Si bon nombre de Marocains plutôt aisés ont l'habitude de prendre leur quartiers d'été sur les plages espagnoles les plus prisés pour leurs vacances, la crise diplomatique entre le Maroc et l'Espagne pourrait avoir des répercussions sur cette tendance. Le manque a gagné côté pour l'économie espagnole pourrait se chiffrer à plusieurs centaines de millions d'euros. En 2019, plus de 900.000 de nos compatriotes avaient visité l'Espagne selon l'Office du tourisme de notre voisin du nord, soit une part de 20% des Marocains qui passent leurs vacances à l'étranger. Il faut dire que la proximité géographique ainsi que les centaines de kilomètres de plages de la Costa Del Sol sont des arguments à même de convaincre les Marocains. Avant la crise du Covid-19, la balance touristique avait penché du côté espagnol puisque 814.069 visiteurs espagnols avaient visité notre pays, soit un ratio de presque 10 en notre défaveur. Mais voilà, la pandémie de coronavirus et une brouille diplomatique entre les deux pays – suite à l'affaire Brahim Ghali – sont passés par par-là et les appels au boycott de la destination Espagne se font de plus en plus entendre au Maroc. Un boycott qui pourrait avoir des conséquences non-négligeables pour l'économie de la péninsule ibérique. En effet, selon les chiffres de 2019, les dépenses touristiques des 900.000 Marocains avaient atteint pas moins de 5,2 milliards de dirhams. De plus, une écrasante majorité de touristes qui se rendent chez le voisin du nord le font en voiture, notamment en raison de la proximité géographique, ce qui implique une dépense journalière moyenne très élevée. En effet, la durée moyenne de séjour d'un ménage marocain en Espagne est de 6 nuits avec un budget journalier (logement, nourriture, loisirs, transports...) est de 150 euros (près de 1.600 dirhams). Pour leur part, les touristes espagnols ne dépense « que » 4,1 milliards de DH durant leur séjour marocain, selon des chiffres datant de 2018. Les pertes économiques ne s'arrêtent pas aux seuls vacanciers. Le secteur immobilier pourrait également en pâtir puisque les Marocains non-résidents ont tendance à investir dans des appartement en Espagne. En 2020, en pleine période de crise sanitaire, ils étaient 3.166 à acquérir un bien sur les terres espagnoles, un chiffre en baisse de 19% par rapport à 2019. Ce chiffres représente tout de même 6,74% des transactions réalisées par les étrangers en Espagne. Le Maroc est désormais le 4e acheteur étranger dans le secteur immobilier espagnol, après le Royaume-Uni (13,05%), la France (8,16%) et l'Allemagne (7,75%). Et avec la crise diplomatique ouverte entre les deux pays, le taux des acquisitions devrait également chuter. Au rayon des pertes, l'annulation par le Maroc de l'Opération Marhaba cette année, excluant de fait les ports espagnols, a également causé de grosses pertes. Ainsi, des entreprises espagnoles ont confirmé que la décision du Maroc d'exclure les ports espagnols de cette opération d'envergure qui permet à des millions de Marocains de rentrer au pays « a eu un impact économique grave », en particulier dans les zones par lesquelles transite la communauté marocaine dont le nombre s'élève à près de trois millions de personnes. Les pertes économiques des entreprises espagnoles touchées par cette décision ont été estimées à 500 millions d'euros par le quotidien espagnol « El Mundo« , en particulier dans les zones qui connaissent une dynamique suite justement à l'Opération Marhaba. Cela impactera fortement les ports d'Algésiras, Tarifa, Malaga, Motril, Almeria, Alicante, Sebta et Melilla. Ce boycott de la destination Espagne pourrait bien bénéficier aux professionnels du tourisme au Maroc. D'ores et déjà les hôtels des villes côtières, destinations de choix des touristes nationaux, annoncent un taux d'occupation de 90% pour le mois de juillet.