Lors de la présentation du projet de loi n° 21.24 fixant des dispositions particulières relatives au régime d'assurance maladie obligatoire de base (AMO) applicables aux personnes capables de payer les cotisations et n'exerçant aucune activité rémunérée ou non rémunérée, le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Khalid Aït Taleb, a essuyé une salve de critiques de la part des députés. Ces derniers ont exprimé leur mécontentement quant à la situation précaire des hôpitaux publics, la prolifération des établissements de santé privés, et l'usage discutable du budget dédié à la protection sociale. Ils ont également mis en lumière les grèves récurrentes des professionnels de la santé, la crise persistante des facultés de médecine au Maroc, ainsi que les problèmes liés aux seuils et au ciblage des bénéficiaires. Ce projet de loi, présenté mardi devant la Commission des secteurs sociaux de la Chambre des représentants, après avoir été adopté par la Chambre des conseillers, vise à définir des dispositions particulières pour le régime d'assurance maladie obligatoire de base (AMO) pour les personnes capables de cotiser mais n'exerçant aucune activité rémunérée. Said Serrar, député du Mouvement Populaire (MP), a vivement dénoncé les difficultés rencontrées par les citoyens, notamment ceux à revenu limité, qui « souffrent de barrières à l'accès aux soins et aux médicaments« . Il a déploré que de nombreux bénéficiaires du RAMED n'aient pas été intégrés à l'AMO Solidarité, se retrouvant ainsi sans couverture sanitaire en raison de critères économiques trop stricts. « Beaucoup de ces personnes, atteintes de maladies chroniques, ne peuvent pas se permettre les soins coûteux dont elles ont besoin« , a-t-il souligné. Serrar a également critiqué les obstacles à la généralisation de la couverture sanitaire, pointant du doigt une tarification de référence obsolète et des médicaments onéreux malgré la suppression de la TVA. « De nombreux médicaments coûteux ne sont pas remboursables« , a-t-il déploré. Le député Haraki a insisté sur la nécessité d' »humaniser les services de santé, d'améliorer les infrastructures hospitalières, et de résoudre le manque et la mauvaise répartition des ressources humaines médicales et infirmières« . Selon lui, « le succès du chantier de la protection sociale dépend de la résolution de ces dysfonctionnements« . De son côté, Ahmed Abbadi, du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS), a mis en avant les incohérences dans les chiffres fournis par le gouvernement et l'opposition concernant les bénéficiaires du RAMED exclus de l'AMO Solidarité. Il a également soulevé la question des critères de seuil, rappelant que les bénéficiaires du RAMED ne devraient pas perdre leur couverture sanitaire avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. « Le problème n'est pas la loi elle-même, mais l'accès aux soins et la qualité des centres de santé« , a-t-il déclaré. Mustapha Ibrahimi, du Parti Justice et Développement (PJD), a pour sa part critiqué la précision excessive du seuil de 9,3264284, qui exclut certaines personnes de l'AMO Solidarité et les oblige à payer 144 dirhams. « Mesurer la pauvreté avec une telle précision est absurde« , a-t-il dit, avant de soulever des questions sur la gestion des millions de personnes exclues du système. Aussi, Ibrahimi a critiqué le retard dans l'arbitrage du chef du gouvernement concernant l'accord entre les travailleurs de la santé et le ministère, ce qui pousse les citoyens vers les cliniques privées. Selon lui, les deux tiers des 9,5 milliards de dirhams alloués auraient dû être dirigés vers le secteur public. Fatima Tamni, députée de la Fédération de la Gauche Démocratique (FGD), a, quant à elle, dénoncé les dysfonctionnements structurels du système de santé marocain. Elle a souligné l'état déplorable des hôpitaux publics et le besoin urgent d'améliorer les services. Tamni a également évoqué les difficultés rencontrées par les étudiants en médecine, mettant en garde contre les effets négatifs de la migration et de la pénurie sur la qualité de la formation. Elle a critiqué l'absence de dialogue avec le ministre de l'Enseignement supérieur et s'est interrogée sur l'avenir du secteur de la santé dans ce contexte. Elle a, en outre, souligné le mécontentement des travailleurs de la santé face au non-respect des accords de dialogue sectoriel par le gouvernement. « La signature de ces accords semble être une simple tentative d'apaiser la colère sans engagement réel« , a-t-elle affirmé. Dans ce sens, Tamni a plaidé pour un investissement accru dans les hôpitaux publics, dénonçant le partenariat avec le secteur privé qu'elle juge purement lucratif et stratégiquement erroné.