La Cour des comptes a fait savoir que le rythme de transfert et de délégation des compétences prioritaires liées à l'investissement au profit des services déconcentrés reste insuffisant, n'atteignant que 38% en octobre 2024, soit 19 délégations sur 50. Dans son rapport annuel 2023/24, la juridiction souligne également que le taux de réalisation de la feuille de route relative à la charte de déconcentration administrative n'a pas dépassé 36% à la même date, contre 32% en octobre 2023. Et pour relever la cadence de ce chantier structurant, la Cour a recommandé d'accélérer la mise en œuvre des actions programmées dans la feuille de route pour l'exécution de la Charte nationale de la déconcentration administrative, d'en évaluer les résultats et d'assurer les conditions et les moyens nécessaires pour garantir la régularité des travaux de la Commission interministérielle de la déconcentration administrative. Elle a également recommandé d'accélérer l'adoption des cinq décrets définissant les attributions et l'organisation des représentations administratives communes et sectorielles au niveau régional, approuvés par la Commission interministérielle de la déconcentration administrative, et ce afin d'assurer l'unité de l'action des services déconcentrés de l'État et de garantir une meilleure coordination entre eux. La Cour a recommandé, en outre, d'accompagner et de soutenir les régions dans la mise en œuvre des plans de développement régionaux approuvés, tout en tenant compte de leurs capacités de gestion et des ressources financières disponibles. Elle a, enfin, recommandé de veiller à une identification précise des projets prioritaires à réaliser dans le cadre des contrats État-Région, en intégrant des mécanismes appropriés pour garantir leur succès, notamment en précisant les formalités et conditions de leur conclusion et exécution. Concernant la généralisation de la protection sociale, le rapport enregistre des avancées notables dans la mise en œuvre de ce chantier, notant que les autorités publiques se sont focalisées sur l'instauration des outils d'implémentation et le renforcement de l'arsenal juridique. Ce dispositif a couvert le système de la protection sociale, de manière générale, et la généralisation de l'assurance maladie obligatoire de base et de l'aide sociale directe en particulier. L'élargissement de la base des adhérents aux régimes de retraite et la généralisation de l'indemnité pour perte d'emploi se trouvent actuellement en phase d'encadrement juridique. S'agissant de l'assurance maladie obligatoire, le taux de couverture a atteint 54% des 22 millions de bénéficiaires ciblés, alors que 4,18 millions de ménages ont bénéficié des aides sociales directes, pour un coût estimé à environ 18,54 MMDH. Néanmoins, en dépit des avancées notables enregistrées, la réforme de la protection sociale connaît, selon le rapport, certains défis liés, particulièrement, au développement du système de ciblage, à la maîtrise des effectifs des catégories prises en charge par l'Etat, à la diversification des sources de financement en vue d'alléger la pression sur le budget de l'Etat, au développement et à la mise à niveau des établissements de soins publics et à la lutte contre la vulnérabilité à travers la substitution de l'aide par le revenu. Compte tenu de ces défis, la Cour des comptes a recommandé, l'activation et l'achèvement de la mise en place des structures des instances intervenant dans la gestion du système de protection sociale, la mobilisation et la diversification de sources de financement durables, le développement et la mise à niveau des établissements de soins publics, le suivi de l'impact de l'aide sociale directe sur les catégories sociales bénéficiaires et la coordination entre la politique de la protection sociale et les autres politiques publiques de portée économique et sociale. Pour ce qui est du chantier de l'investissement, le rapport de la Cour des comptes note que 74% des initiatives prévues dans la feuille de route stratégique ont été lancées, avec un taux d'exécution global de 31% pour ces initiatives. Le suivi de l'état d'avancement du chantier de l'investissement a révélé, également, des risques pouvant entraver la réalisation de ses objectifs, notamment la non adoption de la stratégie nationale de l'investissement ainsi que du pacte pour l'investissement qui permettrait d'officialiser les engagements des différentes parties prenantes. Pour dépasser les risques et améliorer sa cadence, la Cour des comptes a recommandé d'améliorer le cadre stratégique de la réforme en accélérant l'adoption d'une stratégie