Exactions de la police espagnole La Guardia civil a très vite su après les déclarations de Rafa Zouheir devant la commission que le voile allait être levé sur ses agissements et ses méthodes de travail. Mise à l'index pour incompétence et mauvaise gestion de l'affaire des explosifs, la Guardia civil a essayé de faire taire le Marocain. Retour sur une enquête secrète. C'est la direction générale des institutions des pénitenciers qui a apporté son point de vue sur ce qui s'est déroulé à l'intérieur de la prison de haute sécurité dans la banlieue de Madrid. On lit dans la déposition faite par l'un des responsables de l'institution que Rafa Zouheir a été visité par la Guardia civil en prison les 9 et 14 avril 2004. Ce qui revient à dire que c'est d'abord l'ancienne équipe au pouvoir, dirigée par le ministre de l'intérieur en place à ce moment-là, Angel Acebes, qui a pris en charge le travail. Manuel Rajoy, le chef du PP, monte au créneau et déclare que suite à “ces graves accusations” il y a “quelqu'un qui ment” dans ces institutions des pénitenciers. Une sortie qui voulait disculper l'ancien gouvernement et affirmer qu'il n'a jamais eu recours à des méthodes pas très catholiques pour faire taire ou faire changer d'avis Rafa Zouheir qui mettait en cause de façon flagrante le manque de sérieux du travail de la police espagnole avant, pendant et après le 11 mars. Une manœuvre qui avorte puisque le juge de Valdemoro qui a ouvert l'enquête sur les possibles exactions de la Guardia civil a soutenu son équipe et a poursuivi son travail pour voir de quel côté pouvait se situer la vérité dans une affaire aussi compliquée. Le 6 juillet 2004, l'affaire refait surface puisque suite à des tractations la direction de la prison revient sur ses dires et affirme, cette fois, que personne de la Guardia civil n'est venu voir Rafa Zouheir en prison les 22 et 23 mai 2004 dans le centre pénitencier Madrid III. La seule nuance qui a échappé aux médias espagnols dans cette affaire, c'est que la direction des prisons a juste dit que personne ni aucune force de la police de l'Etat n'a mis les pieds dans la prison pour voir Zouheir après la passation de pouvoirs entre PP et PSOE. La nuance est de taille et les dires du directeur n'ont jamais exclu que les visites d'avril aient réellement eu lieu. Le mensonge et la tentative d'intimidation de Manuel Rajoy prennent beaucoup plus d'ampleur quand on lit le document de la direction des prisons qui affirme noir sur blanc que “selon les dates et les registres des prisons où avait séjourné Rafa Zouheir, il y a eu des visites de la Guardia civil les 9 et 14 avril 2004”. A cette date, c'est Angel Acebes qui était au pouvoir et c'est Angel Yuste qui était à la tête des institutions des pénitenciers. Le directeur ajoute pour clore le chapitre que “toutes les informations sur le sujet ont été données aux autorités judiciaires”. Quoi qu'il en soit Rafa Zouheir connaissant les rouages des polices avait déjà rédigé une lettre pour relater tout ce que la Guardia civil l'a fait endurer. C'est le 17 mai 2004 que le ministre de l'Intérieur, Alonso reçoit cette lettre postée le 4 mai dans laquelle le Marocain affirme “souffrir de pressions et de menaces” de la part d'agents de la Guardia civil. Et c'est dans ce bureau que la décision a été prise d'envoyer cette lettre au juge d'instruction numéro 6 de la “Audiencia nacional” Juan Del Olmo soulignant que le ministère a pris note du contenu de cette lettre et qu'une enquête devra être ouverte. C'est le journal El Mundo qui publie une autre lettre de Rafa Zouheir dans laquelle il détaille les menaces et les pressions à la fois de la Guardia civil et de l'UCO qui ont voulu obliger Zouheir à revenir sur ses déclarations sur les explosifs des Asturies et toutes les informations qu'il avait révélées à la police plus d'un an avant le 11 mars. Rafa Zouheir ajoute dans sa lettre publiée par le journal espagnol que “Las víctimas tienen el derecho de saber si colaboré con banda armada o con banda de la Guardia Civil” (les victimes ont le droit de savoir si j'ai collaboré avec une bande armée ou une bande de la Guardia civil). Rafa Zouheir passe devant la commission parce qu'il a fait savoir à qui veut l'entendre qu'il était prêt à révéler tout ce qu'il savait. Après ses témoignages fracassants où il a donné la Guardia civil, les services secrets, les indics de la police et les différentes infiltrations qui avaient très mal tourné, il déclare qu'il avait avisé des attentats avant l'heure et que la police n'a pas fait grand cas de ce qu'il disait malgré la véracité des dires et la force des preuves. Il termine en disant que les policiers qui lui ont rendu visite dans sa cellule lui avaient clairement dit que s'il ne collaborait pas il allait manger les 200 morts des attentats. Formule bizarre qui a fait couler beaucoup d'encre et sur laquelle il a fallu revenir à l'article 169 du code pénal pour savoir s'il y a lieu de poursuivre les agents de police ou non. `Une tentative de suicide très louche La nouvelle du passage de Rafa Zouheir par l'infirmerie de la prison madrilène où il croupit après avoir fait de multiples séjours dans plusieurs établissements carcéraux de la capitale, reste très intriguante. Il a fallu attendre une déclaration des autorités de la prison pour savoir ce qui s'était passé il y a deux semaines dans la cellule du Marocain. Une tentative de suicide, dit-on, sans donner de détails. Sauf que quand on creuse, on trouve que le présumé complice des instigateurs des attentats du 11 mars, a avalé une grande quantité d'eau de javel diluée dans de l'eau. Tentative de suicide ou suicide forcé, on ne saura jamais. Mais de source sûre, on apprend que ce n'est pas là une réelle tentative d'en finir avec la vie. Car si Zouheir voulait mettre un terme à son calvaire, il aurait avalé de l'eau de javel sans la diluer ou alors aurait eu recours à une autre substance mortelle. Ce choix est déjà interprété comme un avertissement de la part du Marocain pour que le juge Del Olmo donne suite à ses doléances. Il faut rappeler que Rafa Zouheir avait insisté pour se faire entendre devant la Commission du 11 mars où il a révélé des choses gravissimes sur la Guardia civil, la police nationale espagnole qui s'épiaient mutuellement au lieu de cerner le trafic d'explosifs des Asturies. Quoi qu'il en soit, ce dernier incident vient jeter le trouble dans une affaire qui n'a pas fini de livrer tous ses secrets. Surtout que le Marocain a déjà donné les noms de plusieurs agents de police qui savaient pour les explosifs sans jamais réagir. Une accusation qui voudrait tout simplement dire que la police espagnole a failli à sa mission et qu'elle doit être poursuivie pour manquement au devoir.