Paradoxalement, dans le pays qui est le berceau de la race Barbe, ce merveilleux cheval voit ses effectifs se réduire dangereusement. Fort heureusement, le haras de Meknès demeure le dernier bastion de cette race ancestrale. Créé entre 1914 et 1920 et utilisé en tant qu'établissement de remonte militaire jusqu'en 1947, le Haras Régional de Méknès est l'une des cinq administrations du genre qui, sous la tutelle de la direction de l'Elevage relevant du Ministère de l'Agriculture, encadrent l'élevage du cheval au Maroc et œuvrent pour sa promotion : - le pur sang arabe pour l'endurance et les concours de présentation; - le barbe arabe pour l'endurance et la fantasia; - le barbe pour la fantasia. Le siège du Haras est entouré de hauts remparts datant du règne du Sultan Moulay Ismail. Il dispose également d'une trentaine de stations de monte, éparpillées dans toute la circonscription hippique de Meknes environ 30 Km à la ronde de la ville. Ces stations accueillent les poulinières au cours de la saison de monte du 15 février au 15 juin et permettent des actions d'amélioration au sein du cheptel chevalin. Quelques chiffres 77 ha, environ 270 animaux dont 150 étalons, une trentaine de juments (10 juments arabes, 12 barbes et 7 barbes-arabes) et autrefois 50 baudets (une dizaine aujourd'hui) et 9 écuries, dont une jumenterie réservée aux poulinières en production. Missions • Amélioration génétique Par le biais des stations de monte qui en relèvent, le Haras régional de Meknès met à la disposition des éleveurs des étalons améliorateurs. La monte est gratuite et conduite par des techniciens spécialisés. • Encadrement administratif de l'élevage équin Plusieurs opérations gratuites sont entreprises par le haras et permettent d'établir pour l'ensemble des poulains de la circonscription : la déclaration de naissance, la confection de signalement, le contrôle de la filiation, la délivrance au profit des propriétaires de livrets d'accompagnement complet. • Octroi des primes d'encouragement Avec le concours des services centraux et des sociétés régionales des courses hippiques, le Haras organise des concours régionaux à Fès, Khénifra, Mèknes, Khémisset, et locaux comme le festival de Tissa. Des primes sont octroyées aux éleveurs à l'occasion de ces concours où l'élevage et l'équitation traditionnels occupent une place de choix. Portrait Driss Karra a 30 ans de métier au haras. Infirmier vétérinaire, il prend sa retraite à la fin de cette année. Inlassablement, il présente les étalons qu'il connaît tous par leurs petits noms, et se fait photographier volontiers… Inquiet par l'ignorance des jeunes Marocains sur le patrimoine chevalin du royaume, il rappelle que parmi les quelques touristes qui s'extasient devant les salles des écuries, bien peu sont marocains ! Moulay Ismaïl et les chevaux On a tout dit sur ce sultan : oublié le souvenir des cruautés et de la violence de Moulay Ismaïl. Reste Meknès sa splendide capitale impériale dont le monument le plus remarquable demeure le sarij Es Souani, ou grenier à grain. Ces immenses silos souterrains abritaient les fourrages et les céréales destinés d'abord à l'imposante cavalerie chérifienne et ensuite aux habitants de la ville… Une série de citernes complète les greniers. Le bassin de l'Agdal, construit sur l'ordre de Moulay Ismaïl était destiné à arroser les jardins et à accueillir chaque matin le bain des 12 000 chevaux du souverain. (Il avait aussi une fonction de défense de Meknès en cas de siège des tribus berbères.) Pour loger sa cavalerie, Mouly Ismaïl fit construire la Roua, l'Ecurie, autre exemple de démesure. Cette salle immense, aux vingt-trois nefs et aux centaines de piliers, pouvait accueillir les 12?000 chevaux. Les palefreniers, maréchaux-ferrants et vétérinaires, que nécessitait leur entretien, étaient logés non loin. Les équipements étaient conservés dans une sellerie voûtée proche d'une grande pièce octogonale dont on admirera la coupole. Quand Moulay Ismaïl demanda la main de la fille du roi de France, il fit cadeau à Louis XIV de superbes étalons barbes.