Depuis l'apparition de l'épidémie du Coronavirus au Maroc le 2 mars courant, et la hausse du bilan national à 225 cas confirmés, le Maroc a pris plusieurs mesures radicales pour lutter contre l'épidémie et un élan de solidarité a été observé à travers le pays. Un fonds a ainsi été créé pour lutter contre l'épidémie du Covid-19 sur instructions royales, et a récolté pas moins de 23 milliards de dirhams. Des campagnes de sensibilisation ont également été menées notamment par le biais des chaînes radio et TV nationales. Cela dit, des absents ont en outre été repérés dans la crise sanitaire que vit le Royaume actuellement. Il s'agit de nos partis politiques, dont aucune action n'a été observée à ce jour. Alors qu'ils devaient se préparer pour les élections de 2021, nos partis politiques ont été pris au dépourvu par le Covid-19, et ont préféré, apparemment, se confiner à leur tour. Et s'ils venaient à contribuer pour lutter et prévenir contre le Coronavirus, quel serait donc le rôle qu'ils auraient à jouer. Interrogé sur ce point, Abdelhamid Benkhattab, professeur en science politique à la faculté de droit Agdal-Rabat s'est d'abord penché sur le volet financier. Il s'est donc demandé « est-ce que les partis politiques peuvent aussi collecter des fonds et aider les sinistrés du Coronavirus ? ». En réponse, il estime que « les partis politiques ne disposent pas d'une formule quelconque pour le faire. Pour la simple raison qu'ils ne sont pas riches et n'ont pas un fonds de roulement qui leur permet d'aider les autres ». Mais en contrepartie, souligne-t-il, les partis politiques peuvent aider dans ses circonstances à travers la mobilisation de leurs partisans, pour d'abord essayer de sensibiliser et informer les citoyens sur le danger de cette épidémie, mais aussi sur la manière de se prévenir contre le virus. « Les partis politiques peuvent donc agir en mobilisant les gens, notamment leurs partisans pour mieux activer aussi cette solidarité sociale au quotidien. Donc ils ont un rôle à jouer dans cette crise, mais qui n'est pas un rôle financier » indique-t-il. Pour ce professeur en sciences politiques, ce rôle financier est de « l'apanage de l'Etat, des banques, mais aussi des philanthropes qui ont assez d'argent et qui peuvent justement aider les personnes vulnérables ». Toutefois, les partis politiques reçoivent chaque année des subventions de la part de l'Etat. Pourquoi ne pas en dédier une partie au fonds de lutte contre l'épidémie du Covid-19, comme contribution de leur part, surtout et à en croire le dernier rapport de la Cour des comptes, les ressources financières des 34 partis politiques marocains ont atteint en 2018 un total de 120 millions DH, dont 66 millions octroyés par l'Etat tandis que le reste de leurs ressources est obtenu par le biais des cotisations des membres et des dons de particuliers. En réponse à cette question, Benkhattab avance que « les subventions octroyées par l'Etat aux partis politiques ne sont pas substantielles qui permettraient à ces derniers de faire des dons ou de faire quoi que ce soit. C'est-à-dire que ce n'est pas là une richesse ou une rente quelconque qui permettraient aux partis politiques de les partager ». Il poursuit ainsi que « les subventions de l'Etat sont un droit, et c'est du droit des partis politiques de recevoir les fonds publics, puisqu'il est prévu par la loi que l'Etat doit subventionner les partis politiques à hauteur d'un seuil bien déterminé. Donc c'est un droit qui leur appartient », appuie-t-il. Or, le problème qui se pose ici, soulève Benkhattab, est purement juridique, notamment pour les entreprises publiques, mais aussi les institutions publiques qui reçoivent de l'argent du contribuable, c'est-à-dire de l'argent qui émane des subventions directes de l'Etat. « Je crois que là, il y a un problème juridique, puisque ses subventions ne sont pas destinées à être ré-allouées autre part sauf pour faire fonctionner les services concernés. Et les institutions publiques ou encore les partis politiques qui veulent faire des dons au fonds de lutte contre l'épidémie, doivent le faire dans un cadre autre que celui qu'on applique actuellement puisqu'il s'agit de l'argent des contribuables qui leur est juridiquement affecté », indique le politologue. Notre interlocuteur poursuit son analyse en expliquant que « ces institutions ne doivent pas donner l'argent des contribuables. Et s'abstenir de recevoir ses subventions n'est pas une formule juridique pour la simple et unique raison et que vous avez un droit et que vous bénéficiez de ce droit. S'abstenir de le recevoir devient un déni de droit, c'est-à-dire que vous déniez votre droit lui-même et ça peut avoir des répercussions néfastes ». Cependant, Benkhattab estime que les partis politiques peuvent contribuer et aider dans la crise sanitaire actuelle due au Coronavirus à travers des actions palpables sur le terrain. Et à titre informatif, conclut Benkhattabn « les partis politiques sont eux aussi formés par des individus comme nous qui ne doivent pas franchir l'interdiction de sortir qui nous frappe actuellement. Mais ils peuvent tout de même, à travers leurs réseaux sociaux ou leur réseau de partisans et de sympathisants, apporter un soutien mais aussi leur contribution pour éradiquer ce fléau».