Certes, les glaces sont de plus en plus consommées, mais elles sont loin de conquérir tous les marocains. En général, la demande reste relativement timide et leurs consommations subissent une tendance classique. En ces temps estivaux, les glaces sont à l'honneur et prennent le pas sur les autres entremets. Ainsi, chaque année, 8 millions de litres, dont 5 pour les glaces industrielles et 3 millions pour les artisanales, sont consommés dans le pays et les clients en sont de plus en plus friands. Pour répondre au plaisir des enfants et des adultes, les professionnels du secteur investissent lourdement. La croissance de ce marché est estimée de 4 à 5% par an. Aujourd'hui, ce type de produits représente au moins 30% du rayon froid contre moins de la moitié il y a une dizaine d'années. Dans les rayons ultra frais des grandes surfaces casablancaises, les glaces, sous toutes leurs formes, occupent une place de plus en plus importante. Ceci indique que le secteur est en expansion. Après Casablanca, c'est Tanger et Tétouan qui en consomment le plus. En moins de dix ans, elle a conquis toutes les couches de la société. Néanmoins, selon les estimations des fabricants de glaces artisanales et industrielles, au Maroc, les chiffres annuels oscillent entre 0,35 et 1,5 litres consommés par tête d'habitant. Il est clair qu'on est loin des chiffres enregistrés chez nos voisins maghrébins et européens : 3 litres en Tunisie, 6 en France, 14 en Europe du Nord. Les Etats-Unis remportent la palme de la plus grosse consommation par habitant avec 22 litres par an. Cette évolution timide est dûe à une tendance classique. Celle qui se limite exclusivement à la période estivale. Ce dire est confirmé par la réalité chiffrée suivante : 70% des ventes se font entre juin et août. Ce qui n'est pas le cas dans d'autres régions du globe, comme les pays scandinaves, où la consommation est étalée sur l'ensemble des saisons. Ajoutons que la consommation des entremets glacés demeure un achat impulsif. C'est quelque chose que l'on consomme sur place ou en flânant. Elles sont également loin d'être un élément du panier du Marocain pour être consommées sous le toit familial. En général, la demande en glaces reste relativement timide. Cette tendance négative est accentuée par une répartition géographique très inégale. Ce mets est plutôt consommé dans les centres urbains. Dans le rural, la glace dite à l'ancienne, fabriquée «comme à la maison» par l'homme au blouson blanc, demeure la plus prisée des consommateurs dans ces milieux. Le vendeur de glaces continue à proposer «ses bastas» dans les souks hebdomadaires. Les enfants se précipitent chez le marchand ambulant reconnaissable de loin, pour acheter pour quelques menues monnaies, une de ces fameuses «basta», au goût inimitable. Un large éventail de prix Les prix ne rebutent pas les gourmets. Les glaces servies en coupe ou à l'assiette sont nettement plus chères que celles industrielles. Pour les industriels, c'est la bonne période car, en dehors de l'été, l'appétit pour les sorbets fond... comme glace au soleil ! Pour booster les ventes, certains fabricants collent au pouvoir d'achat local et pratiquent des petits prix pour les petites bourses. L'offre commence avec du 30 ml au lieu du 50 ml habituel. Les enfants sont la cible privilégiée avec une offre de produits vendus à partir de 1,50 DH. Dans le circuit traditionnel, la fourchette des prix de la gamme «Impulse», est comprise entre 1.50 et 12 DH. Par contre, dans les grandes et moyennes surfaces, les cafés, hôtels, restaurants, on trouve des gammes spécifiques dont les prix varient entre 35 et 55 DH. Le prix des glaces «au bon goût» demeure hors de la portée de certaines bourses. Pour expliquer ce fait accompli, un industriel a déclaré que les glaces sont un produit sensible. Située entre les boissons et les produits laitiers, la glace est une activité très capitalistique dans la mesure où elle exige des conditions de fabrication et de vente très strictes. Le choix des matières premières est très important pour sublimer le goût et la qualité. Ainsi, l'entrepreneur marocain investit plus de 15 millions de DH, rien que pour le développement d'une centrale de production. Il est à ajouter que tout investisseur dans ce secteur est appelé à être très vigilant quant à la question de la qualité. Le système industriel mis en place doit répondre aux normes et conditions internationales de qualité et d'hygiène exigées tant par les franchiseurs que par les partenaires. La qualité de la glace, c'est non seulement la matière première et le processus de fabrication, mais aussi le conditionnement et le transport. Il faut compter une flotte de 10 camions et une plateforme logistique nécessitant un investissement de 35 MDH. Quand à la communication et la publicité, elles occupent également une large part du budget des fabricants de glace. Cette part peut frôler les 5 millions de DH. D'une manière générale, le secret du succès des glaces au «bon goût» repose sur un système industriel de qualité. Ce système est coûteux et son coût ne peut qu'être pris en considération dans le calcul des prix. Economie d'échelle Si le challenge pour les fabricants est d'atteindre au moins les chiffres des voisins, quelle peut être donc la politique commerciale qui leur permettrait d'attirer le maximum de consommateurs ? A force de constater que l'essentiel des ventes est réalisé via le marché de plein air, les épiciers et kiosques spécialisés, plusieurs fabricants comptent renforcer leur positionnement, en mettant l'accent sur le circuit traditionnel. La taille de ce circuit représente 95% des flux commerciaux. Il est donc nécessaire de mettre l'accent sur son développement. Une telle stratégie vise la distribution de la crème glacée auprès du petit commerce de détail tout en procédant à la mise en place de nouveaux meubles congélateurs dans les épiceries installées dans les quartiers populaires et régions éloignées des grands centres urbains. La volonté est-elle de démocratiser ce produit ou d'aboutir à une économie d'échelle ?