Le ministère marocain des Affaires étrangères a annoncé que la Libye a retiré sa candidature pour un siège au sein du Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) de l'Union africaine (UA) pour soutenir celle du Maroc. En Tunisie, pays qui a formulé le souhait de se présenter, la nouvelle dérange. Pourquoi cette élection est-elle importante pour les pays d'Afrique du Nord? Lors d'un entretien téléphonique, dimanche, entre le ministre des AE, Nasser Bourita avec la ministre libyenne des Affaires étrangères, Najla Al-Mangoush, les deux chefs de la diplomatie ont abordé la question de l'élection au Conseil Paix et sécurité de l'organisation continentale, un organe pivot de cette dernière. La Libye a ainsi décidé de retirer sa candidature pour siéger au Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine pour le mandat 2022-2025, d'y renoncer en faveur du Royaume du Maroc et de soutenir la candidature marocaine. Mieux, la Libye va formellement communiquer sa décision à la Commission de l'UA. Les décisions au sujet des candidatures au sein de cet organe font en général l'objet d'un commun accord au niveau régional et c'est dans cette idée que la Libye a décidé de se ranger derrière la candidature du Maroc pour la région Afrique du Nord. Sauf que cette décision ne semble pas arranger la Tunisie qui a également déposé sa candidature pour siéger au CPS. La candidature de la Tunisie a été annoncée par le chef de l'Etat, Kais Saied, en marge de sa participation au 21e Sommet des chefs d'Etat et de gouvernement du COMESA (Marché commun de l'Afrique orientale et australe). Dans la presse tunisienne, suite à la décision libyenne de soutenir la candidature du Maroc, les questions ont fusé pour demander quelles raisons ont poussé Tripoli à soutenir Rabat au lieu de Tunis. « Pourtant, relève-t-elle, vu les liens plus qu'étroits entre la Tunisie et la Libye on pouvait s'attendre à ce que Tripoli appuie automatiquement la candidature tunisienne ». Lors de l'annonce de la candidature de la Tunisie, le président Kais Said, avait formulé son souhait de renforcer le partenariat sud-sud et de mettre en place des partenariats forts et une intégration économique du continent, et enfin de travailler pour surmonter les difficultés en suspens. Mais dans la pratique, la Tunisie a peu de chances de faire avancer les choses au CPS, qui a un besoin urgent de réformes de l'avis de responsables et pays africains, auxquels s'ajoute le Maroc qui l'a indiqué le premier jour de son retour au sein de l'organisation africaine. « La réforme de la Commission des Affaires politiques, de la Paix et de la Sécurité ne pourra pas se concrétiser sans auparavant, réformer le Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) », avait déclaré en ce sens le chef de la diplomatie marocaine, Nasser Bourita, lors d'une conférence de presse conjointe avec le Commissaire aux Affaires Politiques, à la Paix et à la Sécurité de l'Union Africaine, Bankole Adeoye le 16 novembre à Rabat. Les points négatifs ne jouant pas en faveur de la Tunisie dans son ambition pourtant pleine de bonnes volontés, reviennent principalement à l'emprise totale qu'Alger a sur Tunis, et cette influence a également des répercussions sur la manière avec laquelle la Tunisie aborde la question du Sahara. En effet, la Tunisie a eu une position ambiguë sur le dossier du Sahara notamment lors du vote de la dernière résolution du Conseil de sécurité de l'ONU et, au vu de la présence de l'Algérie au sein au Conseil élue en 2020 pour un mandat de trois ans, et de sa position aujourd'hui officiellement et ouvertement hostile au Maroc, le CPS pourrait redevenir un terrain privilégié d'Alger pour faire passer son agenda anti-marocain, comme cela a été le cas depuis la création de l'UA qui a intégré le polisario en tant que membre sous l'influence de l'Algérie. Mais la candidature de la Tunisie et du Maroc en même temps pour briguer un siège au sein du CPS pose un autre problème, celui de la sur-représentativité de la région Afrique du Nord au sein du ce conseil où se jouent des enjeux de taille, notamment au sein du département Paix et Sécurité. Fin d'une mainmise Et c'est sur cet organe que l'Algérie lorgne, au moment où ce pays qui avait une position monopolistique dessus, a perdu son influence depuis l'élection du Nigérian, Bankole Adeoye, commissaire de l'UA aux Affaires politiques, à la Paix et à la Sécurité. Avant lui, le département, avait été dirigé exclusivement par des Algériens, à savoir, Saïd Djinnit, Ramtane Lamamra et Smaïl Chergui, et cela depuis presque 20 ans, soit depuis la création de l'Union africaine en 2002. Pour le Maroc qui a siégé au CPS pour deux ans entre 2018-2020 et qui n'a occupé aucun poste de responsabilité depuis son retour à l'Union africaine en 2017, en dépit de son travail reconnu au sein des différentes instances de l'organisation, l'objectif serait de faire avancer le sujet de la réforme pour éviter de porter atteinte à la crédibilité de l'UA et de faire face aux manipulations de l'Algérie, notamment sur le dossier du Sahara, qui est traité au niveau du CPS au sein de l'organisation continentale, d'autant plus qu'il traite avec l'ONU. Le sujet des manipulations algériennes au sein du CPS a été publiquement étalé au grand jour, notamment par le président de la Commission de l'Union africaine, Moussa Faki Mahamat, lui-même qui a dénoncé en public les pratiques non conventionnelles du diplomate algérien Smaïl Chergui qui dirigeait le département encore récemment. « Il faut en finir avec les manœuvres du commissaire Chergui qui nous mettent devant le fait accompli », avait-il affirmé. Le Maroc pourrait également mettre à contribution son expérience dans la gestion des conflits et du terrorisme ainsi que de l'instauration de la paix et en matière d'organisation et d'observation des élections, qui pourraient grandement aider à améliorer la démocratie, la sécurité, la paix ainsi que le développement en Afrique.