Le résultat du scrutin présidentiel n'est pas une surprise, tout s'est passé comme prévu, sauf que le taux de 90% avec lequel Bouteflika a été réélu a surpris jusqu'aux plus inconditionnels du président sortant. Même l'heureux élu semble géné car ces élections rappellent celles organisées pendant le règne du parti unique. Pour l'opposition, cette fraude massive était prévisible, le taux de participation de 74% est vivement contesté aussi bien par les partis d'opposition qui ont appelé au boycott, notamment le R.C.D de Saïd Sadi et le F.F.S de Hocine Ait Ahmed, que par les autres candidats qui ont pris part à cette élection. Selon les responsables du F.F.S la participation n'a pas dépassé les 18% et parlent «d'une nouvelle imposture et un viol national». Ce chiffre avancé par le F.F.S est donné sur la base d'informations recueillies par les militants du parti, qui ont annoncé pendant la campagne électorale qu'ils allaient mobiliser leur propre commission de surveillance composée d'associations et de syndicalistes pour suivre de près le déroulement du vote dans 38 wilayas ( le pays en compte 48). Selon Karim Tabou, Premier secrétaire du F.F.S, les éléments du parti «ont pu suivre de très prés le déroulement du scrutin dans 37 wilayas et ont communiqué au fur et à mesure, les taux de participation de l'ouverture des bureaux de vote jusqu'à la clôture de l'opération» «cette fraude massive systématique et généralisée» est le résultat des méthodes du bourrage des urnes. Selon les sources de ce parti d'opposition, le pouvoir affolé par un faible taux de participation enregistré durant les premières heures de la matinée, a donné instructions à toutes les administrations de gonfler les chiffres par tous les moyens. D'autres voix de l'opposition dénoncent la présence en force dans les bureaux de vote, des corps constitués et des policiers, ces derniers étaient transportés dans des bus et faisaient le tour des bureaux pour voter à plusieurs reprises afin de gonfler le taux de participation et le fichier général a été aussi exploité. Pour le parti d'Ait Ahmed «l'objectif de ce bourrage des urnes est clair, il s'agit pour le régime de concrétiser le retour au système unique, de la pensée unique et du candidat unique. Saïd Sadi et Ait Ahmed l'inévitable rapprochement. Les frères ennemis qui représentent tous les deux cette Kabylie frondeuse et orgueilleuse, sont enfin décidés à mettre de coté leurs différends, et ce, pour la première fois depuis l'avènement du multipartisme en Algérie. Cette alliance annoncée a été sans doute dictée par le résultat du 9 avril. Les deux leaders sont plus que jamais convaincus de la nécessité d'entamer une ère nouvelle pour la démocratie. Saïd Sadi exprime donc favorablement sa volonté de rapprochement avec Ait Ahmed et réitère son appel à une convergence des forces politiques et sociales et reste convaincu que cette alternative est possible autour d'un compromis historique. Cette dynamique d'union s'est traduite sur le terrain pendant toute la campagne électorale et doit être concrétisée par un accord politique au niveau des directions des partis, affirme le docteur Sadi. Lors de la conférence de presse, le leader du R.C.D est revenu sur la grave dérive. Dans l'après-midi du vendredi, le siège national de son parti a été pris d'assaut par des dizaines de supporters du président élu et à leur tête le maire d'Alger-centre. «Cette opération commando est une première application du programme de Bouteflika» en guise de riposte. Le président du R.C.D est décidé à porter cette affaire devant la justice. Une plainte sera déposée contre Bouteflika pour violation de la loi électorale. «Le 3ème mandat sera la préparation de la relève» Dans une interview accordée au journal El Watan, le politologue et auteur Rachid Grine donne une première lecture du prochain quinquennat et de l'avenir politique. Il déclare «la réélection du président candidat après la révision de la constitution à la hussarde, est le prélude à une période qui ne sera pas simple. D'une part, l'âge du président et son état de santé ne préjugent pas d'un mandat serein». En se posant la lancinante question «l'armée se remettra-t-elle en selle ?» et surtout y-aura-t-il une autre révision de la constitution pour imposer son remplacement ? En politique, il y a des victoires amères plus difficiles à gérer qu'un échec. ■