Pour la majorité des Marocains, le mois du Ramadan est une période de réflexion, de partage et bien sûr de jeûne. Mais pour les non-musulmans vivant dans des pays où jeûner est la norme, voire une obligation, le Ramadan peut alors s'avérer être un lourd fardeau. Le retour au débat sur l'article 222 du Code pénal marocain, qui prescrit une peine d'emprisonnement pour tous ceux qui rompent ouvertement et publiquement le jeûne pendant le mois de Ramadan, qui divise le tissu social marocain. En effet, d'aucuns estiment que l'abolition de cet article entraine un détachement de la modernité et une mise à mort des libertés individuelles. Pour d'autres, cet article est la récompense légale à un acte qu'ils perçoivent comme atteinte à une valeur morale ou religieuse. Les demandes d'abolir l'article 222 du Code pénal, qui stipule que « quiconque est connu pour embrasser la religion islamique et qui rompt publiquement le jeûne pendant la journée du Ramadan dans un lieu public, sans excuse légitime, sera puni d'un emprisonnement d'un à six mois, et d'une amende. « Finance de 12 à 120 dirhams » reviennent face au débat public marocain. Cet ancien débat est animé souvent par deux positions différentes qui se présentent par ceux qui lient la rupture ostensible du jeûne, à la catégorie des libertés individuelles, et ceux qui considèrent que la loi ne criminalise pas la rupture du jeûne en soi, mais criminalise la rupture ostensible du jeûne dans un lieu public. L'article 222 face à la perception conservatrice Dans une interview accordée à Hespress FR, le président du Conseil local des oulémas de la préfecture de Skhirat-Témara, Lahcen Ben Brahim Sguenfle, avance que « le jeûne du mois de Ramadan est obligatoire pour tout musulman adulte sain d'esprit », poursuit-il dans son discours. Selon notre interlocuteur, la liberté individuelle « est garantie à tous ceux qui vivent sous les auspices de l'État et sous ses soins, car il est l'incubateur et le garant de ces libertés à travers les lois qui les réglementent afin qu'elles ne se transforment pas en une atteinte à la liberté et au caractère sacré d'autrui. Et tous les pays du monde protègent le sentiment général qui règne globalement chez les citoyens », poursuit-il dans son discours. Par ailleurs, les conséquences de tels appels sont des invitations « sont des invitations à la sédition, au mépris des sentiments des croyants et à une entorse au consensus de la nation, et quiconque veut violer le caractère sacré du Ramadan en rompant le jeûne, c'est son affaire tant qu'il est caché. Une personne rompt son jeûne dans sa maison, personne ne lui prête attention, car le jeûneur entend par son travail la rencontre de Dieu, et celui qui veut désobéir à Dieu. Dieu le jugera, mais s'il veut séduire le peuple dans sa religion et ses sentiments, ce n'est pas la liberté individuelle, c'est plutôt une transgression et une agression contre l'État qu'il faut repousser, car repousser la corruption prime sur apporter des intérêts », affirme-t-il. La nécessité d'une lecture progressive de l'article 222 du Code pénal marocain Ahmed Assid, intellectuel et écrivain marocain amazigh, avance que « le Code pénal marocain en général est un texte dépassé, établi en 1962 pour une société marocaine qui était en train de sortir de la tradition vers une modernisation institutionnelle et socioculturelle », déplore-t-il. De surcroît, Assid estime que « l'arsenal juridique est important, notamment la constitution, et les obligations de l'État marocain qui ont avancé dans le domaine des droits de l'homme. La constitution stipulant la suprématie des traités internationaux sur la législation nationale et stipulant le respect des libertés, et en même temps, la société elle-même a résolu de nombreux conflits liés aux libertés individuelles en faveur du développement et de la maturité malgré la vague passagère de l'islam politique qui a causé une certaine confusion temporaire, mais n'a pas réussi à prendre le contrôle de l'État et à nous ramener aux anciens systèmes de relations fermées », a-t-il souligné. D'autre part, l'intellectuel amazigh prévoit que « la société marocaine a connu une croissance remarquable du débat public sur la question des libertés, et les demandes de libération des jeunes se sont accrues, notamment avec la présence des réseaux sociaux. Tout cela fait de la question de la modification du droit pénal une question incontournable qui ne peut être évitée ou retardée, d'autant plus que le rapport sur le modèle de développement parle de « libération des énergies », ce qui n'est pas possible sans les libertés individuelles. En ce qui concerne la genèse de l'article 222 du Code pénal marocain, Assid indique que ce dernier « n'a plus lieu d'être analysé, ce n'est pas un article religieux, car l'Islam ne prévoit pas de punir ceux qui mangent pendant le Ramadan, ce n'est pas non plus un texte établi par l'Etat marocain indépendant, mais fait plutôt référence à l'étape de la protection, et il n'était pas destiné qu'à empêcher les provocations des colonialistes français envers les Marocains en mangeant pendant la journée de Ramadan, une justification qui n'a plus aucun sens aujourd'hui, comme nous ne sommes plus dans le colonialisme, et ceux qui mangent sont des Marocains et non pas des colonialistes étrangers qui provoquent le jeûne marocain » Pour conclure, Assid ajoute que l'abolition de cet article n'est pas suffisante, car la société doit être éduquée au principe de l'acceptation de la différence et du respect de l'autre. L'État reconnaît à l'individu le droit de choisir son mode de vie sans contrainte, et cela se trouve dans la religion elle-même, mais l'État et l'éducation marocaine en général tendent à la violence et à la coercition et aliènent la valeur de la liberté, et c'est pourquoi les gens ne se sentent pas heureux, qu'ils soient religieux ou autres, car le bonheur n'est pas lié au matérialisme, mais aux valeurs symboliques, dont la première est la liberté.