Les cinq candidats à la présidentielle du 12 décembre en Algérie, qui ont participé vendredi soir à un débat télévisé inédit, se sont efforcés de défendre leurs programmes en restant sur des généralités dans un format très contrôlé. D'abord interrogés par des journalistes sur les questions politiques, notamment sur les pratiques qui ont conduit à une crise sans précédent, les candidats se sont contentés de répondre par des lieux communs. Sans doute, le format étroit du débat -- chaque prétendant, debout derrière des pupitres transparents, devant répondre à son tour en deux minutes chrono -- ne favorisait-il pas des échanges productifs. Tous ont essayé de se proclamer proches du "Hirak", le mouvement de contestation qui secoue l'Algérie depuis le 22 février dernier qui rejette massivement le scrutin pour lequel ils sont candidats. Pendant un exercice qui a duré trois heures, les cinq prétendants -- Ali Benflis, Abdelmajid Tebboune, Azzedine Mihoubi, Abdelaziz Belaid et Abdelkader Bengrina -- ont utilisé leurs deux minutes strictement chronométrées pour répliquer à 13 questions relatives notamment à la situation politique, économique et sociale du pays. Ils ont terminé en fin de soirée par un plaidoyer de trois minutes sur les aspirations du peuple algérien. Mais là encore, ils sont restés dans des généralités. Si le ton est resté très courtois, il n'y a eu aucun débat contradictoire entre les cinq hommes, ni d'échanges directs entre eux, comme beaucoup de téléspectateurs l'espéraient. Le panel a répondu très sagement devant un auditoire tout aussi sage dans la salle. Quatre journalistes étaient chargés de poser les questions. Organisé par l'Autorité nationale indépendante des élections (Anie), ce premier débat présidentiel télévisé dans l'Histoire de l'Algérie, est retransmis en direct par les chaînes de télévisions publiques et privées ainsi que la radio nationale.
Selon l'ONG Munathara, basée à Tunis, qui organise des débats dans le monde arabe, celui-ci "ne répond pas aux normes internationales de transparence et d'indépendance vis-à-vis de l'Etat". Il a lieu 48 heures avant la fin d'une campagne électorale marquée par les manifestations de protestation du "Hirak". Ainsi, les candidats ont dû tenir leurs meetings électoraux sous forte protection policière. Les opposants à la tenue du scrutin reprochent aux candidats d'avoir fait partie, à un moment ou à un autre, de l'entourage de l'ex-président Abdelaziz Bouteflika, contraint à la démission le 2 avril après 20 ans de présidence. Pour les contestataires, les cinq candidats à la présidentielle sont tous des "enfants du système". Vendredi, une foule immense a encore défilé à Alger contre le pouvoir, rejetant massivement ce scrutin que le régime persiste à vouloir organiser. Aucun sondage public n'est disponible pour évaluer la possible participation au scrutin, mais l'abstention, longtemps vue comme l'unique voie de contestation d'un régime figé, était déjà forte lors des précédentes élections.