Et puis il y a eu cette personne, allongée seule sur son lit d'hôpital, détruite par une maladie grave et incurable. Sa famille venait la voir autrefois mais au fil du temps les visites se sont espacées : d'abord tous les jours, toutes les semaines, et puis tous les mois jusqu'à ne plus exister. La maladie est beaucoup moins douloureuse que la solitude pour cet être ; l'une envahit son corps tandis que l'autre anéantit son cœur. Son seul et unique contact humain était celui des infirmières qui venaient lui administrer les soins. Parfois douces, parfois dures, souvent froides et distantes, elles étaient pourtant les seules à l'avoir suivi jusqu'à sa fin. Et puis il y a eu l'attente, longue, fatigante, effrayante, une attente désespérée à laquelle cette personne dut faire face pendant tant de jours. Et souvent, seule et isolée, cette âme souffrante repensait à sa vie : son enfance, sa jeunesse, ses amis, ses proches, sa passion pour les chevaux, son mariage ratée, sa carrière inexistante. Pour elle, sa vie fut un véritable échec et tout était bien ainsi. Et puis il y a eu les souvenirs lointains, heureux et tristes qui se bousculaient dans sa tête. Quelques fois même une larme venait couler sur ses joues sèches et creusées par le mal ou un sourire venait s'afficher sur ses lèvres pâles et déchirées. Mais le plus souvent, c'étaient des grimaces de douleur qui venaient figer son visage si joyeux jadis. Et puis il y a eu les questions qui troublaient son esprit jusqu'à l'incompréhension totale. « Pourquoi moi ? » « Quel mal ai-je fait pour mériter ça ? » « Que va-t-il m'arriver ? » « Se souviendra-t-on de moi ? » « Guérirai-je un jour ? » « Dieu m'ouvrira-t-il ses portes ? » Et puis il y a eu la fin, une fin douce, silencieuse, sans douleur et muette. Cette personne sentit son pouls s'affaiblir, sa douleur se tarir, son esprit la quitter. Elle n'avait plus mal et ne souffrirait plus désormais. Et puis dans ses yeux, la flamme qui dansait jadis, s'éteignit délicatement, pour ne laisser place qu'au noir sombre et obscur des ténèbres. Et puis avant que son âme paisible quitte son corps, dans un dernier souffle, un ultime élan de courage, cet être murmura, l'index de la main droite pointé vers le ciel : « Ach hadou ana la ilaha illa llah wa ach hadou ana Mohamadene Rassoulou llah ».