Je l'aime, oui je l'aime. J'en souffre avec amertume, et j'en vis avec âpreté. J'en ai marre de me débattre, de m'agiter vainement dans ce filet d'araignée... il a su m'y attirer sans trop le vouloir, c'est plutôt inconsciemment qu'il est parvenu à m'emmêler dans ce dilemme, dans cette confusion que je qualifierai de troublante. Je l'aime, je l'avoue, pour la 1ère fois que j'aime. Je l'aime comme je n'ai jamais aimé, mes aventures passées n'étant que de simples amourettes. Je l'aime, je le chéris, d'un amour brutal dans sa simplicité, machiavélique dans son innocence et douloureux dans son déséquilibre. Un amour futé dans sa naïveté, vieux dans sa jeunesse... Cet amour me consume, telle une bougie, qui se brûle, pour éclairer l'ombre glacial de la nuit, et qui pleure, heureuse de brûler. Cet amour me torture, me passionne, me tue, m'embrase, éveille mes sens... Cet amour débordant de désirs fous et nerveux que je ressens pour la 1ère fois, me fait, avec douleur, sentir le goût d'une terre promise, aussi innocente que je le suis, insaisissable et inaccessible. Je l'aime, c'est la première fois aussi que je me l'avoue à moi même. Je me battais contre ce sentiment ravageur. Ce fut une grande bataille, ardente, rusée, envoûtante parfois comme peuvent l'être les guerres et défiante aussi. Mais j'en suis sortie grande perdante, et humiliée, j'ai longtemps refusé cet échec, qui était pourtant prévu, attendu, et redouté. Cet aveu d'échec fut pour moi une sorte de réconfort, de lit douillet, chaud et maternel. Cet amour - pour ne pas dire cette araignée - captif, charmeur, puissant et ensorceleur, a su m'embrouiller dans ses filets, moi, faible et vulnérable petit papillon, j'attends mon sort...