Joint-venture maroco-tunisien Dix ans après le début du contrat de partenariat entre la société marocaine MAAP et la Société tunisienne des industries de pneumatiques Amine (STIP) pour la distribution des pneus Amine au Maroc, les deux entreprises créent la Société maroco-tunisienne des pneus Amine (SMTP). La création de ce joint-venture intervient à un moment où les Marocains sont débiteurs d'une dette importante envers les Tunisiens. En démissionnant en 1985 de Good Year sur un coup tête, avant de lancer en juillet 1986, sa propre société de distribution de produits pneumatiques, Khalid Moumni, président directeur général de MAAP (Meknès pneumatique automobile assistance), était certainement loin d'imaginer que son aventure le mènerait à la tête de l'une des plus grandes entreprises de distribution de produits pneumatiques du Royaume. Il était aussi loin d'imaginer que son aventure allait être intimement liée à celle de la Société tunisienne des industries de pneumatiques (STIP), propriétaire de la marque “Amine”. “ J'ai connu la STIP par le truchement d'une usine tunisienne de production de batteries avec laquelle je devais conclure un partenariat. C'était lors d'un match de football Maroc-Tunisie”, raconte le patron de MAAP qui est aujourd'hui plus connu au Maroc sous le nom de “pneus Amine”. Le premier contact n'a pas permis de produire quelque chose de concret. L'intermédiaire n'était pas là pour faciliter les choses puisque son intervention rendait les prix moins intéressants. Mais tout cela était loin de décourager Khalid Moumni qui, une année après sa première tentative infructueuse, est revenu à la charge pour tenter de conclure un partenariat direct. Cette fois-ci fut la bonne. Le premier container chargé de pneus Amine accosta au port de Casablanca en juin 1992. “Nous avons commencé à travailler timidement”, confie-t-il. Pourtant, cela n'a pas empêché le patron de MAAP de repartir en Tunisie, l'année d'après, quand il a appris que la STIP livrait aussi à une société marocaine de la place, concessionnaire de Pirelli au Maroc, Sodipi. Pour rappel, ce spécialiste italien de pneumatiques est actionnaire à hauteur d'environ 10 % dans le capital de la STIP. “J'ai demandé à être le seul et unique représentant de Amine sur le territoire national. Au début, ils ont refusé ma requête. Finalement, j'ai été assez convaincant et on a signé un contrat dans lequel on m'a accordé cette préférence à condition que je réalise un certain niveau de ventes. Je dis bien cette préférence et non pas une exclusivité”, raconte-t-il. Depuis, la société MAAP s'en sort bien. “Je me suis impliqué corps et âme avec cette marque que j'ai aimée et développée et qui m'a donné toutes les satisfactions en tant qu'homme d'affaires”, tient-il à rappeler. Mais comme dans la vie d'un homme, les entreprises ont également leur période de gloire ou de réussite mais aussi leur période sombre. La société MAAP va connaître, ces dernières années, les moments les plus difficiles de son existence. Elle va connaître des problèmes de trésorerie et n'arrive pas à honorer ses engagements financiers envers la STIP. “Le marché national de pneumatiques avait commencé à connaître des problèmes. Ce malaise a affecté tout le monde et nous aussi. Il est vrai également que nous avons commis des bêtises dans notre gestion. On a alors perdu beaucoup d'argent jusqu'à nous retrouver en difficulté de paiement”, justifie Khalid Moumni. Pourtant aujourd'hui, c'est dans cet environnement que les sociétés marocaine et tunisienne s'apprêtent à lancer une nouvelle société qui sera opérationnelle au courant du premier trimestre 2003. Dénommé société maroco-tunisienne des pneus Amine (SMTP), ce joint-venture au capital de 55 millions de dirhams entièrement libérés (comme aime à le rappeler M. Moumni) est détenu à hauteur de 35 % par la société MAAP et les 65 % restants à la STIP. Quant à la société MAAP qui appartient à 100 % à la famille Moumni, elle va continuer à exister et sera une entité indépendante dans ses activités autres que les pneus Amine (Semperit, Roadtone, Nankang, Advance, batteries Power et Koba…). Selon le patron de MAAP, la marque Amine va être distribuée par le réseau de la SMTP, le réseau actuel de MAAP, certaines agences qui n'appartenaient pas à MAAP mais qui faisaient partie de la famille. Au total, c'est un réseau constitué de 15 points de ventes que va exploiter la SMTP pour