Hier mercredi et pour la première fois et depuis qu'elle existe, la Moulouya n'a pas rejoint la Méditerranée ou d'usage elle se jette. Selon les militants écologistes « ce que l'on craignait est arrivé » et cela équivaut à « une véritable catastrophe géologique » que subit de plein fouet ce bassin hydraulique de la Moulouya qui se trouve dans la partie nord-est du pays (Oriental). Le bassin hydraulique de la Moulouya s'étend sur une superficie de 74.000 km2 (soit 10% du territoire marocain) et compte cinq barrages, Mohammed V, Machraa Hammadi, Hassan II, Enjil et Arabat ainsi que plus d'une trentaine de stations de pompage. Forcément, cette infrastructure hydraulique impacte négativement le débit écologique. La Moulouya second fleuve après le Nil sur la rive sud de la Méditerranée prend sa source à la jonction du massif du Moyen et Haut Atlas. C'est le plus long oued du Royaume (520 km). Dans sa course vers ses estuaires, les sources d'alimentation de son débit écologique sont la pluviométrie, les eaux de ruissèlement du bassin versant, les lâchers de barrages particulièrement, celui de Machraa Hamadi et les résurgences (les sources d'eau). Depuis une décennie, il n'a de cesse de subir une dégradation continue qui le met en péril ainsi que ses estuaires et sa zone humide. Un banc de sable sépare désormais la Moulouya de la Méditerranée L'Agence du bassin hydraulique de la Moulouya à Oujda sollicité par Hespress.fr pour les besoins d'éclairer nos lecteurs quant à cela et après avoir promis de répondre à nos questions qu'elle a exigé d'être posées par mail, n'a, in fine, pas eu la moindre réactivité pour une quelconque explication. Aussi, c'est tout naturellement que l'on s'est tourné vers ceux qui décrient cette situation. Les eaux de la Moulouya constituent ou constituaient une ressource naturelle qui générait la vie et la biodiversité dans cette région à laquelle la mauvaise gestion des eaux risque de porter atteinte. Or, si la biodiversité favorise certains secteurs (agriculture, industrie, tourisme, eau potable...) elle le fait au détriment d'autres secteurs comme d'exemple les zones humides et la vie sauvage. « Cette mise en danger d'un écosystème classé , nous dit le militant Mohamed Benata, Ingénieur agronome, Dr en Géographie, Président de l'ESCO, membre fondateur de l'ECOLOMAN et fervent défenseur de l'environnement. est due aux projets de barrages destinés en particulier à l'irrigation agricole alimenteront en eau l'agro-business ». « Aujourd'hui il y a urgence, il s'agit ni plus ni moins de sauver le Site d'Intérêt Biologique et Ecologique (SIBE)de la Moulouya qui représente une valeur patrimoniale indéniable du fait qu'il constitue le plus grand complexe estuarien méditerranéen dans notre région », explique-t-il au micro de Hespress.fr. « Dans quelques jours du fait de la stagnation de l'eau du manque d'oxygène et de l'acidité de l'eau et autres impacts on va assister au dépérissement et à la putréfaction de la faune et la flore c'est malheureux, sans compter les mauvaises odeurs autres inconvénients ». L'eau du débit écologique de la Moulouya permettait à l'oued d'être en vie Mohamed Benata impute cet état de faits aux infrastructures hydrauliques et particulièrement aux stations de pompage et le reproche à l'autorité qui défendait le principe d'un « grand projet ouvrant des perspectives prometteuses pour le développement de l'agriculture de rive gauche de la Moulouya qui souffre de conditions climatiques difficiles et enregistre un manque en eau. Cela va permettre de récupérer l'eau qui se perdait en mer et l'utiliser pour développer l'agriculture dans cette zone ». Et Benata d'enrager, « L'eau du débit écologique ne se perd pas en mer, c'est bien le contraire qui se produit, et c'est cette eau qui permet au fleuve d'être toujours en vie. Affirmer que l'eau se perd est un non-sens », martèle l'Ingénieur agronome et Dr en Géographie. Malheureusement l'on constate pour ce site écologique de la Moulouya force est de constater une utilisation intense du débit du fleuve pour l'irrigation des terrains de...golf de la station de Saidia dira encore notre interlocuteur. D'autres éléments confirme le scepticisme des défenseurs de la nature quant aux intentions des autorités. En plus de projeter des infrastructures entre Mechraa Hammadi et l'embouchure de la Moulouya, il est également question plus que jamais de la surélévation du barrage Mohammed V. Ce projet se traduira automatiquement par une baisse du volume des lâchers qui seront retenus au niveau de ce barrage pour se diriger vers d'autres usages et résulta la Moulouya recevra encore moins d'eaux dans sa dernière partie. Mohamed Benata en a également gros sur le cœur quant à la pertinence des investissements des barrages qui (1 milliard 600 millions de DH pour un ouvrage) « Est-il justifié d'investir autant d'argent pour une œuvre qui ne sera utilisé qu'à 26% de sa capacité ? », s'interroge-t-il. Que devient le débit écologique légal (loi 12-03) du SIBE de la Moulouya ? », poursuit Benata. Il aurait fallu pour trancher entre besoins de l'agriculture gourmande en eau et la défense de l'environnement une étude d'impact sur l'environnement comme le stipule la dite loi 12-03. Or, cette étude n'a jamais été réalisée !