Fidèle à ses origines, le quartier du Maârif garde un cœur, grand comme ça ! Il reste ouvert à tous sans exception. Il fut longtemps un lieu de brassage, de solidarité, de tolérance et d'entraide entre différentes populations. Seraient-ce ces mêmes qualités qui en font aujourd'hui, un des lieux les plus fréquentés de Casablanca ? Sans aucun doute ! Il n'en demeure pas moins que ce quartier aimé de tous, est résolument tourné vers l'avenir. Certaines valeurs sont éternelles… Le Maârif du début du siècle dernier est considéré comme une zone d'insécurité (30 juillet 1907 : massacre d´Européens à Casablanca). Ceux qui y habitent sont à la merci des pilleurs. Ils ne possèdent qu´un lopin de terre pour planter des légumes et une baraque en bois. Le lieu est un faubourg de Casablanca, à environ 2km 500 du centre ville. En 1911, des négociants anglais, Murdoch et Buttler, y achètent, des terrains cinquante fois moins chers que ceux du centre. Le tout est acquis à une fraction de la tribu berbère des Maârroufis, issue du village de Ben Ahmed (El Maarif-Regada existe encore aujourd'hui dans la région de Ben Ahmed)*. La revente des terrains sur plan, par lots, débute vers 1915/1916. L'acquéreur est une société immobilière qui les revendra à son tour. Pour ce, elle accroche une annonce devant le « grand café du commerce » dans l'ancienne médina. Le lieu est une véritable foire aux terrains. Tous les courtiers s'y retrouvent. Vu la crise du logement, le prix d'un lot au Maârif s'élève parfois à 10 000 anciens Francs (pour des salaires de 10 à 15 Francs/ jour). La maison en préfabriqué coûte 100 à 120 Francs le m2. Les prix sont en Peseta Hassani (1Fr : 1,25 P.H.). Par ses origines, le Maârif est un vrai village dans la ville. Il n´était d'ailleurs pas inclus dans le Plan Prost (1er plan d´urbanisme de la ville). Et pour échapper à la spéculation, les petites bourses recherchent des terrains hors périmètre. C'est ainsi que dès 1912, des petites gens s'installent pêle-mêle, dans des baraquements en bois. Les briques et le ciment sont encore importés d´Espagne à prix d´or. Et la première briqueterie ne sera construite à Fédala que quelques années plus tard. Le moindre coût de ce quartier attire les nombreux immigrants espagnols et italiens à faibles capitaux. Des Grecs, des Portugais, des Arméniens et d´autres ressortissants des Pays de l'Est y élisent aussi domicile (en très petit nombre). Cette tour de Babel parle en Français (très peu maîtrisent la langue arabe). Et c'est cette population d'ouvriers et de petits employés européens, qui assure le succès du lotissement du Maârif. Le quartier est assez éloigné du centre. Et il a tous les aspects des faubourgs populaires des villes côtières espagnoles. Les lacunes du plan Prost en matière d'habitat modeste apparaissent très vite. Le tracé de ces quartiers, basé sur un quadrillage trop rigoureux, ne tolérait aucun espace public. Les terrains sont sans voirie. Les rues sont tracées en damier, sans eau et sans lumière. Dès1916, l´assainissement de ce nouveau quartier devient nécessaire. Le Maarif est un marais insalubre. Et faire des égouts, avec une nappe phréatique si peu profonde, est hors de prix. Le Maarif fait donc à lui seul, l´objet d´un plan d´urbanisme et d'assainissement. Et paradoxalement, c'est en pleine crise financière mondiale (1929), que la construction du quartier prend un grand essor. Entre 1927 et 1933, le Maârif a déjà son aspect actuel.Le 11 novembre 1942, les Américains débarquent et délivrent le Maroc en bombardant Casablanca. Au Maârif, une bombe tombe sur le terrain mitoyen à l´école, une autre dans la villa des Torres, place du Nid d´Iris.