Depuis le lancement des travaux du projet d'aménagement de la Vallée du Bouregreg, la façade des bâtiments qui donne sur la rive Sud du fleuve, tarde toujours à prendre forme à la hauteur de ce grand projet. ■ Depuis l'annonce de l'aménagement de la vallée du Bouregreg, les prix ne cessent de monter au quartier Mellah et dans la médina de Rabat. La fièvre des prix a atteint même le quartier Hessan, qui n'avait pas la côte jusque-là, comme le quartier de l'Agdal ou Hay Riad. Subitement. Les nouveaux citadins redécouvrent l'ancienne ville, après avoir été délaissée pendant une vingtaine d‘années. Au Mellah, autrefois quartier juif de Rabat, peuplé de familles israélites jusqu'au début des années soixante, seule la synagogue témoigne de l'empreinte juive de son passé. Aujourd'hui, l'endroit traîne derrière lui la réputation d'endroit mal famé. Ce quartier est aujourd'hui au cœur d'une grande opération de spéculation où tous les moyens sont permis. A quelques mètres de là, au quartier Rahba Lakdima, un marché aux grains qui a vécu ses heures de gloire avant le protectorat, transformé en marché aux puces depuis les années 50, les commerçants qui possèdent une boutique ou un étalage, ont déjà préparé leur paquetage, informés depuis des années, d'un départ imminent. Le terrain de Rahba Lakdima va être aménagé en jardin andalou, cafés, hôtels et bazars, selon le nouveau plan de réhabilitation. Contrairement au quartier Mellah et des Consuls, cette partie est un terrain des Habous à l'instar de Dar Debbagh. Ici, c'est plus facile de déloger les locataires puisque le terrain appartient à l'Etat. Ailleurs, c'est la spéculation qui s'en occupe. En 2006, une opération de recensement, en concertation avec le service de la wilaya et du ministère de l'Habitat, a été lancée par l'Agence pour définir le nombre de ménages habitant le quartier Oukassa. Selon les statistiques du ministère de l'Habitat de 1993, plus de 221 ménages habitaient aux foundouks Masstiri, Diour Dbagh et Bergach. Pour les déloger, l'agence a déboursé un montant de 70.000 DH d'indemnité pour chaque ménage. L'imbroglio des monuments classés Depuis le début de l'opération d'aménagement, le souci de la préservation du cachet historique de l'endroit a été défini sur instruction Royale. L'agence avait recruté un archéologue pour la conseiller sur les monuments classés. Mais dans les priorités du projet, certains lieux ont été abandonnés au béton armé, au détriment de l'histoire et de la mémoire. Le fort Hervé, qui se trouve à proximité de la plage de Rabat, a été construit par les Allemands au 19ème siécle, il fut rebaptisé fort Hervé par les Français. Ce monument historique est aujourd'hui laissé à l'abandon. Autrefois, il était utilisé comme lieu de détention administrative. Aucun document officiel de l'IER ne mentionne pourtant cet endroit comme un éventuel lieu de détention secret. Dar Soltan à Ksar Labhar au quartier Manzeh, autrefois utilisée comme maison d'été par Mohammed V, a été rasée, il y a une année. De l'aveu même de Mohamed Semmar, monsieur histoire à l'agence d'Aménagement du Bouregreg, ce monument ne représentait aucune valeur historique ! Le plus grave, c'est le triste sort réservé à la prison Laâlou à Rabat, Kasbah militaire au début, construite par le sultan My Rachid. Ce lieu a été transformé par les français en hôpital miliaire au début du protectorat, puis en prison. Aujourd'hui, il a été transformé en musée d'histoire militaire, mais l'opération de restauration dont il a bénéficié a été une vraie catastrophe.