Tous les pays de la région du Moyen-orient, plus particulièrement ceux du Golfe, vivent actuellement dans le climat d'une guerre inévitable. Les raisons qui privilégient cette thèse sont si nombreuses que les constats optimistes émanant de certains responsables et analystes politiques deviennent inconcevables. Un bruit de bottes est déjà entendu. Reste à savoir maintenant si c'est demain ou avant la fin du mandat de George Bush. Dans tous les «Diwaniates» des responsables politiques et hommes d'affaires de l'émirat d'Abou Dhabi, deux sujets constituent le cœur des discussions : l'éventuelle frappe par les Etats-Unis de l'Iran et les plongées des indices des bourses de la région. Cependant, le premier sujet constitue la principale obsession de l'assistance. Alors que les apolitiques «prient» pour une frappe militaire contre le régime iranien qui tente de se doter de l'arme nucléaire, et, par là, menacer tous les Etats du Golfe, les plus avisés de cette assistance craignent le pire avec le déclenchement d'une telle guerre. «Nous savons que l'Iran représente un danger permanent pour nous et occupe, depuis le temps du Chah nos trois îles, cependant, son attaque serait une catastrophe», souligne cheikh Abdallah ben Zayed AL-Nahyane, chef de la diplomatie des Emirats Arabes Unis. Et ce dernier d'ajouter : «Si cette guerre explose, personne ne sait où elle s'arrêtera». De retour de Washington, un des conseillers du chef de l'Etat des Emirats Unis, Cheikh Khalifa ben Zayed Al-Nahyane, indique que les plans de la frappe de l'Irak sont, depuis des mois, sur les bureaux du président Gorge Bush et de son adjoint, Dick Cheney. Ce dernier qui affirme à tous les responsables arabes «amis» qu'il rencontre dans la capitale américaine, que la seule solution avec le régime des mollahs en Iran, c'est de le remettre à sa place. A Abou Dhabi, comme au Koweit et en Arabie Saoudite, il y a un sentiment que les parties concernées par le bras de fer iront directement à la confrontation militaire. «Rien ne pourra l'empêcher, surtout qu'aucun des Etats impliqués dans ce conflit n'est prêt à la moindre concession», avait déjà dit récemment à Paris, le prince, Saoud al-Fayçal, ministre saoudien des Affaires étrangères. Ce qui rend la situation de plus en plus complexe, et les chances de trouver les issues plus minimes. Ce diplomate chevronné, très objectif dans ses analyses, laisse entendre que la frappe américaine pourrait se concrétiser à partir de 2008, c'est-à-dire, avant la fin du mandat de George Bush. Ainsi, la nouvelle administration héritera d'un fait accompli qu'elle doit vivre avec ses conséquences pour un certain temps. Pour Dick Cheney, les ingrédients sont là, les alibis aussi. Ceci-étant, les Etats-Unis ne permettront pas à l'Iran de posséder l'arme nucléaire. De plus, force est de savoir que le Président de la première puissance mondiale est le chef suprême de toutes les armées américaines. Ses responsabilités sont nombreuses et diverses. De ce fait, le congrès ainsi que l'opinion publique, trouveront une grande difficulté pour contrecarrer ses initiatives dans le court terme. A cet égard, le même Saoud al-Fayçal, tient à préciser que les critiques et les contestations envers les décisions prises par Bush durant la dernière année de son mandat, seront sans importance. De ce fait, il agit en conséquence de cette réalité, en attendant l'entrée dans 2008 pour agir et frapper l'Iran. Parallèlement, il y a un autre courant qui estime que Bush ne frappera pas les sites nucléaires iraniens, car ses troupes sont occupées en Irak et en Afghanistan. L'opération contre l'Iran le contraindra à faire intervenir les forces de réserve, à savoir aérienne et navale. Ces dernières pourraient détruire ses sites. Mais la guerre ne pourra être gagnée qu'avec la participation des forces terrestres. L'Amérique ne possède pas la réserve stratégique de ces forces. Et ce serait un risque de jouer cette carte En dépit de ces constatations, les élites dans les pays du Golfe sont affirmatives, quant au recours de George Bush à la frappe militaire, certaines d'entre elles vont jusqu'à répéter qu'elles ont entendu des propos allant dans ce sens, de la bouche de Condoleeza Rice, lors de sa dernière visite à Abou Dhabi. Ils affirment même que le Président français, Nicolas Sarkozy, a laisssé entendre devant son invité d'honneur, lors des festivités du 14 juillet, le chef d'Etat du Qatar, cheikh Khalifa ben Hamad Al-Thani, que Bush s'apprêtait sérieusement à frapper les sites nucléaires iraniens. Sur le plan des préparatifs pris par les gouvernements des Etats du Golfe pour faire face à cette éventuelle guerre, les responsables rencontrés préfèrent ne pas se prononcer, laissant à l'interlocuteur, tirer des conclusions. Pour l'analyste politique, Mohamed. K, les