Elle a débuté sa carrière en 1960 au sein de la Troupe du Théâtre national, précisément à travers une adaptation de la célèbre pièce de Molière «le malade imaginaire». Par la suite, elle a participé à de nombreuses pièces théâtrales que la TV présentait à l'époque en direct (et en noir et blanc) chaque vendredi, depuis les studios de Aïn Chock à Casablanca. Chaque samedi, elle prenait part, à la soirée de variétés, présentée en direct. Tout cela avant d'intégrer les rangs de la fameuse troupe «Maâmora» où elle est restée durant une longue période. En plus des planches, Zhor Lemâamri a pris part à de nombreux feuilletons et films nationaux et internationaux. Une bien riche carrière en somme. Mais, depuis l'an 2000, notre invitée de la semaine se tourne les pouces et supporte difficilement l'ennui du chômage. Cédons-lui la parole pour en savoir plus sur sa vision de la chose artistique. Que feriez-vous en premier si vous deveniez subitement millionnaire ? Même si ce n'est qu'une utopie, je trouve la question intéressante. Je construirais un village pour les gens âgés et les enfants abandonnés par leurs familles. C'est un rêve que je nourris depuis longtemps. Que Dieu m'aide à le réaliser. Puisque tout le monde va mourir un jour, pourquoi les gens riches ne profitent pas réellement de leur situation pour faire le bonheur de ceux que le destin ou les circonstances ont privé de joie. Quel est le titre de l'une de vos pièces ou l'un de vos films, qui vous a laissé le plus mauvais souvenir et de quelle nature ? Il n'y a pas de mauvais souvenir. J'aime toutes mes oeuvres. Je n'en garde que de bons souvenirs. Pardonnez-vous facilement à ceux qui critiquent les rôles que vous interprétez ? Bof ! je les laisse «se pardonner» à eux-mêmes. Etant de nature ouverte, je fais toujours du bien et je laisse les autres interprèter mon geste comme bon leur semble. C'est leur droit. Un plaisantin a dit une fois que «dans la vie, il faut choisir entre gagner de l'argent et le dépenser !». En ce qui vous concerne, quel serait votre choix ? Bien sûr le dépenser. Reste une chose primordiale : il faut d'abord le gagner, pour pouvoir le dépenser après ! Etes-vous du genre qu'un admirateur puisse aborder facilement dans la rue pour un autographe ou une photo ? Et que pensez-vous de ces vedettes qui refusent une si petite et légitime «exigence» de leur public ? Pour un artiste, il n'y a pas plus beau au monde que les admirateurs. Ils nous admirent, alors il nous faut aussi leur donner un peu de notre temps. Si vous aviez un reproche à faire à Mohamed El Jem, pour lequel opteriez-vous ? Franchement, Mohamed El Jem ne mérite aucun reproche. Du moins, de ma part. Cet artiste dynamique et ambitieux a été le seul, à une certaine époque, à parvenir à créer le Théâtre de salon. Je suis fière de lui et de son apport au Théâtre marocain, comme je suis fière de tous les membres de sa troupe. Si vous n'êtiez pas comédienne, pour quelle autre discipline artistique votre coeur aurait-il balancé ? Comme je suis de nature calme et romantique, je dirais la chanson classique et, cela va vous surprendre peut-être, la danse. Si quelqu'un, qui vous a fait beaucoup de mal par le passé, sollicite votre aide (matérielle) aujourd'hui, répondrez-vous à son appel ? Avec le plus grand plaisir. Je le ferais sans la moindre hésitation et sans tarder. Dans la vie, il faut savoir pardonner. Il faut comprendre et aimer les gens. Vous vous manifestez rarement en public. Est-ce par paresse, ou parce qu'on ne vous invite pas souvent, ou parce que vous aimez vivre cloîtrée ? Ce n'est ni de la paresse ni une question de cloisonnement ! Je réponds à ceux qui m'invitent. Je n'aime pas imposer ma présence aux autres. Dites-nous quel est votre plus grand défaut et votre plus belle qualité ? Mon plus grand «défaut», si on ose l'appeler ainsi, c'est que je suis toujours très ponctuelle aux rendez-vous, alors que d'autres... Quant à ma plus grande qualité à mes yeux : c'est la franchise. Ponctualité et franchise, c'est tout proche, non ? Avez-vous un conseil à donner aux jeunes comédiens qui débutent dans le domaine des planches ? Ils ne doivent pas être imbus de leur personne. Pour réussir une carrière, artistique ou autre, il faut d'abord être ambitieux et surtout modeste. Avec de la modestie, de l'acharnement et de la patience, on finit par parvenir à tout. Il suffit de choisir sa voie. À propos de choix, entre la Première et la Deuxième chaîne, avez-vous une quelconque préférence ? Je n'ai pas de choix précis de chaînes. J'ai tout simplement une préférence pour les bonnes émissions là où elles se trouvent, sur une antenne marocaine ou ailleurs. Qu'est-ce qui vous repose moralement le plus: un rôle interprété au théâtre, au cinéma ou à la télévision ? Un rôle dans les trois ! A condition que je sois convaincue du rôle qu'on me confie afin que je puisse l'aimer et m'en acquitter de la meilleure façon possible. Dites-nous en toute franchise, quel est le rôle où vous avez le plus échoué ? C'était dans quelle pièce de théâtre ou dans quel film ? Moi, j'interprète des rôles. Je fais de mon mieux, je m'y investis corps et âme avec l'espoir de les réussir. C'est au public de relever là où j'ai échoué. Et si c'était à refaire - avec les modifications d'usage - le feriez vous ? Si cela arrivait, je le ferais volontiers pour le bien du projet et pour m'améliorer. Lorsqu'un journaliste vous critique injustement, cherchez-vous à réagir à chaud ou bien vous vous montrez indifférente et continuez votre bonhomme de chemin comme si rien ne s'était passé ? Cela va peut-être vous surprendre ! J'aime les critiques injustes ! Cela me fait de la propagande ! (rires). À propos de presse, si vous êtes journaliste, quelle est la question la plus gênante que vous aimerez poser à Zhor Lemâamri? Rien ne gêne Zhor Lemâamri ! Un artiste qui se prend pour le nombril du monde, ça vous inspire quel sentiment ? Un sentiment d'indifférence tout simplement ! Vous vient-il parfois à l'esprit d'arrêter de vous produire sur scène et prendre votre retraite artistique ? Si oui, à quel âge envisagez-vous une telle décision ? Cela m'est venu à l'esprit il y a longtemps. Maintenant, je suis plus mûre. Même si je suis blasée, je ne me précipite pas dans la prise de mes décisions. Zhor Lemâamri est-elle aujourd'hui aussi ouverte à la critique qu'au début de sa carrière ? Je suis comme je suis ! Toujours ouverte à la critique, aussi bien avant que maintenant. Et je ne changerai, pour rien au monde !