Les textes de loi ont pour réputation mondiale d'être aveugles. C'est pourquoi ils sont détournés, de temps à autre, au profit des uns et largement au détriment des autres. Les textes réglementant la circulation ne font pas exception à cette règle. La prolifération des accidents de la route, accompagnée du nombre extrêmement élevé de morts, donnent toutes les raisons aux services de l'Administration et aux différents organismes et associations de réclamer des peines sévères contre les contrevenants. Il est vrai que la route produit des scènes d'horreur insurmontables. Impardonnables donc. Trois cas suffiraient pour montrer ce dysfonctionnement avéré dans les jugements rendus et les décisions prises. Un conducteur démarre sa voiture garée devant son domicile. Il fait chauffer le moteur et fait marche arrière le plus normalement du monde. Un gosse, grand comme trois pommes, invisible sur le rétroviseur, est renversé. La manœuvre était tellement faible que l'enfant n'a eu que de petites égratignures. Mais il fallait établir les formalités d'usage en cas de complications. L'automobiliste a beau crier haut et fort, pour le principe, lui et son avocat, en première instance et en appel, que l'enfant n'était pas accompagné et qu'il n'était pas visible derrière le véhicule et que… Il a été condamné pour défaut de maîtrise. Un autre automobiliste arrive sur un rond-point et s'apprête à tourner. À sa droite, trois files de voitures étaient arrêtées au feu rouge. Un motocycliste grille le feu et l'accrochage conduit le cycliste sur le trottoir. L'ambulance arrive, l'attente est longue, la foule se disperse. Le dossier arrive devant le tribunal mentionnant que la police n'a pas pu déterminer l'origine de la faute, ne faisant état d'aucun témoignage. L'automobiliste est condamné pour non-respect de la priorité à droite. Un troisième cas ! Celui d'un automobiliste qui s'arrête au feu rouge. Une voiture roulant à vive allure était derrière lui. Au moment du freinage, le système a lâché et la seconde voiture défonce de plein fouet la première qui, par la force du choc, a heurté à son tour un piéton sur le passage clouté, lui causant des fractures au niveau des deux jambes. C'est le premier conducteur, qui s'était arrêté au feu rouge, qui a été poursuivi pour défaut de maîtrise provoquant des dégâts corporels. Il est vrai ainsi que les défauts de maîtrise sont pluriels !