La maladie cœliaque (MC), mieux connue sous l'appellation d'intolérance au gluten, une protéine contenue dans les céréales (blé, orge, seigle...), est une maladie auto-immune, plutôt féminine, où le système immunitaire attaque la paroi de l'intestin grêle induisant des dommages et des troubles de l'absorption du fer, du calcium, et des vitamines et de multiples autres complications. La Journée mondiale de la maladie cœliaque, célébrée le 18 mai, a été l'occasion de faire le point sur une maladie qui demande à être mieux connue et surtout mieux diagnostiquée au Maroc, ainsi que sur quelques aspects de la maladie et de la vie quotidienne des malades. Et c'est tout le combat que mènent ensemble depuis 7 ans l'Association marocaine des maladies auto-immunes et systémiques (AMMAIS) et l'Association marocaine des intolérants et allergiques au gluten (AMIAG). Selon Dr Khadija Moussayer, spécialiste en médecine interne et gériatrie et présidente de l'association AMMAIS, la maladie cœliaque a des manifestations peu claires et déroutantes. En effet, cette affection est difficile à diagnostiquer à cause de ses multiples manifestations. D'une affection de nourrissons et d'enfants en bas âge et dont les signes typiques se limitent à l'appareil digestif (diarrhées, vomissements, état irritable, cassure de la croissance), la maladie cœliaque est devenue ces dernières décennies une pathologie de l'adolescent et de l'adulte et dont les manifestations sont très étendues. Dr Moussayer explique que les douleurs articulaires, une ostéoporose, des anémies, des fausses couches à répétition, des aphtes buccaux, une dermatite ou même encore des maux de tête, une fatigue chronique, une anxiété, une dépression ...constituent le large spectre clinique de la maladie. Elle peut d'ailleurs rester plus ou moins «silencieuse» pendant des années tout en poursuivant un travail de destruction sur l'intestin et d'autres organes. Une maladie trop peu diagnostiquée Malheureusement, Dr Moussayer souligne que la maladie cœliaque chez l'adulte est bien souvent découverte au stade de complications. « On estime d'ailleurs que le délai de sa mise en évidence est de 13 ans et que, pour chaque cas détecté, en particulier chez l'adulte, 8 resteraient ignorés», poursuit-elle. Le diagnostic de la maladie cœliaque repose sur la recherche de substances particulières, responsables d'attaques sur l'organisme et appelées auto-anticorps (les anti-transglutaminases) et sur la découverte d'une atrophie des replis de la paroi intestinale (les villosités) après la réalisation d'une biopsie duodénale. Du côté du Maroc, la maladie cœliaque reste encore peu connue malgré qu'elle atteigne environ 1% de la population, explique Dr Moussayer. Il existe une forte prédisposition génétique à la maladie et les membres de la même parenté sont touchés dans 10 % des cas. Pour le traitement, Dr Moussayer conseille un régime strict et à vie. «Le seul traitement repose sur un régime alimentaire sans gluten (RSG). Son application demeure néanmoins problématique du fait de l'absence d'un étiquetage obligatoire sur la présence du gluten. Ce dernier est en effet présent dans des produits divers et souvent insoupçonnés (médicaments, rouge à lèvres, dentifrice, colle, bonbons, sauce à salade, plats cuisinés...)». Le gluten, l'ennemi intime dans la maladie cœliaque D'après l'AMIAG, l'exclusion complète et définitive du gluten de l'alimentation constitue la base du traitement de la maladie, une prescription simple dans son principe mais difficile à mettre en œuvre. En effet, le gluten est présent dans toutes les denrées à base de blé, comme le pain et les pâtes, et dans une grande partie des produits issus de l'industrie agroalimentaire (plats cuisinés, entremets, desserts, additifs contenant du gluten et utilisés comme agent de texture ou de stabilité, etc.). Chez les enfants, ce régime est compliqué à vivre : goûters avec les camarades, fêtes, cantine, restaurants, colonies de vacances… deviennent des situations souvent problématiques d'autant plus qu'ils doivent rapidement savoir par eux-mêmes ce qui leur convient ou non, les parents n'étant pas toujours là pour faire le tri. L'AMIAG poursuit qu'à cette contrainte matérielle, s'ajoute le ressenti psychologique tel que se nourrir est une forme de partage, manger différemment peut stigmatiser et donner l'impression d'être un sujet de curiosité ou d'être obligé de se justifier. Les enfants ont du mal à accepter cette singularité, notamment à l'adolescence marquée par des périodes de rejet du régime. Toutefois, l'AMIAG souligne que les produits sans gluten sont par ailleurs chers et loin d'être disponibles partout au Maroc. D'ailleurs, leur meilleure accessibilité à tous les malades est un des combats majeurs de l'association. Les bonnes règles d'un régime réussi L'AMIAG explique qu'il peut souvent se produire des contaminations accidentelles lorsque le régime sans gluten n'est pas suivi par tout le monde à l'intérieur d'une famille. Pour éviter un incident malencontreux, certaines règles strictes sont donc à respecter. Dans ce sens, l'association recommander à ce que le malade, ou sa famille dans le cas d'un enfant ou d'un adolescent, veille à ne pas toucher un aliment «sans gluten» si vous avez manipulé du pain, des biscuits classiques, des pâtes ou tout autre aliment contenant du gluten ; juste avant, il faudra d'abord se laver les mains. Ne pas utiliser les mêmes planches à découper (surtout celles en bois ou poreuses), crêpières, poêles, moules à gâteaux ... qui souvent contiennent des miettes de précédentes cuissons. Dans la mesure du possible, mieux vaut d'ailleurs posséder certains ustensiles en double afin d'en réserver un jeu exclusivement pour le «sans gluten». Commencer par préparer les recettes sans gluten et terminer par les classiques afin de limiter les résidus ou les poussières de farines. Faire attention aux cuillères ou aux couteaux qu'on plonge dans les pots de confiture… Une cuillère de miel tartinée sur du pain par l'un, et voilà quelques miettes qui se retrouvent dans le pot etc. Réserver, dans la mesure du possible, un placard pour tous les aliments «sans gluten» où aucun aliment à risque ne pénètre. Pour conclure, l'AMIAG affirme que ces mesures de précautions peuvent paraître extrêmes, mais elles sont indispensables, surtout pour les débuts du régime afin d'éliminer toutes les traces possibles de gluten. Plus tard, il pourra être possible d'assouplir un peu ces règles; mais en aucun cas de les oublier car il en va de la santé de la personne intolérante.