Le Conseil de la Concurrence vient de publier un avis sur le marché des assurances au Maroc, en notant plusieurs « dysfonctionnements » dans le secteur et en se réservant le droit de d'ouvrir des enquêtes sur des risques concurrentiels. L'institution n'y est pas allée de main morte pour qualifier toutes les irrégularités de ce secteur où l'assuré est considéré comme « le maillon faible ». Dans un rapport exhaustif et explosif sur l'état de la concurrence dans le marché de l'assurance au Maroc, le Conseil de la concurrence a prononcé son avis sur les pratiques constatées dans le marché de l'assurance, et ce n'est pas glorieux. L'institution dirigée par Ahmed Rahhou a indiqué se réserver le droit d'ouvrir des enquêtes sur des pratiques anticoncurrentielles « en vue de corriger les dysfonctionnements qui pourraient affecter la concurrence dans ce marché ». « S'il n'appartient pas au Conseil de la concurrence, dans le cadre du présent avis, de se prononcer sur les pratiques constatées dans le marché de l'assurance, ce qui exige un examen au cas par cas dans le cadre de procédures contradictoires, il peut toutefois être observé que l'analyse du marché de l'assurance a fait ressortir des indices sur l'existence de risques concurrentiels qui pourraient entraver le fonctionnement concurrentiel de ce marché », a noté le Conseil. L'institution a pris l'initiative de dresser ce rapport et d'émettre cet avis étant donné l'importance de ce secteur qui est en train de vivre des mutations disruptives, à la fois à l'échelle mondiale et nationale. Ces changements interviennent en majeure partie suite à l'avènement de la digitalisation et à l'utilisation de nouvelles technologies et programmes tels que la blockchain, l'intelligence artificielle, etc. qui force les acteurs de ce secteur à suivre l'évolution. Au Maroc, le secteur des assurances joue un rôle stratégique et déterminant dans le développement économique et social. Fin 2021, les placements des entreprises d'assurances ont atteint 210,3 milliards de dirhams (en valeur d'inventaire) et s'établissent à 221,3 milliards de dirhams après intégration des placements des réassureurs exclusifs. Après avoir étudié tout le secteur le Conseil de la concurrence a réalisé un grand nombre de dysfonctionnements. Il en distingue un total de 19 émis points à améliorer et auxquels il propose des solutions. Le Conseil constate ainsi de prime à bord des barrières à l'entrée relativement élevées et verrouillant doublement l'accès au marché de l'assurance, à la fois pour les entreprises d'assurance et de réassurance (EAR) que pour les intermédiaires. Il note une « invisibilité » par rapport au délai de traitement des agréments permettant la pratique des opérations d'assurances par les EAR et des conditions de sortie accordant un pouvoir discrétionnaire et disproportionné au régulateur sectoriel. Le Conseil distingue également la présence d'un système d'agrément hybride accordant un avantage concurrentiel substantiel pour les assureurs mixtes et une offre non adaptée à l'assurance inclusive. Dans le fond, le Conseil estime que l'offre assurantielle innovante est insuffisante, tout en notant la présence de segments d'assurance fragiles et un potentiel inexploité du canal de la bancassurance. Le Conseil dirigé par Ahmed Rahhou dénonce la présence de « contrats d'assurance très complexes » et un « consommateur maillon faible de la relation contractuelle avec l'assureur ». Il souligne par ailleurs la lenteur et la « lourdeur » du traitement des dossiers sinistres, sans toutefois oublier le marché de l'automobile. Il explique à ce niveau la présence d'un marché « non concurrentiel » de la RC automobile, ce qui en dit long sur les doléances et la situation vécue par les assurés qui se retrouvent avec des assureurs qui ne proposent pas ou peu de différences entre leurs offres et pour les mêmes prix. Enfin, l'institution a conclu également l'existence d'un marché « très concentré » au niveau global et pour certains produits d'assurance et un taux de commissionnement des intermédiaires fixe malgré la libéralisation, une médiation assurantielle avec une valeur ajoutée « insignifiante » et des comparateurs d'assurances « insuffisamment développés ».