Après plusieurs mois de black-out, les choses se précisent au RNI. Les différents «courants» se sont mis d'accords. Ils organiseront le départ d'Ahmed Osman et décideront de la suite des événements, c'est-à-dire du prochain patron du RNI. Les dernières semaines ont été fatales à Ahmed Osman. Après quelques réunions des caciques du RNI, son destin a été scellé. Le fondateur du parti doit quitter la présidence du parti centriste. L'unanimité est incontestable concernant ce point. L'affaire ne date pas d'aujourd'hui. Ses soubassements ont été initiés lors du remaniement ministériel de l'équipe Jettou. À la surprise générale, Ahmed Osman, Mustapha Oukacha et Mohamed Bentaleb acceptent, lors des négociations avec le Premier ministre Driss Jettou, le «parrainage» de ministres technocrates. Cette démarche mettra en avant un courant anti-Osman piloté par les parlementaires du RNI. Dès lors, une série d'informations sera publiée par la presse. D'abord, on remet en cause la gestion financière d'Ahmed Osman et ensuite on l'accuse de s'accaparer les pleins pouvoirs du parti. Des membres du bureau politique dévoilent, alors, les failles de leur président. On lui reproche son absence et on «regrette que ni le bureau politique ni le comité central n'ont été réunis depuis des années». Une accusation grave. Après cette vague de critiques, l'ex-ministre des droits de l'homme, Mohamed Aujjar, monte au créneau et attaque frontalement Osman. Avec une trentaine de députés, il se prépare à créer un nouveau parti. A la dernière minute, Aujjar se ravise. Après moult médiations, un compromis est trouvé. Osman assainira la situation, alors que les autres fractions enterrent la hache de guerre. Mais depuis deux semaines tout bascule. À l'instigation des ministres centristes, une réunion est tenue au domicile de Rachid Talbi Alami en présence du président de la deuxième Chambre, Mustapha Oukacha et de Mohamed Boutaleb. A l'ordre du jour, l'éviction d'Ahmed Osman. Il sera établi que le prochain congrès consacrera Mustapha Oukacha à la présidence du parti. Dans la foulée une décision est prise. Elargir le cercle des «putschistes». Les conviés ne sont autres que Taïeb Bencheikh, Abdelaziz Alaoui Hafidi, Mohamed Abbou, Maâti Benkadour… Les cadors du RNI sont unanimes, un changement est irréversible. Reste à convaincre Mustapha Mansouri et Mohamed Aujjar. Le premier est indécis et le second est pour le changement. Le député de Nador est proche de Osman et attendra la dernière minute pour se prononcer. Par contre Aujjar, député de Rabat, a un objectif. Un changement de fond au sein du parti. Il sait, également, que son poids au RNI est significatif. Lors d'une réunion avec les ministres et Oukacha, il s'oppose à la «nomination» de ce dernier après le départ d'Osman. Aujjar est, alors, candidat. Son but, rajeunir le parti et lancer l'ouverture du RNI. Après plusieurs rounds de négociations, il a été établi qu'un comité central se réunira, le 3 janvier à Rabat, pour réitérer la date du congrès prévue pour le 30 et 31 mars prochain. Lors de ce dernier, le départ d'Osman sera annoncé et la bataille pour sa succession sera lancée. Pourtant, l'actuel président du RNI ne se laisse pas faire. Le 27 janvier dernier, il organise à son domicile, un déjeuner de travail avec les coordinateurs provinciaux. Ni Oukacha, coordinateurs de la région Chaouia, ni Aujjar coordinateur de Rabat-Zemmour-Zaer, ne sont conviés. L'objectif, une contre-attaque pour les affaiblir. Le président de la deuxième chambre organise, le même jour, un déjeuner pour les mêmes coordinateurs à l'hôtel Diwan à Rabat. Echec et mat. Osman se retrouve seul chez lui. Un signal fort. Question: qui prendra en charge le parti. Aujjar ou Oukacha ? Quels sont les atouts de chacun? Oukacha bénéficie du soutien des ministres technocrates et du Premier ministre. Les premiers lui doivent leur nomination et Driss Jettou sait pertinemment qu'il peut «gérer» le parti post-élections législatives de 2007. D'autant plus qu'on parle d'une politisation du Premier ministre après les élections s'il veut rester dans la course. Oukacha peut également compter sur l'appui des Conseillers, mais son point faible est qu'il ne contrôle pas la machine du parti. Par contre Mohamed Aujjar est un homme d'appareil. Il a l'appui des parlementaires et des élus. De plus, il connaît parfaitement les rouages du parti et se positionne comme un réformateur avec une vision de rajeunissement des élites. Une approche qui peut être payante puisque Aujjar cherche, davantage, à mettre en avant d'autres jeunes capables de prendre la relève. C'est dans ce sens qu'il a organisé plusieurs débats sur le rajeunissement de la classe politique. Mais plusieurs voix au sein même du RNI essayent de trouver un compromis du style de celui préconisé par le Mouvement Populaire. C'est-à-dire, un Oukacha président et un Aujjar Secrétaire Général. Il est clair que le RNI vit une mutation, le prochain congrès sera décisif. Le parti centriste cherche à se débarrasser de l'étiquette de parti de «l'administration». Pourra-t-il réussir ce challenge ? Incontestablement oui.