Maroc-Etats-Unis-Europe Le Maroc et l'Union européenne d'une part, le Maroc et les Etats-Unis d'autre part, le libre-échange est en train de se tisser avec des entités d'envergure. Depuis quelques temps, les Etats-Unis affichent une farouche détermination à conclure cet accord. S'agit-il d'une contre-attaque ou est-on en face d'une nécessité stratégique? A tous les coups, le Maroc sortira gagnant. Contre-attaquant l'accord d'association qui se construit entre le Maroc et l'UE, l'American chamber of commerce in Morocco(Amcham) apporte des arguments quant à la nécessité de développer les échanges entre le Maroc et les USA. De même, la Chambre n'a pas manqué de faire l'éloge de la complémentarité de deux accords pour le Royaume. Dans une note adressée le 22 novembre dernier au représentant américain pour les négociations de l'accord de libre-échange entre les Etats-Unis et le Maroc, l'Amcham livrerait un véritable plan de contre-attaque à l'accord d'association Union européenne- Maroc. Pour plus de clarté, nous sommes allés poser quelques questions à ce sujet à l'executive director de l'Amcham, Carl Dawson. Ce dernier estime que le futur accord de libre-échange maroco-américain est complémentaire de l'accord d'association qui est en train de se construire entre le Royaume et l'UE. Pour lui, les deux accords ouvriront de nouveaux marchés et de nouveaux débouchés à l'entreprise marocaine et susciteront, in fine, des améliorations dans l'environnement marocain. À cet égard, quand on se place dans la situation d'un pays en voie de développement, on se rend compte que ce genre d'accord est profitable doublement pour un pays comme le Maroc. En tout cas, les études empiriques des experts de la Banque mondiale abondent dans ce sens. En premier lieu, pour ses macroéconomistes, quand les droits de douane sont abaissés, les prix relatifs changent et les ressources sont redéployées en faveur d'activités de production qui augmentent le revenu national. En deuxième lieu, des avantages durables se dégagent à mesure que les économies s'adaptent à l'innovation technologique, aux nouvelles structures de production et à l'évolution des mécanismes de la concurrence. À ce niveau, Carl Dawson déclare: “chaque partenaire apporte sa contribution à un accord de libre-échange donné selon son profil économique”. Les relations économiques fortes, continue-t-il, qui lient le Maroc à l'UE depuis longtemps constituent un atout indéniable des deux côtés. Mais, tient-il à préciser, la taille du marché américain et le niveau relativement modeste des échanges maroco-américains actuels démontrent clairement l'énorme potentiel de croissance dont recèle le commerce bilatéral. Une chance pour l'entreprise Que peut apporter le libre-échange avec les Etats-Unis d'Amérique à l'économie marocaine et, à terme, à l'entreprise? À cette question, le directeur général de l'Amcham répond que d'un côté, le libre-échange avec son pays est synonyme de croissance économique et de création d'emplois, grâce à l'élargissement des marchés extérieurs du Maroc et donc de ses exportations. D'un autre côté, c'est un facteur de renforcement des investissements d'outre-Atlantique au Maroc ainsi que de transferts de technologie qui en découlent. À ce stade, le plus grand bénéficiaire est incontestablement l'entreprise. Puisque selon les études de la Banque mondiale sur la Côte d'ivoire, la Turquie et l'Inde (trois pays ayant à peu près le même développement économique que le Maroc), il a été démontré que la hausse des importations imposait une certaine discipline aux entreprises locales, qui ont dû rapprocher leurs prix des coûts marginaux, réduisant ainsi les distorsions créées par le pouvoir des monopoles. De plus, la libéralisation des échanges peut accroître de façon permanente la productivité d'une entreprise, à mesure qu'elle accède à des biens d'équipement et à des moyens de production intermédiaires de haute qualité et à moindre prix. Enfin, les entreprises sont plus productives quand elles sont confrontées à l'exigence des clients internationaux et aux “pratiques optimales” de concurrents étrangers. Pour le Maroc, cet accord induira plusieurs conséquences en plus de celles que l'executive director de l'Amcham a évoquées. En effet, cet accord de libre-échange est une contrainte en termes de discipline dans la gouvernance, mais également d'effort à faire dans la qualité. On voit de plus en plus d'entreprises recourir à la certification pour aligner leurs productions aux normes internationales. Avec l'accord de libre-échange, cette tendance n'en sera que plus renforcée. Il faudra s'aligner sur les normes internationales de qualité afin de profiter de la manne considérable que constitueront les donneurs d'ordres américains. Par ailleurs, les répercussions sur l'économie marocaine se feront également sentir dans le domaine crucial de l'investissement. Cette supposition est sans doute motivée par un constat effectué à travers les accords de libre-échange précédemment signés entre les Etats-Unis et d'autres pays. Pour le cas de figure, c'est l'ALE avec la Jordanie dont il s'agit. En effet, une fois cet accord signé, les investissements américains sont passés du simple au décuple. Des entreprises notamment du secteur informatique se sont fortement implantées en Jordanie. Le Maroc en devenant le quatrième pays (après le Canada, le Mexique et la Jordanie) à être lié par un accord de libre-échange avec les Etats-Unis, est promis forcément à un bel avenir. Cependant, à l'image de l'accord d'association avec l'UE, les barrières douanières devront être levées progressivement. L'une après l'autre, elles tomberont pour laisser la voie libre au commerce. Il est clair que d'un côté comme de l'autre, le Maroc en sortira gagnant, mais pour les Etats-Unis c'est également une manière comme une autre de se rapprocher davantage du continent africain, comme de l'ancien monde d'ailleurs. Mais quel traitement devra être réservé aux produits américains qui transiteront par le Maroc et qui devront aller vers l'Union Européenne? Les Européens devront aussi réfléchir sur le traitement qui sera réservé à leurs produits, transitant vers le Maroc et destinés aux Etats-Unis. Est-ce la clause de la nation la plus favorisée, prévue par les accords de l'OMC qui devra s'appliquer dans les deux cas? Rien n'est mois sûr. Et dans ce cas plus que dans tout autre, le Maroc en sortira gagnant. En effet, les entreprises de l'un comme de l'autre seront contraintes à une délocalisation physique et à un transfert de technologie afin de bénéficier des deux accords. Tout ira alors pour le mieux.