La récente attaque visant des routiers marocains au Mali par un groupe non identifié cagoulé et en plein jour, fait ressurgir plusieurs interrogations. L'analyse de faits indique que l'affaire a une portée stratégique et politique. A qui profite le crime? L'affaire de l'assassinat de deux routiers marocains (et un troisième blessé) a choqué dans le royaume. Elle pose plusieurs constats dont le premier est qu'elle a visé des civils, et non pas des groupes armés ce qui fait que la piste terroriste est éliminée. Ces Marocains tués n'ont pas été pillés, ils ont été tués dans un axe stratégique du commerce marocain en Afrique. De toute évidence, cet acte doit être placé dans son contexte régional, géopolitique et temporel, indique dans une déclaration à Hespress FR, le politologue et spécialiste de l'Afrique, Mouassaoui Ajlaoui. En effet, il intervient après que l'Algérie ait rompu ses relations diplomatiques avec le Maroc en le menaçant ouvertement, en l'accusant à tort et en refusant la main tendue par le Roi Mohammed VI quelques jour auparavant. Cet acte intervient aussi, à deux mois avant les événements d'El Guerguerat il y a un an, lorsque les milices du polisario sont sorties des camps de Tindouf en Algérie et sont entrées dans la zone tampon et franchi le mur de défense marocain pour s'attaquer à plus de 200 camionneurs marocains qui livraient des marchandises en Mauritanie. Les milices séparatistes avaient bloqué ce passage pendant plus de 25 jours, point de départ des routes commerciales reliant le Maroc aux pays subsahariens et de l'Afrique de l'Ouest. La Mauritanie, principal pays affecté dans l'histoire avait officiellement protesté. L'Algérie avait envoyé quelques jours plus tard, deux avions chargés des mêmes marchandises empêchées d'entrer en Mauritanie, dans une reconnaissance explicite de son implication dans cette affaire. En conséquence, le Maroc avait rétabli le passage et avait sécurisé les routes, comblé les brèches par lesquelles les milices du polisario se sont introduites, ne laissant plus aucune possibilité à ces dernières d'attaquer les routiers. Pour placer les faits dans leur contexte, Moussaoui Ajlaoui, a estimé qu'il fallait déjà déterminer la route empruntée par les routiers. Le commerce extérieur du Maroc visé « Certains ont parlé du Sénégal, en expliquant que les routiers passaient par le Sénégal, ce n'est pas le cas. Il n'y a pas de route entre le Sénégal et le Mali que ces camionneurs peuvent prendre car ces routes sont destinées au voitures légères et eux, sont des poids lourds », a-t-il affirmé excluant le Sénégal de l'équation. « La seule route terrestre qui relie le Maroc avec l'Afrique subsaharienne c'est El Guerguerat, Nouakchott puis Bamako », a-t-il énuméré en expliquant que toute la politique de commerce extérieur du Maroc vers les pays de l'Afrique subsharienne, de l'Afrique de l'Ouest, passe par ce tronçon. Pour lui, cet acte prémédité a une explication stratégique puisqu' »une fois que tronçon est touché, c'est l'ensemble du commerce avec l'Afrique subsaharienne qui va être déséquilibré ». « Pourquoi attaque-t-on des civils? Ce n'est pas la première fois qu'on attaque des camions sur ce tronçon là », reconnaissant qu'il y a souvent des agressions, des actes de piraterie, mais selon lui, il s'agit de « la première fois qu'on assassine des chauffeurs de camions, des civils, sans voler leurs marchandises. Cela veut dire que l'objectif de l'attaque n'était pas le vol mais clairement le meurtre ». Pour notre M. Ajlaoui, l'une des grandes explications de cette affaire c'est que ceux qui ont commandité cette attaque et qui l'ont menée, voulaient s'en prendre au commerce extérieur du Maroc dans sa profondeur africaine. Comme il ne pouvaient plus s'attaquer au tronçon El Guerguerat – Nouakchott, ils ont tenté d'attaquer le deuxième point névralgique de la route reliant le Maroc aux autres africains.