Après cinq ans d'exercice parlementaire, les députées ne préfèrent toujours pas voler de leurs propres ailes, se lancer dans des circonscriptions électorales et laisser la liste nationale à de nouvelles figures. Décidément, elles se contentent du «service minimum». A quelques semaines des consultations législatives du 7 septembre 2007, quel bilan peut-on faire de l'expérience des femmes parlementaires? Une question qui se pose avec acuité, puisque l'heure de la confection des listes nationales, dans tous les partis politiques, a sonné. Avant de répondre à cette question, effectuons un bref retour en arrière, et plus exactement, lors des élections législatives de 2002. A l'époque, le gouvernement a décidé de créer le système des listes nationales. Le principe est simple. Il est question de réserver 30 sièges de la Chambre des Représentants à des parlementaires, qui seront élus, certes au suffrage universel, mais de manière indirecte. Chaque parti politique, a sa propre liste nationale. Plus il récolte de voix dans les circonscriptions, plus il gagne une partie de ces trentes sièges mis en jeu. Toutefois, d'un point de vue purement constitutionnel, rien n'oblige les formations politiques à inscrire exclusivement des femmes sur leurs listes nationales. Mais un «gentlemen agreement», une sorte d'accord politique, a été pris par l'ensemble des partis politiques, pour que les listes nationales soient exclusivement réservées aux femmes. Une initiative louable, puisqu'elle a permis au Parlement marocain, de compter au moins 30 femmes, ce qui est honorable pour un pays en voie de développement et où la femme n'occupe pas un grand espace dans la scène politique. C'est ainsi que les listes nationales ont été communément appelées «liste des femmes». Et c'est aussi de cette manière que nous avons pu avoir, à la Chambre des Représentants, des femmes vice-présidente et présidente de commission permanente. Aussi, nos femmes parlementaires à la première chambre, ont commencé à émerger. Certaines interpellent, chaque semaine, lors des séances des questions orales des ministres sur des questions essentielles, ayant traits, aux domaines politique, économique, social et même diplomatique. Les femmes parlementaires participent activement aux travaux des commissions permanentes, en discutant des projets de lois, proposant des amendements… Sur le plan de la diplomatie parlementaire, elles ont toutes représenté le Parlement marocain dans des déplacements aux quatre coins du globe. Elles ont côtoyé d'autres parlementaires, des ministres et profité des expériences de plusieurs autres femmes politiques. Une place au soleil Bref, en cinq ans, elles ont, théoriquement, pu amasser une expérience richissime, qui devrait se répercuter positivement sur leur aura, au sein de leur parti et de leurs bases. En clair, l'expérience de la liste nationale devait être un moyen «facile» d'entrer dans le monde fermé du Parlement, afin de pouvoir voler de ses propres ailes. Cinq ans plus tard, une femme parlementaire doit être capable de se lancer dans une circonscription électorale et affronter les électeurs, les yeux dans les yeux, sans aucun scrupule ou appréhension. Dans ce cas de figure, tout le monde en sortira gagnant. Les députées elles-mêmes, qui bénéficient d'une «initiation» à l'action parlementaire. Et le paysage politique, qui sera, à l'occasion de chaque élection législative, ouvert à de nouvelles figures féminines. Mais force est de constater que nos parlementaires femmes se contentent d'un «service minimum», du moins dans leur majorité écrasante d'entre elles. Et pour cause, quasiment toutes celles dont les noms figuraient sur la liste nationale de 2002, ont postulé encore une fois. A l'Istiqlal, la course aux places sur la liste fait rage entre les députées femmes (qui se disputent la tête de liste) et certaines militantes qui revendiquent une place au soleil. Au PPS, la première place est disputée par Nezha Skelli et Gujmoula Bent Ebbi. La première présidait la liste nationale du PPS en 2002, et la seconde, celle du Mouvement Populaire de Mohand Laenser, avant de rejoindre l'année dernière, le parti de Moulay Ismaïl Alaoui. Au PJD, les choses sont beaucoup plus compliquées, puisque la députée Fatima Belahcen, qui a remporté son siège au Parlement directement dans une circonscription à Tanger, se trouve confrontée, cette année, aux autres membres de l'ancienne liste nationale. A l'USFP, Nouzha Chekrouni, qui occupait la première place de la liste nationale, a décidé de ne pas se présenter aux élections. Ce qui nous pousse à poser une question. Quelle plus-value électorale, a apporté Chekrouni à l'USFP, puisqu'elle a décidé de quitter le Parlement ? En d'autres termes, ne fallait-il pas présenter dans la liste nationale, une femme qui avait l'intention de faire long feu dans l'hémicycle ? Les mêmes combats ont lieu au RNI, au Mouvement Populaire, à l'UC, au PND et au FFD. En conclusion, nous sommes en droit d'affirmer, que les députées femmes ont raté une occasion en or, pour positionner le «sexe faible», comme une force incontournable dans le paysage parlementaire marocain. Finalement, les femmes politiques ont les mêmes ambitions et surtout les mêmes réflexes que leurs camarades hommes. Quand elles ont le pouvoir, elles ne veulent plus le lâcher.