pays du Golfe ne peuvent rien faire pour empêcher les Iraniens de leur faire du mal. Et à ce dernier, de poursuivre : «Il ne faut guère oublier que leurs cellules dormantes chez nous pourraient du jour au lendemain, déstabiliser nos Etats». Les dirigeants des pays du Golfe sont conscients de cette réalité. C'est pour cette raison qu'ils ont donné leurs consignes aux responsables politiques, d'éviter de provoquer les iraniens. Avec la rentrée de septembre, on entend parler, notamment à Bruxelles, le siège de l'Union européenne ainsi que dans les couloirs du Parlement européen à Strasbourg, des turbulences que connaîtra la région du Moyen- Orient dans les prochains mois. Dans ce contexte, l'Iran est dans la ligne de mire des Etats-Unis et aussi, des Etats européens et arabes, qui craignent l'hégémonie de Téhéran, après que cette dernière aura acquis l'arme nucléaire. De ce fait, il faut s'attendre à une montée sans précédent de la tension. Surtout que les marges de manœuvres devant le président Bush sont en train de se rétrécir. Plusieurs indices privilégient les éventualités de déclenchement de la guerre dans les six prochains mois. Sauf si les autorités iraniennes font marche arrière sur le programme nucléaire et suivent le chemin de la Libye et récemment, celui de la Corée du Nord. Raisons et alibis Parmi ces indices, tout d'abord, le discours de Bush dans lequel il met Téhéran en garde contre la poursuite de son programme nucléaire. Une manière de préparer l'opinion publique américaine à la possibilité d'utiliser le nucléaire contre elle. Autre indice, la prise par le Président français de la place du britannique, Tony Blair, en tant qu'allié fidèle. Nicolas Sarkozy a annoncé devant les 188 ambassadeurs, qu'il avait rencontrés, il y a plus d'une semaine, notamment après son retour des Etats-Unis, que l'acquisition par l'Iran de l'arme nucléaire constitue une ligne rouge par rapport à la France. Troisième indice, les informations transmises par le journaliste américain, Simon Hirsh à des collègues français lors de son dernier passage à Paris, selon lesquelles il souligna que des sources à la Maison Blanche lui ont affirmé que la décision de frapper l'Iran est déjà prise. Et que le clan du vice-président, Dick chenet, a le premier et le dernier mot. Ce qui se recoupe avec les informations entendues à Abou Dhabi. Parallèlement, l'éditorialiste au New York Times, Roger Cohen indique que plusieurs responsables de l'administration Bush lui ont affirmé que la majorité des Etats sunnites de la région, y compris la Turquie, considère que l'Iran est un pays dangereux qui menace la stabilité de la région. Pis encore, elle le considère beaucoup plus dangereux qu'Israël. Dans ce cadre, Cohen a souligné que les pays du Golfe estiment que l'Etat hébreu ne constitue pas le véritable danger, mais plutôt la République islamique d'Iran. Parmi ces indices, la signature par l'Arabie Saoudite avec la société américaine, Lukheed Martin, un accord portant sur l'entraînement et l'équipement d'une unité formée de 35.000 hommes pour défendre les sites pétroliers dans la région Est du royaume. Riyad craint que l'aviation iranienne frappe la région nommée G.O.S.P à Abguigue, le nerf de l'industrie pétrolière saoudienne. Dans ce cadre, on apprend que Washington s'apprête à installer des batteries de missiles de type Patriote aussi bien en Arabie Saoudite qu'au Koweit, pour intercepter les missiles iraniens, de type Chihab. Les analystes politiques américains voient dans l'appel de Bush à l'organisation d'une conférence internationale sur la paix au Moyen-Orient en novembre prochain, la préparation du terrain à la frappe attendue. Washington vise à travers cette conférence, comme cela a été le cas lors de l'attaque de l'Irak, la couverture des pays arabes sunnites au cas où ils rentreraient conjointement avec Israel, dans une confrontation contre l'Iran, la Syrie, le Hezbollah et Hamas. Le retrait des troupes britanniques de Basra reflète une conviction britannique de l'échec essuyé en Irak. Ce désengagement ne peut que durcir la position de George Bush et l'inciter à accélérer la frappe contre l'Iran avant que les conséquences du retrait britannique, se répercutent sur les centres de décisions aux Etats-Unis. La violation par l'aviation israélienne de l'espace aérien syrien, jeudi dernier, est le premier test dans la préparation de cette guerre. Les Américains s'attendent maintenant à la réaction de la part de l'Iran et du Hezbollah pour trouver l'alibi nécessaire à la confrontation. D'ores et déjà, Washington a placé la Garde révolutionnaire iranienne sur la liste des organisations terroristes. Ce qui rappelle la concentration médiatique sur la Garde républicaine irakienne de Saddam Hussein, qui, soi-disant gérait les armes nucléaire et chimique.