Dans la foulée de la visite d'Etat de Nicolas Sarkozy, le ministère de l'Equipement et du Transport et l'ONCF s'affairent à…grande vitesse pour dévoiler les tenants et les aboutissants du projet du siècle dans les annales du transport ferroviaire marocain. Horizon. Le chantier des travaux démarre en 2009 et les premières sections de LGV (ligne à grande vitesse) seront opérationnelles au plus tard en 2015. Les grandes manœuvres sont lancées et pas seulement depuis la signature des contrats TGV à l'occasion de la récente visite d'Etat de Nicolas Sarkozy au Maroc qui est un aboutissement des efforts déployés auparavant. Plus précisément, les premières études de faisabilité ont été établies en 2003-2004 et le schéma directeur de ligne à grande vitesse (SDGV) finalisé en 2005-2006. Un SDGV qui s'étend sur 1500 kilomètres de réseau ferroviaire à grande vitesse en site propre se partageant la géographie territoriale en deux LGV principales capables de voir circuler des TGV à 300-320 km/h. Une ligne «Atlantique» reliant Tanger à Agadir via Kénitra, Rabat, Casablanca et Marrakech, et une ligne «Maghrébine» rapprochant considérablement la capitale Rabat de celle de l'Oriental, Oujda via Meknès et Fès. C'est sous le slogan de «L'ONCF à l'heure du TGV» que les détails d'un projet structurant ont été révélés, le mardi 27 novembre à Casablanca, par le duo pilotant ce projet du siècle, le ministre «Monsieur Infrastructures», Karim Ghellab et le Directeur Général de l'Office, Mohamed Rabie Khlie. «Plus qu'une solution appropriée face à une demande accrue de besoins de mobilité et de transport, la grande vitesse au Maroc s'impose pour augmenter la capacité du réseau, faire face à la saturation à terme des lignes existantes, répondre à la progression exponentielle du trafic et offrir aux clients un produit plus compétitif», a expliqué d'emblée le ministre istiqlalien. En écho, le patron du chemin de fer a insisté sur «une opportunité pour accompagner le développement du pays, faire face à une mobilité croissante, être en phase avec les grands projets nationaux et, en dernier lieu, se mettre au service des ambitions du secteur touristique». Et Ghellab de souligner : «Il n'y a pas d'autre choix que celui du TGV pour que le chemin de fer marocain ne soit pas engagé dans l'impasse». Au motif que le TGV est véritablement un outil performant pour promouvoir le développement durable, favoriser le désenclavement géographique, aménager le territoire national et faciliter l'intégration internationale en encourageant les échanges Europe-Afrique. Surtout dans le cadre du méga projet de liaison fixe sous le détroit de Gibraltar, l'option de la grande vitesse ferroviaire dans le Vieux continent et le corridor maghrébin. Les deux sections prioritaires à l'horizon 2015 intéressent une longueur de voies ferrées à grande vitesse totalisant 370 Km dont 200 Km Tanger-Kénitra mobilisant 20 milliards de DH et 170 Km Settat-Marrakech. De son côté, Mohamed Rabie Khlie a donné un aperçu sur l'état d'avancement de l'exécution du contrat-programme Etat-ONCF mobilisant 17,2 milliards de DH, presque autant que la totalité des investissements réalisés par l'entreprise ferroviaire durant les 20 dernières années. Le manager cheminot a indiqué que 85% de ce montant sont engagés à ce jour et que les travaux ont démarré, tandis que les réalisations physiques des projets programmés ont atteint un niveau d'avancement estimé à 60%. Sur la vingtaine de nouvelles rames automotrices à double niveau, une dizaine sont en circulation sur l'axe Casa-Kénitra et Casa-Fès. Ces réalisations, en termes d'extension de lignes, de doublement et de mise à niveau des lignes existantes, permettront, dès 2008-2009, d'accroître considérablement l'offre de transport par le passage de 154 trains en circulation à 250 trains chaque jour. Ces mutations radicales pour le passage d'un réseau ferroviaire classique à une infrastructure à grande vitesse s'accompagneront de tout un chamboulement en matière de formations réadaptées, d'émergence de nouveaux métiers et de méthodes de travail et de gestion. C'est ce qu'a laissé nettement, entendre Rabie Khlie, en assurant que «Nous allons profondément changer notre management et notre organisation... Nous allons révolutionner nos manières de faire». 3Questions à Karim Ghellab «Si on ne fait rien, le Chemin de fer sera dans l'impasse» La Gazette du Maroc : Le choix du TGV au Maroc est-il un luxe ou une nécessité ? Karim Ghellab : C'est totalement faux de prétendre que le TGV au Maroc est un luxe. Inversons la donne : Si on ne le faisait pas, que se passerait-il ? Tout simplement, le chemin de fer marocain sera dans l'impasse. Alors que c'est le système de transport de masse le plus efficace pour l'acheminement des passagers et les flux de marchandises. Vouloir continuer, aujourd'hui, dans le système classique, c'est être complètement déconnecté de la réalité. Aussi, un projet qui procure une rentabilité de plus de 8%, c'est toute l'économie et le pays qui y gagnent. Ce projet TGV s'inscrit dans la politique des grands chantiers dans le cadre d'une vision d'ensemble pour hisser le Maroc dont ils représentent une locomotive de développement. C'est, encore, une interface entre les transports ferroviaires modernes et les nouveaux systèmes de déplacements urbains de haut niveau, à l'instar du tramway, métro, RER et autres. En fait, nous avons fait le choix de ce qui se fait de mieux dans les nouvelles technologies de l'industrie mondiale du transport ferroviaire, une option parfaitement à la portée du Maroc… Pourquoi, alors, chercher à priver le Marocain de ces atouts d'une vie meilleure ? Outre les financements classiques, budget d'Etat, Fonds Hassan II, crédits bancaires…, est-ce que des opérateurs privés seraient intéressés comme futurs gestionnaires d'infrastructures, compte-tenu de la libéralisation en cours du secteur ferroviaire marocain ? Dans tous les cas de figure, la participation du secteur privé, ne pourrait qu'être faible et limitée. Avec ce type de projet, nous nous trouvons dans des logiques d'engagements publiques. Mais on peut le faire en développant la capacité des projets à engendrer à générer des recettes servant, à leur tour, au financement d'autres projets. Et qu'en sera-t-il des infrastructures d'accompagnement du tracé TGV dans le Royaume ? Déjà à la vitesse de 160 km/H, les passages à niveau ne sont plus permis sur les lignes ferrées. A fortiori pour des TGV circulant à 300 km/h avec des lignes en site propre qui seront totalement clôturées sur toute la longueur de la nouvelle voie ferrée. À cela s'ajoute un système de détection automatique pour toute intrusion déclenchant le freinage du TGV qui en aurait reçu le signal. En plus, nous menons des études d'impact sur l'environnement selon les critères requis aux normes les plus strictes. Enfin, plus la vitesse des trains augmente, et plus aussi le référentiel de sécurité des circulations ferroviaires se renforce.