Chaque pays touché par le Coronavirus, a vu ses statistiques en termes de cas confirmés monter en flèche, pour ensuite s'inscrire dans une courbe descendante, dans un phénomène que les experts appellent un « pic ». Cela dit, et grâce à l'expérience chinoise, où le virus est apparu pour la première fois en décembre 2019, le confinement s'est avéré non seulement la solution pour lutter contre la propagation du virus mais aussi pour contrôler la courbe du pic. A ce sujet, Hespress Fr s'est entretenu avec le professeur Moulay Mustapha Ennaji, virologue et directeur du laboratoire de virologie à l'Université Hassan II de Casablanca, qui nous a fourni des explications sur ce fameux « pic » et les moyens de le contrôler. Selon Pr Ennaji, « normalement, le pic, veut dire la dissémination du virus. C'est-à-dire comment un individu porteur du virus, va le disséminer à travers la population. En quelque sorte, il y a un facteur de transmission qu'on appelle le R, qui est le taux de dissémination ». Pour le Coronavirus, notre interlocuteur nous explique que « chaque individu porteur du virus, va le disséminer à près de 2,8 autres individus. C'est-à-dire, que si on a 100 individus porteurs du virus, il sera transmis à 300 autres personnes et ces 300 vont le disséminer et ainsi de suite, jusqu'à atteindre un taux et à partir de là, ça commence à fléchir et il n'y aura plus de dissémination ». Et c'est là où le confinement rentre en ligne de compte, poursuit Pr Ennaji. « Lorsqu'on a demandé aux citoyens d'entrer en confinement, l'objectif c'est de limiter cette dissémination. Prenons le cas d'une personne qui porte le virus, il rentre chez sa famille, il va le disséminer uniquement au niveau de son foyer », analyse-t-il. Et en quelque sorte, et avec les moyens dont dispose le Maroc, « les autorités seront en mesure d'intervenir au niveau de ce petit foyer familial. Par contre, si cet individu sort au-delà de son foyer, il va continuer de le disséminer à chaque fois qu'il rencontrera quelqu'un », explique le virologue, soulignant que « c'est là où la situation va empirer». Et c'est là aussi où le professeur Ennaji insiste sur la nécessité (et l'importance!) du confinement imposé par les autorités du Royaume. « Les personnes qui seront en contact avec le virus vont commencer à apparaître au bout de deux semaines. Elles risquent de le disséminer dans leur entourage, et on va arriver en quelque sorte à ce pic. Et à partir de ce moment-là, la fréquence des personnes contaminées va descendre. Et c'est ça le pic dont en parle, c'est-à-dire le taux de transmission va commencer à fléchir » explique-t-il. En plus simple, « le pic, veut dire que le taux de fréquentation monte, et c'est exponentiel. Ca va monter et monter jusqu'à atteindre le pic. Et à partir de ce pic-là, ça commence à fléchir. Parce que l'infection est montante », dit-il. Tout en saluant les efforts déployés par les autorités du Royaume pour lutter contre la propagation du Coronavirus dans le pays, le virologue est revenu sur le confinement, et ce qui s'est passé en Chine, en Italie, aux USA ou encore en France. « En Chine ils ont compris tout de suite en mettant en quarantaine la ville de Wuhan. Et aujourd'hui, leur stratégie a très bien marché et la ville a repris son activité. Par contre ce qui s'est passé en Italie, ils n'ont pas contrôlé, et les personnes infectées ont commencé à bouger un peu partout et ont contaminé un nombre important d'individus. Il y en a même qui ont pensé que, pour se sauver de la maladie, ils doivent aller à la campagne, et de ce fait, ils ont contaminé les gens de la campagne, et la dissémination a pris de l'ampleur », relève-t-il. Interrogé sur la durée d'incubation, le virologue précise qu'elle varie d'une personne à une autre. « Normalement il y a un facteur qui rentre en ligne de compte, c'est l'immunité de la personne. Le virus peut apparaître à partir d'un ou deux jours à 14 jours. Normalement, de deux à 14 jours, si la personne est positive on va le découvrir. Mais aujourd'hui, les autorités imposent un confinement de 20 jours, parce qu'elles donnent 5 jours de plus, par précaution, on ne sait jamais », explique-t-il. De même, Pr Ennaji souligne « qu'il y a des personnes asymptomatiques. Ça veut dire qu'elles portent le virus mais ne montrent pas en quelque sorte les signes. Et ces individus peuvent être dangereux en termes de dissémination». Par ailleurs, le virologue précise que « le taux d'incubation est de 15 jours en général, mais en principe on parle de quarantaine. Et les gens ne font pas la différence entre l'isolement et le confinement. L'isolement est lorsque quelqu'un est porteur de virus, et on le met en isolement pour qu'il ne contamine pas les autres. Le confinement, c'est ce que nous vivons aujourd'hui. C'est-à-dire de rester chez soi. Et la notion de quarantaine avant, c'était de mettre les personnes en isolement pendant 40 jours. Mais pour le Coronavirus, la quarantaine est de 20 jours ». Pour conclure son propos, Pr Ennaji implore les citoyens de respecter les règles du confinement, de respecter les consignes qui leur sont données pour le bien de tous et pour protéger la population. Il appelle pareillement les citoyens à ne pas oublier de faire des dons de sang. « Actuellement, il y a beaucoup de personnes qui ont en besoins et je précise qu'il y a aucun risque. Les gens peuvent y aller, il y a la distance de sécurité et de plus le virus ne se trouve pas dans le sang », assure-t-il.