distribuer les pneus Amine dans le Royaume. “Nous avons profité certes de l'ancien réseau de General Tire. On a également récupéré certains agents qui étaient les nôtres mais qui étaient partis chez General Tire. Je crois que c'est quelque peu logique, tout le monde a profité de l'ancien réseau General Tire, il n'y a pas que le pneu Amine”, lance-t-il. Sur le terrain, MAAP restera avec les cartes qu'elle distribuait avant ainsi que de nouvelles. Elle les importera et les fera distribuer par la SMTP qui n'a qu'un seul fournisseur direct qui est la STIP. L'endettement de MAAP vis-à-vis de la STIP aurait-il pesé lourd dans la décision des Tunisiens à s'engager dans cette nouvelle aventure ? En tout cas, Khalid Moumni est catégorique : “ce n'est pas ce qui a poussé ou obligé la STIP à s'engager avec nous à nouveau à travers un joint-venture. Notre proposition pour une telle entreprise est antérieure à nos problèmes de trésorerie”. Selon lui, c'est le marché marocain qui les a convaincus et aussi ce que la société MAAP a fait sur le plan marketing. Est-ce alors la situation de General Tire qui a fait pencher la balance dans le sens du désir des Marocains d'affronter le marché à deux ? “Non. L'idée et les négociations ont bien commencé avant la fermeture de General Tire. C'est une opportunité parmi d'autres. C'est vrai que c'était une aubaine que General Tire s'en aille mais ça n'a pas été fait juste après que General Tire soit partie. Il y a eu des problèmes de paiement mais ce n'est pas la seule motivation qui a poussé la STIP à se mettre avec nous”, répondit-il. Pourquoi ne pas se lancer avec la STIP pour la reprise de General Tire ? Pour Khalid Moumni, qui répond d'emblée n'être pas intéressé par General Tire, Continental n'aurait pas abandonné l'usine de pneumatiques si elle était performante. “C'est une vieille usine, je la respecte. Je ne pense pas qu'avec sa machinerie actuelle elle puisse suivre la mondialisation. Celui qui l'achèterait devra tout retaper ou au moins à 80 %. C'est très coûteux. De plus, le marché marocain n'est pas prêt à supporter deux usines”, souligne-t-il. Pour l'heure, le patron de MAAP est optimiste aussi bien pour la STMP que MAAP. “Avec nos amis tunisiens, nous n'allons pas commettre les mêmes erreurs du passé. Nous sommes devant un très bel avenir pour la distribution de notre produit parce que le réseau qui va s'agrandir certainement avec la force financière dont nous allons disposer”, explique-t-il. Quant à l'ancienne société, même si elle a perdu beaucoup d'argent, il lui en reste à recouvrir et à ce niveau, le forcing qu'elle a initié continue de porter ses fruits, dit-il. Bio-express Ancien cadre de Good Year pendant neuf ans, Khalid Moumni a beaucoup appris dans cette unité industrielle. Il confie avoir même beaucoup appris dans la communication lors de son passage à Good Year. “Mon Harvard à moi, c'est Good Year”, aime-t-il à rappeler. Il n'empêche qu'il va quitter la boite en 1985 sur un coup de tête. Son désaccord avec un nouveau management de l'époque dont il n'était aucunement convaincu de son efficacité était à l'origine de sa démission. Avec 100.000 dirhams comme capital social, il a créé le 1er juillet 1986 à Meknès la société MAAP qui a démarré avec un seul point de vente. Dix années plus tard, la société se retrouve avec un capital libéré de plus de 15 MDH et un chiffre d'affaires de près de 120 MDH. “Je ne suis pas un universitaire. J'ai commencé ma carrière professionnelle plus bas que zéro. Je n'ai jamais eu de complexe, je suis un homme de défi qui adore le défi, qui adore le leadership, qui aime la quête de l'excellence. J'ai formé des jeunes qui ont l'amour de cette profession”, se plait-il à dire. Les deux unités de la STIP C'est l'ancienne usine de l'Américain Firestone (spécialisée dans les pneus conventionnels), sise à Menzel Bourguiba, et qui connaissait quelques difficultés sur le marché local que l'Etat tunisien a fait racheter par la STIP . Ce dernier qui l'a reprise grâce à un tour de table formé par la STIP, Pirelli International, un pool bancaire tunisien, la banque islamique de développement ainsi que quelques particuliers, lui a donné son nom. C'était en 1980. Aujourd'hui, la STIP dispose d'une deuxième unité de production (située à Msaken) suite à son acquisition de la société “SONAP” en 1991(spécialisée dans les pneus de type radial de voitures de tourisme et de poids lourds).