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Francophonie : Le Français se meurt au Maghreb
Publié dans La Gazette du Maroc le 07 - 03 - 2008

La réalité quotidienne du Franco-Français « dans tous ses états», ce sont les restrictions de budgets du SCAC et des Instituts français au Maroc. Mais de combien ? Secret d'Etat ! A titre de comparaison -et rapportée à la population- la seule région Wallonie-Bruxelles finance davantage de projets culturels que la France… Cherchez l'erreur !
Malgré toute une débauche de moyens organisationnels, le Français perd du terrain et les statistiques qui ne prennent en compte que les déclarations officielles ont bien du mal à appréhender la réalité du terrain comme la décrivait cet éditeur tunisien présent au SIEL de Casabalnca, lors de la table ronde autour de la francophonie. Il regrettait qu'au Maghreb, le français se meurt et qu'il n'y ait pas davantage d'actions entreprises pour favoriser l'apprentissage du français dès le plus jeune âge afin de créer les lecteurs de demain. Hélas dans ce débat, comme dans tous les débats autour de la francophonie les grands mots sont aussi définitifs que ridicules : «La régression du français est un enjeu civilisationnel»! Comme si le Français avait mission d'être la civilisation à lui seul. Dans ce même débat, madame l'Ambassadeur du Canada au Maroc racontait son Français à elle, québecquoise… Elle nous a heureusement épargné le couplet habituel des Québecquois qui prétendent parler le «vrai françois» : langue immobilisée au 17ème siècle dans les glaces du Saint-laurent et mâtinée depuis d'anglicismes francisés littéralement. Mais bon !
Francophonie : combien de divisions ?
Selon un rapport publié par l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), intitulé «La francophonie dans le monde en 2006-2007», publié le 14 mars 2007, peu avant la Journée internationale de la francophonie du 20 mars; on constate une augmentation du nombre de francophones (estimé à 175 millions dans le rapport précédent) dûe à l'augmentation du nombre de personnes étudiant le français, à la prise en compte de nouveaux pays membres de l'OIF et à l'accroissement de la population de l'Afrique subsaharienne, notamment au Tchad et au Togo. On estime aujourd'hui que les francophones se répartissent en Europe, en Afrique subsaharienne et en Afrique du Nord dans les proportions respectives de 42%, 39% et 11%.
Nous sommes donc environ 300 millions dans le monde à utiliser le Français. Le Français est la deuxième langue enseignée dans le monde et la troisième utilisée sur Internet. C'est en outre la 9e langue la plus pratiquée dans le monde. La communauté francophone est présente sur tous les continents, la francophonie est sans doute le seul lien qui réunit tous nos lecteurs…
Combien ça coûte ?
Il est difficile pour le citoyen ordinaire de trouver des renseignements précis sur le coût de l'OIF (Organisation internationale de la Francophonie) et sur la contribution des pays membres. Nous remercions à l'avance quiconque voudra bien nous indiquer des sources officielles, complètes et précises.
Un tableau de l'Atlas mondial de francophonie, paru en 2006 aux éditions Autrement, donne le pourcentage des contributions volontaires : France 40%, Canada, 27,6%, Belgique, 10,7%, Suisse, 8,4 %, autres 13,3%. Mais ni le total du budget, ni l'année en cause ne sont indiqués. Et en quoi ces contributions volontaires consistent-elles? Faut-il supposer qu'il existe aussi des contributions statutaires ? L'imposant rapport annuel 2004-2005 du Haut Conseil de la Francophonie, paru chez Larousse, ne nous en apprend pas davantage.
Et sur Internet ? Sans doute les données que nous cherchons s'y trouvent-elles. Nous constatons toutefois qu'il est anormalement difficile de les trouver. Le site de la Présidence de la République française nous met sur une bonne piste :
«Le financement de la Francophonie est assuré par les contributions statutaires des Etats, ainsi que par des contributions volontaires, transitant par le Fonds multilatéral unique (FMU) et dédiées aux programmes de coopération de l'OIF, de l'Agence universitaire, de l'Association des maires francophones, de l'Université Senghor d'Alexandrie et de TV5 Afrique.
Le montant des contributions statutaires appelées en 2005 s'élevait à 28,53 M€, et les versements se sont montés à 27,26 M€. La contribution française était fixée à 11,47 M€, soit 40,21% du total.
S'agissant des contributions volontaires, seuls quinze Etats contribuent au FMU. La France demeure le premier contributeur. Le reste provient du Canada (plus le Québec et le Nouveau Brunswick), de la Communauté française de Belgique et de la Suisse.
