S'achemine-t-on vers une levée du confinement à partir du 20 mai ? Avec le coronavirus, le gouvernement est confronté à une équation à multiples inconnues, d'une très grande complexité, aux enjeux sanitaires et économiques considérables. Pour lever le confinement à partir du 20 mai, tout dépendra des certitudes et des doutes à lever. Lesquels ? On gardera en mémoire que ce fut le jeudi 7 mai 2020. Ce jour-là, lors de son intervention télévisée, Saad Dine El Otmani qui s'est dit optimiste quant au contrôle de l'évolution de la situation pandémique du Royaume, a avoué que «le déconfinement constitue une opération plus difficile que l'entrée en quarantaine». Surtout, le chef du gouvernement avertissait que même si l'Etat n'a pas encore de vision ou de plan lié au déconfinement, il est en train d'étudier un ensemble de scénarios pour l'après 20 mai. «Dans les prochaines semaines, plusieurs réunions seront programmées sur la suspension de la quarantaine». Intervenant le lendemain vendredi sur la télévision nationale Al Aoula, le ministre de la Santé n'a pas laissé entrevoir une quelconque levée du confinement à partir du 20 mai. Khalid Ait Taleb, a averti également à l'instar d'El Otmani que ce n'est pas fini et que « sortir du confinement est plus dur que d'y entrer » et qu'en plus, après une stabilisation du nombre de nouveaux cas, le pays enregistre à nouveau une hausse. Selon lui, « trois conditions sont à remplir pour amorcer le déconfinement, particulièrement la stabilité de la situation épidémiologique, la tendance à la baisse des nouveaux cas de contamination et l'inflexion de l'indicateur de propagation du virus sous la valeur 1 » et que « nous ne sommes pas à l'abri en dépit des mesures prises ». Et d'ajouter que toute précipitation ou démarche non calculée « peut coûter cher ». Le ministre lâchera tout de même du lest comme pour remonter le moral de ceux qui pensent que l'on s'achemine inéluctablement vers une levée du confinement. Si déconfinement il y a, il sera forcément « progressif », dit-il. C'est dire que les questions de ses modalités se posent dès maintenant au pouvoir exécutif. Quand, comment, pour qui, à quel rythme, quelles précautions? Avec quels objectifs précis et quels risques ? Jusque-là, une seule certitude : le gouvernement travaille sur plusieurs scenarii avec l'aide de spécialistes de différentes disciplines. La direction de l'épidémiologie et de lutte contre les maladies (DELM) dirigée par Mohamed El Youbi a proposé une feuille de route pour la levée du confinement, instauré au Maroc depuis le 20 mars et dont la fin est prévue le 20 mai. Ledit département a tenu à préciser que ce document daté du 5 mai et qui a fuité au courant de la journée du 7 mai, élaboré dans le cadre de la lutte contre le coronavirus, n'est pas officiel et qu'il ne peut être attribué au ministère de la Santé. Dans son document de 36 pages, la DELM propose plusieurs scénarios portant sur la fin du confinement au Maroc. Lesdites propositions soulignent les différentes décisions actées par le gouvernement pour endiguer la pandémie du coronavirus. Retombées du confinement La DELM soutient que grâce aux mesures d'urgence adoptées par l'Etat, entre 300.000 et 500.000 cas de contamination ainsi que 9000 à 15.000 décès ont pu être évités. Ces chiffres alarmants correspondent à un scénario basé sur l'hypothèse d'un taux de mortalité de 3% au 30 avril et d'un taux de contamination (R0) supérieur ou égale à 2. Il faut dire que le R0 du Royaume a fortement baissé dans certaines provinces du pays. Toutefois, même si la moyenne nationale s'établit aujourd'hui à 1,01, celle d'autres régions, notamment Casablanca-Settat, reste encore trop élevée. En effet, la métropole économique est la ville la plus touchée par le coronavirus, comptant plus de 1610 contaminations. L'ébauche de la DELM prévoit que les infections augmentent jusqu'à 6 400 cas dans le Maroc d'ici le 20 mai, avant de commencer à diminuer quotidiennement. Pour rappel, le Maroc franchit la barre des 6.000 cas pour atteindre un nombre total de cas de contamination de 6.038, ce dimanche 10 mai à 10 heures. Fin du confinement La feuille de route de la DELM recommande que le confinement prenne fin le 20 mai, date qui marque également la fin de l'état d'urgence sanitaire (sauf prolongation). La direction de l'épidémiologie explique que si d'ici cette date butoir le R0 descend sous le seuil de 1 contamination pour une personne infectée, le royaume aurait dépassé le pic de la pandémie sans atteindre sa phase 3, et la recommandation susmentionnée serait retenue afin de relancer l'économie nationale. Le document évoque également les impacts économiques, sociaux et sanitaires auxquels le pays devrait faire face si l'isolement obligatoire venait à être prolongé au-delà du 20 mai. Déconfinement progressif : certitudes et doutes à lever La direction de l'épidémiologie et de lutte contre les maladies envisage deux scénarios pour lever le confinement du Royaume. Le premier souligne que si les clusters industriels et familiaux sont maitrisés, la fin de l'isolement obligatoire pourrait avoir lieu «entre le 16 et le 22 mai», avec la persistance de quelques rares cas sporadiques «entre 10 et 20» dans l'ensemble du pays. Le deuxième scénario prévoit que le virus continue de se propager dans certaines régions limitées ou qu'il se réactive de manière saisonnière comme la grippe. Dans les deux cas, «la résurgence de l'épidémie après la levée du confinement reste possible», prévient la direction pilotée par Mohamed El Youbi. La feuille de route suggère aussi que le maintien «d'un confinement strict jusqu'à l'extinction des nouveaux cas est impossible» et que «la sortie totale et brutale du confinement constitue un risque élevé de déclenchement d'une deuxième vague» de la pandémie. Par conséquent, la direction de l'épidémiologie et de lutte contre les maladies recommande qu'avec la levée du confinement, le système de santé s'adapte à la situation en maintenant des niveaux élevés de vigilance. Lire aussi : Coronavirus : Le Maroc dépasse les 6.000 cas ce dimanche (10h00)