nationale de l'investissement et en formalisant le pacte national de l'investissement, afin d'officialiser les engagements respectifs des secteurs privé et bancaire; et d'accélérer la mise en place de l'observatoire national de l'investissement pour mieux piloter et suivre les réalisations des objectifs stratégiques, notamment aux niveaux territorial et sectoriel. Le rapport a également recommandé de compléter les dispositifs de soutien à l'investissement par l'adoption des textes réglementaires se rapportant au dispositif spécifique aux très petites, petites et moyennes entreprises, afin de garantir une mise en œuvre cohérente et inclusive de la réforme, et d'accélérer le rythme de déploiement de la feuille de route stratégique relative à l'amélioration du climat des affaires, notamment en ce qui concerne la mobilisation du foncier destiné à l'investissement, en renforçant l'implication de tous les acteurs concernés. Par ailleurs, le rapport a relevé que la mise en œuvre du chantier de la réforme du secteur des Etablissements et entreprises publics (EEP) a connu des progrès significatifs. En effet, une avancée importante a été réalisée dans le processus de liquidation de 19 EEP, représentant 23% du portefeuille en cours de liquidation à la fin de l'année 2023. De plus, huit textes législatifs et réglementaires, sur les 19 prévus par la loi-cadre n°50.21 relative à la réforme des EEP, ont été publiés, précise le rapport. Néanmoins, la mise en place de certaines actions critiques conditionne le rythme d'avancement de la réforme dans sa globalité. Dans ce sens, la Cour a réitéré, en vue d'accélérer leur mise en œuvre, les recommandations émises dans son rapport annuel de 2022-2023, portant, notamment, sur le démarrage du transfert au profit de l'Agence nationale de gestion stratégique des participations de l'Etat (ANGSPE) de la propriété des participations que l'Etat détient dans les EEP à caractère marchand et l'accélération de la mise en œuvre de la restructuration du portefeuille de ces EEP. En outre, le rapport a recommandé d'accélérer le déploiement de la feuille de route de la politique actionnariale de l'Etat et d'activer la mise en œuvre des opérations de restructuration des EEP non marchands. Il a recommandé, également, d'achever les opérations de liquidation des EEP, en priorisant ceux qui comportent des enjeux d'actifs et de passifs pour l'Etat ; et de parachever la préparation et la publication des textes législatifs et réglementaires prévus par la réforme. La Cour a recommandé, enfin, d'activer la transformation des établissements publics relevant de l'ANGSPE en sociétés anonymes, en concertation avec les ministères de tutelle à qui incombe la préparation des textes juridiques ; et d'achever les travaux d'identification et de structuration financière du portefeuille des projets d'infrastructures des EEP, qui seront appuyés par le Fonds Mohammed VI pour l'investissement, en priorisant les secteurs stratégiques. Concernant la réforme fiscale, le rapport indique que durant la première moitié du délai de mise en œuvre de la loi-cadre n°69.19, les principales mesures apportées, par les lois de finances (LF) de 2023 et de 2024, ont concerné respectivement, de manière principale, l'impôt sur les sociétés (IS) et la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Concernant les mesures prévues dans le PLF 2025, elles portent essentiellement sur l'impôt sur le revenu (IR). Néanmoins, à l'approche du terme du délai fixé par la loi- cadre, précitée, d'autres mesures prioritaires ne sont pas encore mises en œuvre. Il s'agit particulièrement de la révision des bases relatives à la fiscalité territoriale, et ce après les amendements apportés par la loi n°07.20 modifiant et complétant la loi n°47.06 relative à la fiscalité des collectivités locales. Ainsi, tout en notant la poursuite de la mise en œuvre de la loi-cadre, susvisée, la Cour des comptes réitère ses recommandations émises dans son rapport annuel 2022-2023 portant sur l'activation de la mise en œuvre de la réforme de la fiscalité des collectivités territoriales et de la parafiscalité conformément aux objectifs fixés par la loi-cadre, et sur l'évaluation régulière de l'impact socio-économique des avantages fiscaux octroyés afin d'orienter les décisions quant à leur maintien, leur révision ou leur suppression, selon le cas. En outre, la Cour a recommandé de réaliser une évaluation des mesures entreprises dans le cadre de la réforme relative à la TVA et à l'IS et de communiquer au sujet de cette évaluation et des effets attendus de la réforme proposée en matière de l'IR.