Un tournoi à sept et une querelle à deux Le tournoi international à sept que vient d'abriter la ville du Détroit, n'a pas laissé indifférente la Fédération Royale Marocaine de Rugby. Mais au-delà de cette anomalie conjoncturelle, qu'en est-il de la pratique de cette discipline au Maroc ? IIs sont tous deux marocains. Ils sont tous deux férus de rugby et ils sont tous deux présidents. L'un, Saïd Bouhajeb, est à la tête de la FRMR, depuis six ans. L'autre, Aziz Bougja, son prédécesseur à la tête de la même Fédé, est, depuis également six ans, aux commandes de la CAR, Confédération Africaine de Rugby. Ce qui est sûr cependant, c'est qu'ils ne parlent pas le même langage. Ce tournoi de Tanger est venu, en fait, mettre à nu ce que les deux hommes ont toujours cherché à cacher. Ils continuent d'ailleurs de clamer qu'ils n'ont pas de conflits personnels, faute d'être de grands amis. Ce qu'ils semblaient être, avant que le second ne passe le relais au premier. A Tanger, il y avait les équipes nationales de France d'Afrique du Sud, de Tunisie, de Côte d'Ivoire, de Sénégal et du Kenya… pour prendre part à ce tournoi «satellite», le deuxième en Afrique avec celui de Nairobi, et initiés tous les deux par l'IRB, la Fédération internationale et la CAR. Dans une correspondance envoyée tout récemment à la ministre de la Jeunesse et du Sport, le président de la FRMF dit tout son étonnement et toute son indignation de voir laisser organiser «un tournoi sans l'accord de la Fédération de tutelle», alors que le ministère est tenu de faire «respecter la légalité et la légitimité ?». Il rappelle au passage que la Fédération a toujours été partie prenante dans l'organisation de ce tournoi avant de constater quelques «dépassements» et de «l'humiliation» dont elle aurait fait l'objet. C'est ce qui a poussé, rappelle-t-il dans la même correspondance dont une copie a également été envoyée au CNOM, la dernière assemblée générale de la FRMF à «geler cette manifestation», jugeant impensable que l'on permette à la CAR de traiter directement avec le club de Tanger. Aziz Bougja, qui tient à souligner qu'il n'a aucun problème et qu'il a du mal à comprendre pourquoi la fédération tient tant à se mettre hors circuit alors que c'est un tournoi qui réunit les meilleurs d'où le rugby national doit tirer le plus de profit. «S'ils n'avaient rien à se reprocher, pourquoi ont-ils refusé de se soumettre aux conditions du cahier des charges que l'on avait mis à leur disposition ?», entonne Bouhajeb. «On n'a pas idée de présenter un cahier des charges à quelques jours du début d'une aussi grande manifestation. Ne sait-il pas qu'un budget est arrêté un an à l'avance ? C'est bien dommage que pour quelques personnes, l'intérêt du rugby passe en dernier», riposte Bougja. C'est bien dommage, surtout, qu'on en soit là pour un pays qui a découvert le rugby en 1907, qui est resté attaché à la FIRA (Fédération Internationale de Rugby Amateur) jusqu'en 1999, quand l'IRB a créé les Confédérations pour qu'il soit rattaché à la CAR. Entre temps, feu Hadj Mohamed Benjelloun avait crée la FRMA en 1956. Un grand nombre de joueurs sont allés monnayer leur talent, en France notamment, dont un certain Benazzi qui, de son Oujda natal, est parti à la conquête du rugby français jusqu'à devenir le capitaine du XV tricolore. Il y a aussi le cas plus récent encore de Fayçal Benchrif qui vient de partir de Kalaate Sraghna pour jouer avec DAX, le club français qui compte dans le top 14. Il y a eu Oujda avec l'USMO et le MCO. Il y a eu le COC et le RUC, Safi aussi. Il faut désormais compter avec Sraghna entre autres. Un club vient d'être créé à Ouarzazate. Un autre est attendu à Benguérir. Ils sont aujourd'hui 21 clubs, dont 11 seulement disposent de seniors. «Il a tout cassé. Je lui ai légué une fédération nickel, au niveau des finances comme à tous les points de vue. Aujourd'hui, il n'y a plus rien», dit Bougja en parlant de l'actuel président. «Le rugby, tient à rappeler Bouhajeb, avait perdu 14 terrains avant que l'actuel bureau ne prenne les choses en main. Depuis qu'on est là, ce sont quatre nouveaux terrains qui profitent désormais au rugby. Nous avons aujourd'hui les championnats minimes, cadets, juniors et celui des Ecoles. Ce qui n'a jamais existé auparavant. Les chantiers de formation ont commencé. Bientôt les conséquences seront palpables».