Le Parlement tunisien débattait et votait, mardi 26 janvier, la question de la confiance au nouveau gouvernement remanié par le Premier ministre Hichem Mechichi, dans un pays sous tensions depuis plusieurs jours. Des centaines de manifestants ont réclamé que le pouvoir leur revienne devant le Parlement. Jour de vote sous tensions en Tunisie alors que le pays traverse depuis une semaine une série de nuits agitées, où des jeunes se sont organisés pour brûler des pneus et dénoncer la situation économique du pays. Ces manifestations nocturnes ont donné lieu à des altercations avec les forces de l'ordre. Mardi, les députés se réunissaient à l'Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) pour valider les 11 ministrables choisis par le chef du gouvernement Hichem Mechichi dans le cadre du remaniement ministériel annoncé le 16 janvier. Mais la tâche semble perdue d'avance puisque le président tunisien et le chef du gouvernement ne sont pas sur la même longueur d'onde, en plus d'une rivalité avec le chef du Parlement. Les profondes divisions des trois têtes au pouvoir en Tunisie semblent s'inscrire dans le temps et vont continuer à alimenter la crise politique dans le pays. Les ministres sont tenus d'obtenir la majorité absolue soit 109 voix ou plus lors d'une séance plénière, pour faire partie du futur gouvernement. Le vote de confiance est nominatif, chaque ministre doit être approuvé de façon individuelle. Pendant ce temps, des centaines de manifestants, tous âges confondus mais majoritairement jeunes, se sont rassemblés près du siège du Parlement pour réclamer justice sociale et appeler à ce que le pouvoir retourne entre les mains de la rue, sous un très important dispositif policier. Le chef du Parlement, Rached Ghannouni, qui est également le chef de file du Mouvement Ennahda, un parti d'inspiration islamiste, a été vivement critiqué par les manifestants, qui ont réclamé son départ. Les manifestations ont rapidement tourné à l'affrontement avec les forces de l'ordre. Ces manifestations ont provoqué des réactions chez les politiques en Tunisie, notamment celle de Rached Ghannouchi qui estimé que les jeunes manifestants sont des victimes de l'échec du système éducatif et social. Plusieurs partis ont également appelé à la levée du dispositif policier devant l'ARP. De son côté, la présidente du Bloc PDL, Abir Moussi, a critiqué les partis qui ont apporté leur soutien aux manifestations en affirmant qu'il ne s'agit que d'un soutien verbal mais qu'ils ne faisaient rien de concret pour répondre aux revendications. Elle a par ailleurs annoncé que son bloc n'allait pas voter en faveur des nouveaux ministres. Mardi matin, le chef d'Etat tunisien Kais Saied a rappelé son opposition à la nouvelle équipe gouvernementale proposée par Hichem Mechichi qui ne l'a pas consulté, renforçant encore plus les tensions entre lui et l'équipe gouvernementale. Dans un communiqué de la présidence tunisienne, Kais Saied a déclaré que « certains noms (de ministres) proposés sont impliqués dans des affaires de conflit d'intérêts ou dans des affaires de corruption (…) ces candidats ne pourraient pas prêter serment ». « Comment peut-on se permettre d'écarter l'ancien chef du gouvernement (Elyès Fakhfakh) pour conflit d'intérêts et de proposer ensuite des noms suspectés de corruption et de conflit d'intérêts », s'est il interrogé lors d'une réunion du Conseil de sécurité nationale, dédiée à la situation sanitaire ainsi qu'à la crise politique que traverse le pays. Le président tunisien n'aurait pas apprécié le fait d'être écarté du processus de sélection des futurs ministrables. Le chef du gouvernement a fait un clin d'oeil à ce sujet lors d'un discours où il a affirmé avoir agi selon ses prérogatives.