Le président américain manque de rassurer le Premier ministre israélien quant à ses intentions. Selon les dires des Américains qui ont déjà eu affaire à lui par le passé, Benyamin Netanyahu, le nouveau Premier ministre israélien, n'a rien perdu de son caractère hargneux. La dernière fois qu'il occupait la fonction de Premier ministre, de 1996 à 1999, il passait son temps à se chamailler avec Bill Clinton. Cette fois, lors de sa première visite à la Maison-Blanche, il a complètement décontenancé le nouveau président Obama avec un cours magistral apocalyptique sur les 4000 ans de l'histoire juive à laquelle, dit-il, un Iran armé de la bombe nucléaire pourrait mettre un terme. Au milieu de ses amis et partisans américains conservateurs, Netanyahu a marqué une sorte de rupture inquiétante par rapport au nouveau gouvernement démocrate et à sa vision du monde. La forteresse Israël est devenue son seul mot d'ordre, semble-t-il. De plus, Netanyahu craint que ses partisans américains n'aient à se préparer au pire face aux années orageuses à venir sous la présidence d'Obama. Mais le Premier ministre israélien est néanmoins rentré au pays en ayant accompli une chose inattendue. Obama, avec son invité israélien à ses côtés, a manifestement fixé un délai approximatif pour l'organisation de pourparlers avec l'Iran. Ceux-ci débuteraient, a-t-il déclaré, après les élections présidentielles qui se tiendront le mois prochain en Iran. Avant la fin de l'année, « nous devrions avoir un bon aperçu de la direction qu'ils prendront, bonne ou mauvaise ». Auparavant, les Américains résistaient à l'idée même d'imposer une date butoir, tel que les Israéliens le suggéraient. Mais que faire si ce dialogue tournait finalement à l'échec ? Netanyahu a félicité Obama pour avoir déclaré que « toutes les options étaient sur la table ». En réalité, le président s'est ensuite ostensiblement abstenu de répéter cette phrase. « Nous ne sommes pas en train de prendre une série de mesures, telles que le renforcement de sanctions internationales, visant à assurer que l'Iran comprenne bien que nous sommes sérieux », a-t-il déclaré. Selon les conseillers de Netanyahu, le Premier ministre faisait référence à une interview récente dans laquelle le président utilisait effectivement d'un ton approbateur l'expression « toutes les options ». Netanyahu y a ensuite ajouté sa propre prophétie : « Israël se réserve le droit d'agir en légitime défense ». De telles références à peine voilées à une action militaire renforceraient, selon lui, la pression diplomatique et économique sur les Iraniens, les poussant à renoncer à l'arme nucléaire. Le fait qu'il balaie l'histoire riche et parfois tragique des Juifs a remporté le soutien de sa nouvelle équipe de conseillers. « Il défendra ses principes », a déclaré l'un d'eux en dehors de la Maison-Blanche. « Il ne se laissera pas intimider. » D'autres Israéliens plus modérés et pacifistes déplorent la prépondérance dans le cabinet du Premier ministre de ces hommes religieux, coiffés d'une kippa, dont la plupart sont nés aux Etats-Unis. Ces hommes sont souvent associés au mouvement colonisateur juif. Mais tous les conseillers de Netanyahu ne sont pas des colons ou des religieux. Yitzhak Molcho, un confident de longue date, avocat, à ses côtés pendant son premier mandat, a gagné la confiance des diplomates américains en réalisant des progrès modestes dans les négociations avec les Palestiniens. Netanyahu et le leader palestinien, Mahmoud Abbas, se disent tous deux prêts à reprendre les pourparlers sans conditions préalables. Pourtant, les négociations sont de fait suspendues. Obama a vivement recommandé à Netanyahu de sauter sur « l'occasion historique de progresser de manière significative dans ce dossier ». Netanyahu a lâché quelques bribes de ses vieux arguments casuistiques en rejetant la demande du président américain selon laquelle « la colonisation [de la Cisjordanie] doit être stoppée ». Israël, a avancé le Premier ministre, a démantelé toutes ses colonies à Gaza, mais les Palestiniens n'ont pas supprimé leurs « infrastructures terroristes », tel que l'exigent les accords antérieurs et ont laissé les islamistes violents du Hamas régner sur Gaza. Par voie de conséquence, le processus de colonisation peut donc se poursuivre. Dans tous les cas, Obama refuse catégoriquement la proposition faite par certains Israéliens : de forcer l'Iran à renoncer à son programme nucléaire avant de pouvoir débuter les négociations avec les Palestiniens. « S'il devait y avoir un lien, a déclaré le président, je crois personnellement que ce serait plutôt l'inverse. Dans la mesure où nous pourrions aboutir à la paix avec les Palestiniens (entre les Palestiniens et les Israéliens), alors cela renforcerait selon moi notre influence au sein de la communauté internationale dans le but de gérer la menace potentielle représentée par l'Iran. » Netanyahu a rencontré séparément la secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, ainsi que le conseiller à la sécurité nationale, le général James Jones. Toutes les réunions se seraient déroulées dans le calme. Mais le soir, tandis qu'il se détendait avec un groupe d'amis intimes composé de magnats américains conservateurs qui le soutiennent depuis des années, Netanyahu a exprimé son malaise. En dépit de tous ses efforts pour replacer la situation dans le contexte historique juif, il a senti que le président se préoccupe plus du sort des Palestiniens. « Qu'est-ce qui peut bien toucher M. Obama ? », a-t-il lancé nerveusement à voix haute.