Malgré l'absence de textes régissant le secteur La rapidité et la garantie de la sécurité qui accompagnent les systèmes électroniques de transfert de fonds expliquent sans doute le succès des structures privées qui évoluent dans le transfert d'argent. Si, au départ, ce sont les banques qui ont cherché à investir le créneau, aujourd'hui, de petits organismes y exercent. Certains avec les mêmes agréments des multinationales du métier lesquelles signent à leur tour des partenariats avec d'autres structures. Parallèlement, d'autres sociétés ont constitué leur propre réseau. Tout cela, en l'absence de textes régissant le secteur. Il suffit d'écrire son nom sur un formulaire, puis de donner celui du destinataire pour ensuite recevoir un numéro à lui communiquer, pour qu'il retire la somme à une agence, la plus proche de chez lui. Cela dure une quinzaine de minutes et c'est par des procédés électroniques que cela se passe. Avec ce système, plus de deux milliards de dirhams sont envoyés chaque année de l'extérieur au Maroc, selon nos estimations (à défaut d'avoir les données auprès de Bank Al-Maghrib et de l'Office des changes).Beaucoup les présentent comme des entreprises exploitant le sort des émigrés, mais ces derniers les auraient créées certainement si elles n'existaient pas, simplement parce que les transferts sont un mécanisme de survie important pour les destinataires. Le phénomène, discret auparavant, s'est donc accru ces dernières années. Western Union, Money Gram,.. et les autres Au Maroc, plusieurs structures privées évoluent dans le transfert rapide d'argent : Western Union, Money Gram, Quick Dirham, Dirham Express... Ces deux derniers systèmes ont été lancés par des MRE, mais les deux premiers sont certainement les plus connus et les plus utilisés. Western Union a été le premier à ouvrir une agence en 1995 au Maroc, en signant une convention de partenariat avec Wafabank. Le label Western Union est sorti des Etats-Unis seulement en 1981, et n'est arrivé en Afrique qu'en 1982, en Egypte.Ensuite c'était le Sénégal, le Ghana et la Côte d'Ivoire en 1995, la même année qu'au Maroc. Aujourd'hui, on en voit partout et dans les coins les plus reculés du pays. Au Maroc, Western Union, présent dans plus de 72 000 agences réparties dans plus de 170 pays, propose ses services à travers le réseau des trois principales banques du pays (SGMB et Wafabank à travers Wafa Cash) et celui de Barid Al-Maghrib. Quant à Money Gram international, il est présent dans plus de 150 pays dans le monde et a signé une convention en 1998 avec Crédit du Maroc avant d'en faire autant avec la Banque populaire.De même, cette année, la multinationale américaine a signé une troisième convention avec une société marocaine, Euro Sol Maroc, qui a, à son tour, agrémenté (partenariat) deux autres organismes. Quels sont les organismes habilités à effectuer des opérations de transfert? "Lorsque nous avions pris la décision de lancer notre activité, nous avons contacté l'Office des changes qui nous a fait savoir par courrier qu'il n'y a pas pour l'heure de textes ni de lois régissant cette activité. Depuis, nous avons lancé notre activité en tant que société", souligne Abdelilah Nawfal, responsable commercial à Quick Dirham. Absence de textes pour le secteur Même son de cloche auprès d'un responsable d'Euro Sol Maroc, une SARL qui a signé une convention avec Money Gram. "Nous étions surpris de constater qu'il n'y a pas encore de textes organisant le secteur de transfert d'argent à partir de l'étranger, hormis quelques contraintes qu'il faut supporter", dit-il. Depuis, un juriste assermenté veille sur les opérations chez Euro Sol Maroc qui a ouvert ses portes, il y a de cela deux mois. De plus, elle déclare ses transactions à l'Office des changes. Selon les conventions signées entre ces organismes et les structures internationales de transfert d'argent, en termes de relation et d'obligation, ce sont les premiers qui sont responsables devant la loi de leur pays. Les organismes peuvent ainsi signer des partenariats avec des opérateurs économiques pour en faire des "sous-agents". C'est ce que Euro Sol Maroc a d'ailleurs initié. Ainsi, cette dernière a déjà établi deux relations de ce genre avec deux sociétés évoluant dans d'autres secteurs autres que le transfert d'argent. Seulement, il est exigé de ces deux sociétés un fax et un téléphone pour coordonner. Toujours est-il qu'Euro Sol Maroc contrôle tout le système électronique. Son partenaire, usant du téléphone et du fax, serait en mesure de satisfaire le client. La procédure des transferts de fonds semble être la même pour toutes les structures qui travaillent avec le réseau de Western Union et Money Gram, du moins pour ce qui est des concepts “fiabilité et rapidité”, mais la différence intervient au niveau des pourcentages des commissions soustraites des transactions. La problématique des commissions Ainsi, un aspect du service mérite d'être souligné. Il concerne les incompréhensions entre les sociétés prestataires et les clients, et qui pourraient être de nature à fragiliser le secteur. Entre le montant communiqué par l'expéditeur du mandat électronique et celui reçu par le correspondant, il semble qu'il y ait parfois une différence qui occasionne des mécontentements. Cette différence peut, selon certains, s'expliquer par deux raisons principales : les frais d'expédition qui ont été déduits au départ du mandat du montant communiqué et la fluctuation des cours des devises dans lesquelles sont émis les mandats électroniques. Il s'avère en fait que "le client ne doit communiquer à son correspondant que le montant duquel ont déjà été déduits les frais.Par ailleurs, le dollar ou l'euro n'ayant pas toujours le même cours, le correspondant a le droit de ne pas retirer son dû s'il constate que la devise est en chute. L'argent reste en principe à sa disposition pendant 45 jours", souligne une personne bien introduite dans le milieu. Il faut dire que sur la problématique des commissions, aucun organisme ne veut avancer un chiffre. Comment sont-elles alors fixées? Selon un responsable d'organisme de transfert, elles sont négociées avec les multinationales de transfert d'argent suivant évidemment le pays d'origine de l'envoi. "Nous avons négocié un taux de commission qui défie toute concurrence avec Money Gram sur les envois en provenance d'Espagne et d'Italie", souligne Kamal Jabry, directeur marketing et de la qualité à Crédit du Maroc.Quid des sociétés qui ont établi leur propre réseau? "Nous avons trois bureaux aux Etats-Unis (Astoria, Brooklyn et Manahattan) où nous faisons la collecte de l'argent que nous déposons ensuite à la banque Chase Manhattan. Cet argent est ensuite transféré dans un compte de BMCI au profit de Quick Dirham. Avec notre autorisation de cession dans les salles de marchés, nous faisons la cession de devises.Après, nous contactons les destinataires pour les aviser de récupérer leur argent. Hors Casablanca, nous faisons une mise à disposition dans les agences BMCI des villes du royaume. Pour Casablanca, le délai est de 24 heures, dans les autres villes, il faut 48 à 72 heures", souligne Abdelilah Nawfal.Aujourd'hui, si l'on ne dispose pas du montant global transféré par ces systèmes, Crédit du Maroc compte réaliser un volume de plus de 20 millions de dirhams par mois. Quant à Wafa Cash, le cash (qui incorpore les activités de transfert d'argent et de change), génère pas moins de 70 millions de dirhams/an. Adama Sylla