux des moyens adéquats de secours. Coordination inter-services et entre tous les acteurs, renforcement de la communication, mobilisation de la société civile et promotion du volontariat et du bénévolat, localisation des aires de stockage, autant de suggestions faites qui méritent d'être prises en compte. A cela, s'ajoute la nécessité de la réalisation d'exercices de simulation des catastrophes et du renforcement des capacités humaines du Royaume habilitées à faire face aux situations d'urgence et de crise.
S'agissant du volet institutionnel, l'atelier national a mis l'accent sur la nécessité de mettre en place une commission nationale chargée de la prévention des risques naturels et technologiques qui sera appuyée par l'action d'institutions spécialisées dans l'évaluation et l'atténuation des risques sismiques. Cette instance devra être apte à assurer les contacts directs entre les personnes-ressources et les administrations
et services concernés, facilités par l'élaboration d'un répertoire téléphonique de points focaux nationaux dans chaque secteur qui devra être publié au niveau national et international.
Au chapitre technique et financier, il a été demandé de prendre en compte les données et recommandations de la conférence mondiale de Kobé pour l'établissement d'un schéma directeur de planification face aux catastrophes qui doteront les villes n'en disposant pas. Stratégies régionales et provinciales de gestion des urgences et élaboration d'un système d'échanges d'expériences techniques en matière de renforcement et de réhabilitation des constructions sinistrées figurent également sur la liste des mesures retenues. Développement de l'expertise en conception structurelle et architecturale, couverture territoriale en cartographies des principaux risques, nécessité d'appliquer le RPS 2000 dans les lieux publics, approche intégrée de prévention, système de suivi, développement de la recherche scientifique et mise en place d'un système national d'indemnisation des victimes, viennent compléter les mesures techniques et financières. Quant aux aspects ayant trait à la formation, l'information et la sensibilisation, il a été préconisé de multiplier ces rencontres et ateliers de réflexion, axés sur les PUN (Plans d'urgence national), de régionaliser les initiatives visant à promouvoir l'application du code parasismique, former les compétences nationales en sismologie, génie parasismique, ingénierie sismique et intervention des secours.
Comme l'avait souligné le ministre Mohamed El Yazghi dans son allocution d'ouverture de l'atelier sur la problématique des séismes, l'expérience douloureuse d'Al Hoceïma " a mis à découvert plusieurs éfaillances intrinsèquement liées à la vulnérabilité du tissu socioéconomique et des infrastructures de base, ainsi qu'aux insuffisances sur le plan institutionnel notamment au niveau de la coordination avant, pendant et après la catastrophe ". Avant de faire remarquer le retard important que le Royaume accumule en matière de prévention et de gestion maîtrisée des catastrophes :
" face à cette réalité nationale, force est de constater aujourd'hui que d'autres pays, qui privilégient les actions préventives, des séismes de même amplitude, ou même d'une amplitude supérieure, font moins de dégâts matériels, et presque pas de victimes, ce qui nous interpelle fortement et nous incite à revoir toutes nos démarches actuelles pour une meilleure prise en compte des risques dans toutes les politiques et stratégies de développement ". (citation El Yazghi à faire figurer en accroche).
Gestion des catastrophes
Promouvoir la prévention des risques
La Gazette du Maroc présente, en exclusivité, un dossier d'une brûlante sensibilité car le "catastrophisme" se manifeste, dans des pays à très fort potentiel de risques comme le Maroc, à un double titre. D'abord, au niveau des occurrences en termes de probabilités de survenance de désastres et aussi dans la culture sociale et populaire qui en font une fatalité. D'où la nécessité pour les pouvoirs publics, les institutions nationales et la société civile d'agir en deux temps concomitants pour promouvoir et enraciner la culture de la prévention dans la conscience publique, collective et communautaire. Il faut dire aussi que c'est la première fois que le Royaume s'engage dans une démarche cohérente et intégrée de prévention des catastrophes qui, jusqu'ici, séismes, inondations, invasions acridiennes et autres accidents "technologiques" ou naturels, laissaient libre cours à l'anarchie, à l'agitation, à la "désunion" des intervenants et secouristes et à l'absence de programmation pour atténuer les effets dévastateurs de la colère des éléments.