Ce que finance la francophonie au Maroc dans les jours qui viennent :
• Concours de dictée le 23 mars 2008
Marrakech - Faculté des Sciences et Techniques, Av El Khattabi - Semaine de la langue française du 14 au 24 mars sous le thème «les mots de la rencontre».
• Printemps des poètes du 3 au 16 mars sous le thème «l'éloge de l'autre», rencontre autour de René Char et Mohammed Khaïr Eddine.
• Journée de la francophonie au Maroc : le 28 mars à Rabat avec un concours du meilleur journal scolaire et cette année le slam comme patrimoine international oral : créativité, libre expression et interprétation.
• Le Français dans tous ses états (4e édition) du 7 avril au 24 mai sur tout le Maroc avec la participation des 13 instituts et alliances français, d'établissements scolaires français et marocains et d'universités.
Universel, universalité, universalisme, ces mots reviennent constamment dans les discours des admirateurs de la langue et de la culture françaises mais aussi dans ceux des fondateurs et des promoteurs de la Francophonie; leur sens n'est toutefois pas le même dans un cas et dans l'autre, il en résulte une confusion qui nuit à la compréhension de l'idéal de Senghor: la civilisation de l'universel.
Universel, universalité, universalisme
Le jour et la nuit sont universels, ils sont de tous les lieux et de tous les temps. Sur ce plan des faits, tout est clair : ni la langue ni la culture française ne sont universelles. Il suffit d'explorer les dimensions culturelles, mais aussi politiques et affectives de la francophonie pour s'apercevoir des différences sans parler des accents de chacun et de la pratique pour le moins contrastée d'un français riche de sa multiplicité.
Etudiants francophones étrangers en France
Sur les 237.000 étudiants étrangers en France, 76.273 proviennent des Etats arabes et 41.430 de l'Afrique sub-saharienne. (source : Sénat français)
Selon une récente étude du Sénat français, la part relative de la France dans l'accueil des étudiants étrangers a baissé. «Notre pays a pris conscience, dans les années 1997-1998, de la lente érosion du nombre d'étudiants étrangers accueillis en France, au cours de la décennie précédente. Il était tombé à 150.000. Le gouvernement de Lionel Jospin a alors mis en place une politique d'accueil active qui a permis de relever ce nombre à près de 250 000 par an, niveau à peine supérieur à celui de 1985. La France a donc restauré sa capacité d'accueil d'étudiants étrangers mais, comme la mobilité étudiante internationale s'est beaucoup développée au cours de ces vingt années, la part relative de la France a baissé. Notre pays n'accueille que 9 % des étudiants faisant leurs études supérieures en dehors de leur pays, ce qui le place loin derrière les Etats-Unis (30 %) mais également derrière le Royaume-Uni (14 %), l'Allemagne
(12 %) et depuis peu derrière l'Australie (10 %).»
En 2008, malgré les discours officiels, aucune statistique officielle française n'est venue corriger, si besoin, la tendance à la baisse décrite en 2005…
A Casablanca, le service qui délivre les visas étudiants « ne tient pas de statistiques des refus»… Quant aux visa attribués « les chiffres ne sont pas publics». On peut pourtant parier, à entendre les déboutés du droit d'étudier, que les chiffres sont en baisse constante… pour les étudiants de la classe moyenne qui ne bénéficient pas des mêmes attentions consulaires que les enfants des très riches pour lesquels compte davantage le niveau du compte en banque que le niveau universitaire.
Cas d'exemple
Fatima Zahra Chaouki, élève de 4ème année d'une école supérieure spécialisée en biotechnologie, demande son visa étudiant pour l'Ecole Nationale Supérieure de Biologie Appliquée à la Nutrition et à l'Alimentation de Dijon. Elle y a été acceptée après un entretien téléphonique de 45 minutes avec un jury spécial de trois professeurs réunis en téléconférence pour l'occasion. On attend avec impatience une étudiante aussi brillante qui intègrera donc directement la deuxième année du Master. Côté français, l'ENSBANA fait toutes les démarches exigées par le Consulat pour faciliter l'obtention du fameux visa. Côté marocain, la famille, l'école, les professeurs de Fatima se mobilisent. Enfin le dossier est prêt. Réponse négative. Avec la précision : «maîtrise de l'immigration». Si cette jeune personne ne revient pas au Maroc. Tant mieux pour la France qui aura gagné une grosse tête à moindre coût. Si elle revient, elle sera forcément une «cliente» de la France. Dans tous les cas de figures la France serait gagnante… si elle n'était pas aussi ...!


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