La crise de l'eau en Algérie est un problème que la population connait déjà depuis de nombreuses années avec des coupures très récurrentes. Fait inédit, cette année, en plus d'une faible pluviométrie, le pays est confronté à une annonce officielle du pouvoir, qui confirme une situation de stress hydrique jusqu'ici jamais avouée. Le pays devra-t-il importer de l'eau? Alors qu'en février, la Société des Eaux et de l'Assainissement d'Alger (SEAAL) avait déjà annoncé des coupures d'une durée indéterminée dans plusieurs communes d'Alger dès le mois de mars et avait évoqué « un niveau de consommation en eau exceptionnellement élevé », la nouvelle s'est confirmée début du mois courant. En effet, la SEAAL a fait état de perturbations en alimentation en eau potable, et la nouvelle a été confirmée par la wilayas d'Alger le lendemain, samedi 20 mars, annonçant des coupures pendant 5 jours et ce de 07h00 à 19h00 de dimanche à mercredi dans pas moins de 20 communes de la région. Officiellement, la wilaya d'Alger a évoqué un arrêt revenant aux travaux de la station dessalement de d'El Hamma, mais le problème est plus profond et ne touche pas uniquement la wilaya d'Alger, c'est tout le pays qui est menacé de stress hydrique mis à part les wilayas de l'Est. Si les coupures d'eau potable sont monnaie courante en Algérie -où des régions ne sont autorisées à utiliser l'eau potable qu'à des heure précises depuis de nombreuses années déjà-, elles n'ont cependant jamais été justifiées, ou du moins le motif de la pénurie n'a jamais été mentionné. Cette fois, le pouvoir l'a officiellement annoncé, l'eau sera désormais rationnée dans ce pays de 42 millions d'habitants, et les excuses douteuses invoquant des « maintenances » ou encore des opérations de « nettoyage » (qui avaient pour habitude d'arriver au même moment partout dans le pays) n'ont plus été sorties. Lundi, le directeur général de l'Algérienne des Eaux (ADE), Hocine Zair, a annoncé des coupures d'eau qui auront lieu, un jour sur deux dans plusieurs régions du pays. En cause, la pénurie en eau qui frappe le pays due aux faibles précipitations. Il annonce une situation qui va s'installer dans la durée, une tendance qui frappera l'Algérie pendant les prochaines années. Il ne s'agira pas de coupures partielles de quelques heures pendant la journée, au contraire, l'eau ne sera distribuée seulement pendant des heures précises qui seront plafonnées entre 2 heures et 4 heures par jour. Sur les ondes de la radio nationale algériennes, Hocine Zair, a affirmé qu' »une réduction des plages horaires de distribution s'impose, sauf reconstruction et atteinte d'une situation améliorée par des précipitations jusqu'à mai prochain », ajoutant qu' »il y va de notre sécurité alimentaire de préserver cette denrée vitale ». Plusieurs barrages sont en dessous du niveau de remplissage normal, tandis que d'autres sont à sec, et les stations de dessalement de l'eau de mer qui aident normalement à contrebalancer le stress hydrique subissent des pannes récurrentes à l'instar de celle d'El Hamma qui fourni la capitale. Selon le directeur général de l'ADE, le taux moyen de remplissage des barrages dans le pays atteint les 44%. Ces barrages représentent 40% du volume d'eau potable utilisée en Algérie. Et pour l'instant, aucune solution concrète et durable n'est apportée par le pouvoir, mis à part le pompage de certaines rivières pour les injecter dans des barrages et une distribution plus large en eau dans les wilayas n'ayant pas de réel problème de pénurie pour sauver certaines communes. Face à cette situation, la gestion des ressources en eau devient un nouveau sujet favorisant la colère des Algériens qui ont repris en février leurs manifestations du Hirak, le mouvement nationale anti-système revendiquant la chute du pouvoir et la fin de l'immixtion des militaires dans les affaires publiques. La gestion de l'eau a également été au centre du récent remaniement gouvernemental opéré par le président Abdelmadjid Tebboune qui a fait sauter le ministre des Ressources en eau Arezki Beraki fin février. Ce dernier avait annoncé en décembre que le gouvernement algérien n'avait pas l'intention de renouveler son contrat de gestion de l'eau à Alger et Tipaza avec le géant français Suez à la faveur d'une gestion locale par les autorités algériennes. Alors que le contrat doit prendre fin en août 2021 après que la gestion de l'eau ait été assurée par le groupe français depuis 2005, la question du renouvellement de l'accord est aujourd'hui toujours sur la table, selon le nouveau ministre, Kamel Mihoubi. L'Algérie traverse une crise profonde à tous les niveaux, mais surtout économique et sociale, avec une rupture de la confiance entre le peuple et le pouvoir alimentée par de nombreuses années de mensonges et d'opacité sur la réelle situation dans le pays. En outre, la crise continue de s'aggraver à cause d'une hausse des prix des denrées alimentaires de base, notamment de l'huile de table, la viande blanche, les pommes de terre, les pâtes, le lait, l'eau minérale etc, à l'approche du mois de Ramadan.