Cartographie "explosive" des risques
En outre, ce que le sens commun devine confusément amis que l'esprit n'intègre pas dans les menaces constantes, réelles et répétitives qui pèsent comme une épée de Damoclès suspendue en permanence sur le pays, c'est l'impressionnante cartographie des risques répertoriés par la Direction de la surveillance et de la prévention du Département de l'Environnement qui exposent le Royaume à des cycles "dévastateurs", "tsunamis" compris. Oui, le Maroc est une véritable "poudrière" et nombreuses sont les étincelles qui peuvent, à tout instant, allumer l'apocalypse. Bien entendu, le pays est loin d'être "maudit", car il est communément admis que "le risque zéro" n'existe nulle part dans le monde. Mais, leur probabilité dans les pays en développement est décuplée dans la mesure où les formations fragiles de l'Hémisphère Nord cumulent, hélas, à la fois les risques des pays industrialisés cantonnés dans les menaces "technologiques et environnementales" principalement et leurs propres menaces spécifiques (sécheresse, désertification, invasions grégaires…). Sans compter les dégâts accrus en cas de séisme provoqués par la fragilité des constructions ou la précarité des infrastructures, aggravés par la pauvreté des ressources et la modestie des moyens mobilisables en cas d'intervention et de secours. Selon nos spécialistes, le Maroc n'est pas à l'abri des Tsunami sur les 3 500 km de ses côtes maritimes.
Face à ses réelles menaces, que faire ? Surtout quand la plupart de ces catastrophes sont inévitables ? L'urgence est à l'action en amont pour minimiser les pertes en vies humaines et les dégâts matériels en étant fidèle à la sagesse qui préconise que "Mieux vaut prévenir que guérir". Et sachez, pour mesurer toute l'importance de changer radicalement d'attitude en privilégiant la prévention en multipliant les précautions utiles, nécessaires et suffisantes, qu'un dollar dépensé dans la prévention économise jusqu'à dix fois plus en interventions, secourisme, réhabilitation et reconstruction après coup. San,s compter les effets relativement durables de l'après-désastre induits par la pauvreté provoquée, les épidémies, l'instabilité, la mobilité sociale à cause de l'angoisse des lieux sinistrés… Il est donc temps de stopper l'hémorragie des négligences et des improvisations qui nous ont habitués à réagir quand le mal est déjà consommé, dans le désordre total, sans coordination aucune entre les acteurs censés gérer les catastrophes. Il faut bien s'en faire une raison pour mieux rebondir, le pays jusque là encaissait les coups, naviguait à vue et bafouillait tous azimuts dans ses interventions. Sans que l'on sache qui fait quoi et qui est chargé de quelles responsabilités ou prérogatives. Pour mettre un terme à ces énormes gaspillages en énergie humaine, en moyens matériels mal utilisés et en coûts directs et indirects trop onéreux, l'Etat institué une structure institutionnelle, depuis 2001, entièrement dédiée à la cause de la prévention. La DSPR (Direction de la Surveillance et de la Prévention des risques), pilotée par Rajaa Chafil et intégrée dans le ministère de l'Eau, de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement, qui veille à enraciner dans nos us et coutumes, des acteurs publics, des intervenants de secours, des citoyens en règle générale, les principes et règles à suivre aptes à réduire les fractures générées par les catastrophes. Enfin, et mieux vaut tard que jamais, le Maroc s'est doté des structures ad hoc avalisées par les compétences partenariales internationales. L'heure est à la promotion de la connaissance du risque. Combien de vies humaines et de victimes ont jalonné l'histoire de l'humanité qui ont succombé par ignorance des risques et sous-estimation des menaces !


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