Face à la rupture du contrat du Gazoduc Maghreb-Europe (GME) qui traversait le Maroc par l'Algérie sur fonds de crise diplomatique liée essentiellement au dossier du Sahara, le Maroc est appelé à combler le gaz algérien par via d'autres moyens et devant lui s'offrent plusieurs opportunités. Avec l'arrêt du contrat GME qui relie le gaz algérien à l'Espagne et au Portugal à travers le Maroc, et qui le faisait profiter en échange d'une partie, le royaume perd 15 % des besoins nationaux en électricité. Des besoins qu'il doit combler en trouvant d'autres sources. « L'Algérie a pris la décision de ne pas renouveler le contrat du GME arrivé à expiration le 31 octobre Malheureusement, les responsables algériens n'ont pas cette vision d'intérêt public, que ce soit pour vis à vis de la société algérienne ou marocaine, ou encore espagnole », a estimé dans une déclaration à Hespress FR, l'économiste Omar Kettani. « Aujourd'hui le deuxième gazoduc reliant l'Espagne à l'Algérie, le Medgaz, n'a pas la capacité de compenser ou remplacer le GME qui passe par le Maroc », a-t-il relevé, en se demandant comment l'Algérie compte-elle respecter son contrat avec l'Espagne dans une situation pareille. Si l'Algérie a promis de respecter son engagement auprès de l'Espagne, du moins, pour les besoins immédiat à l'approche de l'hiver, certaines parties ont parlé de livraisons par voie maritime via des méthaniers. « Pour faire transiter le gaz par voie maritime, il faut des bateaux spéciaux et cela reviendrait probablement trop cher, c'est pas intéressant », estime l'économiste d'autant plus que le marché des méthaniers croule sous les demandes dans un contexte de crise énergétique mondiale. Mais c'est aussi une option que le Maroc a considéré pour diversifier ses sources en gaz naturel. Déjà au mois d'avril 2021, le gouvernement marocain n'a pas caché son ambition de diversification de sources énergétiques. La gaz naturel a été privilégié par le Maroc puisqu'il est l'un des moins polluant, avec 30 à 50 % d'émissions de CO2 en moins que les autres combustibles. Et les besoins du pays en termes de gaz naturel sont en hausse. Ils sont estimés à près de 5 milliards de m3 d'ici 2025. Le ministère de l'Energie, des mines et de l'environnement (MEME) avait ainsi lancé un appel à manifestation d'intérêt (AMI) pour la mise en place d'une FSRU, un unité flottante de stockage et de regazéification. Ce besoin de sécuriser de nouvelles sources de gaz naturel qui s'est déclaré en début d'année au Maroc, semblait être à la mesure du manque de sérieux et d'engagement de l'Algérie qui, quelques mois plus tard a laissé tomber le GME pour tenter de mettre le Maroc en difficulté après les revers encaissés par Alger suite à ses manœuvres pro-séparatistes dans le dossier du Sahara. La décision des autorités algériennes de ne pas reconduire l'accord sur le gazoduc GME, « n'aura, dans l'immédiate, qu'un impact insignifiant sur la plateforme du système électrique national », ont réagi dans un communiqué commun l'office des hydrocarbures et celui de l'électricité, l'ONHYM et l'ONEE. Les deux signataires affirment que d'autres options sont en cours d'études pour des alternatives durables, à moyen et long termes. Et d'ajouter que la décision algérienne était attendue, « eu égard à la nature du voisinage du Maroc ». « En prévision de cette décision, les dispositions nécessaires ont été prises pour assurer la continuité de l'alimentation du pays en électricité », assurent les deux offices marocains. Pour compenser le gaz algérien dans l'immédiat, le Maroc a en effet devant lui plusieurs choix, notamment les pays du Golfe comme l'Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis ou encore le Qatar. Mais aussi, les Etats-Unis ainsi que la Russie, deuxième producteur de gaz mondial. Le royaume a également une vision plus large dans sa stratégie énergétique tournée résolument vers les énergies renouvelables, notamment le solaire, l'éolien, qui contribuent déjà de manière significative au mix énergétique national. D'ici 2030, le Maroc pourra réduire sa dépendance énergétique en passant de 97% en 2018 à 82% grâce aux énergies vertes. Il pourrait aussi compter sur les recherches de gisements gaziers. « Apparemment il est question de deux gisements gaziers au Maroc. Il y a eu tout un tapage autour de ces découvertes en disant que ces découvertes pourraient faire du Maroc un producteur intéressant au niveau du gaz, maintenant nous sommes devant le fait accompli et la question qui se pose c'est pourquoi on ne les exploite pas? », s'est demandé Omar Kettani. Et l'économiste de se demander s'il faut des investissements lourds, ou encore la mise en place d'une infrastructure pour amener le gaz vers les centres les usines d'embouteillage ou celles destinées à l'export, indiquant que cette solution sera sur le moyen ou long terme. Sur le long terme également, le projet du gazoduc avec le Nigéria qui devrait remonter jusqu'en Europe est fortement apprécié des Etats africains. Seulement, ce projet va encore prendre du temps, et nécessite un lourd investissement estimé à 30 milliards de dollars. A la question de savoir ce que le Maroc peut faire dans l'immédiat, il sera peut-être amené à produire de l'électricité à travers le pétrole mais cela va revenir plus coûteux que le gaz, et il va falloir aussi prendre des mesures pour économiser l'électricité notamment en généralisant les ampoules LED pour l'éclairage public entre autres, estime l'économiste.