Corée du Sud La Corée du sud est l'un des rares pays du Tiers-monde à avoir réussi, en l'espace de quatre décennies, un décollage économique spectaculaire. Cette performance l'a hissée au rang de 12ème puissance économique mondiale.Le pays est actuellement un acteur majeur du commerce international, et tend, de plus en plus, à devenir l'un des leaders mondiaux dans le secteur des nouvelles technologies. Qui se souvient qu'il y a quarante ans à peine, la Corée du sud était un pays plus pauvre que le Maroc ? Aujourd'hui, elle est huit fois plus riche en termes de PIB par habitant (plus de 10.000 US$). Classée désormais 12ème puissance économique mondiale, elle a adhéré depuis 1996 à l'Organisation de coopération économique et de développement (OCDE), qui regroupe la vingtaine de pays les plus industrialisés de la planète. Ce nouveau statut est l'aboutissement du processus de décollage spectaculaire de l'économie amorcé dès la fin de la guerre de Corée (1950-53). Ainsi, le taux de croissance a été très fort et soutenu : 9 % en moyenne entre 1955 et 1990 (rien que de 1981 à 1989, le PNB a été multiplié par trois). Mais, comment un petit pays (99.000 km2), parmi les Etats les plus densément peuplés de la planète (479 hab./km2), dépourvu de ressources naturelles de valeur (types pétrole, gaz, or ou diamant) a-t-il pu réussir de telles performances ? Ce que l'on a appelé, à juste titre, le “miracle sud-coréen” repose sur une aide américaine massive au départ, une main-d'œuvre abondante et peu coûteuse et le rôle décisif de l'Etat. Ce dernier a conduit une planification, probablement la plus rigoureuse des pays non socialistes. D'ailleurs, c'est la création d'entreprises publiques dans les secteurs de l'acier et du raffinage par exemple qui a été à l'origine du démarrage de la grande industrie. Et c'est le gouvernement qui fixait les orientations, les objectifs et les priorités de ces entreprises, épaulé dans cette mission d'encadrement par la Banque centrale qui avait la haute main sur les prêts et les subventions qui leur étaient accordés. Politique d'industrialisation accélérée La politique d'industrialisation a été relayée par les fameux chaebols, conglomérats comparables aux non moins célèbres zaïbatsus japonais et aux anciens konzerns allemands. Ce sont à l'origine des holdings familiaux qui opèrent dans tous les secteurs d'activité. Cela va du BTP, la sidérurgie et la construction navale à l'électronique en passant par l'automobile et les équipements industriels. Le processus d'industrialisation s'est déroulé en trois étapes majeures. Jusqu'en 1970, ce sont les produits alimentaires, le textile, le ciment, les engrais chimiques et les produits dérivés du pétrole qui dominent. C'est au cours de cette phase que les bases de l'industrialisation ont été renforcées. Ainsi, par exemple, dans l'activité textile, la Corée a réussi une parfaite remontée de la filière, qui aurait pu servir de modèle au Maroc. En partant d'un bien de consommation, en l'occurrence les articles d'habillement, les Coréens ont commencé à produire progressivement les demi-produits nécessaires à la confection et qui étaient jusqu'alors importés. Et pour que la remontée de la filière soit complète, même les biens d'équipement qui assurent les transformations successives de ces intrants ont commencé à être produits localement. Au final, le pays exporte aujourd'hui plus de fibres synthétiques (1er rang mondial) et d'équipements pour l'industrie textile que d'articles d'habillement, bien qu'il en soit le 4ème exportateur mondial. La deuxième phase va démarrer avec le troisième plan (1970) et l'apparition des industries lourdes, situées à l'amont de celles de la première étape : sidérurgie, pétrochimie, construction navale et automobile. Les performances de cette deuxième série d'industries ont été telles que la sidérurgie et la construction navale, par exemple, ont conduit bon nombre d'aciéries et de chantiers navals à la fermeture ou à des restructurations extrêmement douloureuses. D'ailleurs, la Corée est actuellement le 1er constructeur naval de la planète et assure environ 50 % des commandes mondiales. C'est au cours de cette deuxième période que les chaebols prennent tout leur essor et commencent à dominer l'économie. Une cinquantaine de conglomérats, dont dix trusts géants (Hyundai, Daewoo, Samsung et LG Electronics, pour ne citer que les noms bien connus des Marocains), emploient plus de la moitié de la main-d'œuvre et produisent près de 75 % des biens manufacturés. La troisième phase, qui démarre à partir de 1980, se caractérise par l'aventure électronique et l'entrée dans les secteur de la haute technologie. Les Coréens ne vont plus se contenter d'assembler les composants électroniques japonais, ils se mettent à les fabriquer. Un effort considérable est fourni en matière de recherche-développement dans les semi-conducteurs et les biotechnologies. Les plus grands trusts opérant dans les technologies de pointe se sont implantés dans la Silicon Valley, en Californie. En outre, ils ont conclu des accords de partenariat stratégique avec les grandes firmes nord-américaines, nipponnes et européennes, qui leur facilitent l'accès aux marchés de ces pays. Promotion des exportations En 1962, La Corée a révisé sa politique d'industrialisation, passant des activités d'import-substitution aux industries tournées vers l'exportation. Depuis cette date, c'est la promotion des exportations qui a orienté l'industrialisation et abouti à la concentration dans des complexes manufacturiers gigantesques. Politique couronnée de succès, puisque le pays est devenu un concurrent sérieux du Japon sur de nombreux marchés et que les résultats du commerce extérieur ont dépassé ceux du marché local dès 1980. La nature des produits exportés a suivi les étapes d'industrialisation, passant du textile-habillement à l'acier et aux équipements pour l'industrie. Actuellement, les exportations portent de plus en plus sur les produits à haute valeur ajoutée tels que les produits faisant appel aux composants électroniques. L'investissement massif dans la high-tech fait de la Corée du Sud l'un des acteurs majeurs du commerce mondial dans ce domaine. A l'horizon 2005-2006, le pays deviendra le leader mondial du numérique par l'intermédiaire de l'un de ses trusts les plus en vue, LG Electronics. On attribue souvent la réussite exceptionnelle de la Corée à d'autres facteurs non économiques, en particulier le confucianisme. Celui-ci, contrairement à ce que l'on croit, n'est pas une religion, mais une philosophie de la vie, imprègne les mentalités des sud-coréens. Il prône l'éducation et la loyauté envers la communauté et les proches comme valeurs suprêmes qui doivent guider l'action de tout être humain. Du coup, l'instruction et l'amour du travail sont érigés en devoir national. Et par extension, le travailleur doit faire preuve de fidélité à l'entreprise qui l'emploie. Aussi, les sud-coréens ont-ils l'une des durées de travail les plus longues du monde, malgré une réduction intervenue au cours des dernières années (50 heures/semaine au lieu de 60). A l'héritage confucéen, s'est ajouté une forme de “réarmement moral” sous l'effet du contexte historique et géopolitique. A la Corée du Nord, il fallait opposer une idéologie susceptible de servir le progrès économique qui a débouché sur le mouvement Saemaul (communauté nouvelle), lancé en 1970 et qui visait à développer l'entraide et le volontarisme.Et à l'instar de Taiwan, Hongkong et Singapour, et dans une moindre mesure le Japon, la mobilisation du sentiment national, la pression de la propagande de l'Etat et la volonté d'être à la pointe de la technologie expliquent la réussite remarquable du modèle sud-coréen. Ce développement spectaculaire conduit la Corée à nourrir l'ambition de rejoindre le G 8, qui regroupe les nations les industrialisées de la planète plus la Russie, à l'horizon 2010.