Dialogue euro-méditerranéen Lors de son discours sur le partenariat euro-méditerranéen, le Président Chirac a appelé au renforcement de ce partenariat, en essayant de dissiper les inquiétudes du Maroc face à l'élargissement de l'Union européenne à l'Est. Il a également exprimé l'engagement de la France de se faire “l'avocat privilégié” du Royaume auprès de l'Union européenne pour lui accorder un “statut avancé”, situé entre l'association et l'adhésion. Dans le cadre de sa visite d'Etat pour soutenir “le processus de modernisation économique et l'approfondissement de la vie démocratique”, le Président Jacques Chirac a prononcé, à Tanger, un discours sur le partenariat euro-méditerranéen (PEM). Devant un parterre de jeunes, il a livré sa conception de cette coopération régionale Nord-Sud. Lancé par la conférence de Barcelone en 1995, le dialogue euro-méditerranéen vise à instaurer des relations étroites de coopération économique et politique entre les pays riverains de la Méditerranée pour en faire une zone de stabilité et de prospérité. Le Maroc et la France sont au cœur de ce PEM et en sont des acteurs actifs. Conscient de cette réalité, le Président français a appelé le Royaume à jouer un rôle-clé dans ce partenariat. “Nouveau souffle” Adressant “un message de confiance” à la jeunesse marocaine dans le cadre du PEM, il a affirmé : “cette rive européenne qui vous attire” représente “une grande chance” pour les pays du Maghreb, celle d'un “espace de paix, de stabilité et de prospérité partagée”. Mais pour tirer le meilleur profit de cet espace, les pays du Maghreb doivent surmonter leurs différends et assainir leurs relations inter-étatiques. Parfaitement au fait de ce dossier, Jacques Chirac a exprimé “son espoir de voir le Maghreb tourner le dos à la discorde et se consacrer avec détermination au seul dessein qui vaille aujourd'hui : la lutte contre la pauvreté et pour la consolidation de l'Etat de droit”. Affirmant sa conviction que le Maroc croit à l'intégration régionale, il a ajouté : “l'intégration économique de votre région est essentielle…Et l'entente algéro-marocaine en est la clé”. Propos frappés du sceau du réalisme et de la sagesse et que confirment toutes les études : l'absence d'intégration maghrébine coûte chaque année plusieurs milliards de dollars en manque à gagner pour la région. Poursuivant l'exposé de sa vision du PEM, le Président français a souhaité que “la dimension euro-méditerrnéenne soit au cœur de la construction européenne”, car il estime que “l'espace euro-méditerranéen peut offrir ce grand projet fédérateur et mobilisateur qui permettra de répondre à vos attentes légitimes”. Il s'agit dès lors de donner “un nouveau souffle” au dialogue entre les pays riverains de la Méditerranée, dans le cadre du processus de Barcelone, pour mettre en place, malgré la persistance de certains conflits, notamment au Moyen-Orient, un partenariat entre l'UE et les pays de la rive Sud. En déclarant que le Maroc est en train de gagner la confiance des investisseurs européens, Jacques Chirac n'hésite pas à proposer la création d'une “assemblée parlementaire euro-méditerranéenne consultative”. Cette assemblée regrouperait les élus de tous les pays associés dans le processus de Barcelone. Les nouvelles menaces qui pèsent sur la région (terrorisme, prolifération des armes de destruction massive, trafics de toutes natures…) rendent l'approfondissement du dialogue politique de plus en plus nécessaire. Dissiper les inquiétudes sur l'élargissement Devant l'inquiétude du Maghreb, en premier lieu le Maroc, face à l'élargissement de l'UE à l'Est, le Président français a tenté de dissiper les craintes légitimes exprimées à ce sujet. Les pays du Maghreb estiment, à juste titre, ne pas être en mesure de lutter à armes égales avec les dix nouveaux membres, dont l'adhésion sera officielle en mai 2004. En effet, ces pays bénéficient de subventions qui renforcent leur compétitivité qui nuit aux exportations maghrébines. En outre, leur attractivité pour les investissements directs étrangers risque d'accroître le détournement des capitaux au détriment des pays de la rive sud méditerranéenne. D'autant que les conditions de prêts octroyés par l'UE sont moins favorables et alourdissent les coûts de production, décourageant ainsi les investisseurs européens Aussi, Jacques Chirac s'est-il voulu rassurant : “l'intégration de nouveaux membres n'exclut pas, bien au contraire, de construire avec nos partenaires du Sud”. Afin de lever toute équivoque et réaffirmer sa position sur ce sujet délicat, il a déclaré que “dans le domaine économique et social, l'élargissement de l'Union ne saurait nous détourner de la question cruciale du développement de la rive Sud”. En tout cas, il s'est engagé à plaider la cause des pays du Maghreb lors de la prochaine réunion euro-méditerranéenne à Naples (début décembre). Il s'est également engagé à se faire “l'avocat privilégié” du Royaume auprès de l'UE pour lui accorder un “statut avancé”, situé entre l'association et l'adhésion. Cette détermination à ne pas “lâcher” les pays du Sud l'a amené à appeler à une intensification de l'aide en faveur de ces pays. Il convient de rappeler que le Maroc est le premier bénéficiaire et le premier utilisateur de l'aide financière européenne dans le cadre du programme MEDA. Au total, 921 millions d'euros ont été engagés au profit du Maroc dans le cadre de MEDA I et MEDA II entre 1996 et 2001, et 426 millions d'euros lui seront alloués sur la période 2002-2004. A cette aide multilatérale, s'ajoute l'aide bilatérale française au titre de l'aide publique au développement, octroyée par l'intermédiaire de l'Agence française de développement (AFD), dont les engagements approchent un milliard d'euros depuis qu'elle a débuté son intervention au Maroc en 1992. Par ailleurs, lors de sa visite dans le Royaume en juillet dernier, le Premier ministre français, Jean-Pierre Raffarin a annoncé le doublement de l'aide financière de son pays pour la porter de 150 à 300 millions d'euros pour la période 2004-2006. En contrepartie, le Président français a invité les pays du Maghreb à fournir “un plus grand effort d'imagination dans les techniques et les méthodes de financement des projets”. Il estime que “la logique de l'assistance est révolue. Désormais, c'est celle du partenariat qui prévaut”. La visite qu'il a effectuée au site du futur port Tanger Méditerranée conforte cette thèse. En effet, ce projet est jugé stratégique par Rabat pour mieux ancrer le Maroc dans l'espace euro-méditerranéen.