La région de Casablanca-Settat a enregistré un faible taux de participation aux élections générales du 8 septembre 2021, de l'ordre de seulement de 41,09 %, l'un des plus bas au Maroc. Pourquoi donc la région la plus peuplée du Maroc, avec près de 7 millions d'habitants (selon le décompte de 2014) et qui compte le plus de candidats aux élections (24 listes), enregistre-t-elle un taux de participation au vote aussi bas ? Eclairage. Ahmed El Bouz, politologue et professeur universitaire, commence par souligner que Casablanca a souvent enregistré des taux de participation bas aux élections. Il explique cependant que "n'avons pas encore assez de données pour juger des circonstances qui ont créé ce taux de participation, mais il y a des facteurs que l'on peut explorer pour donner une explication". Un taux de participation capricieux dans les villes "n'est pas si inhabituel puisque les régions rurales et les plus défavorisées enregistrent toujours un plus grand taux de participation au vote", pointe-t-il. La région de Casablanca compte 69 sièges dont 57 relevant de la circonscription législative locale et 12 relevant de la circonscription législative régionale ainsi que 12 sièges aux élections législatives régionales et 75 au conseil régional. Elle compte également 16 arrondissements répartis sur 8 préfectures. Si la région de Casablanca-Settat renferme le plus grand nombre de candidats mais aussi d'électeurs de par sa densité démographique, et par conséquent, compte 6.888 bureaux de vote, le taux enregistré dans la région était en deça des attentes. Sur le taux de participation par région, le vote du monde rural compense le vote faible en zone urbaine La région de Casablanca-Settat compte 127 communes rurales, contre 28 zones urbaines. "C'est le vote massif dans les zones rurales et dans les provinces du Sud qui compense généralement pour le taux de participation enregistré dans les autres zones urbaines", fait savoir le politologue. D'un point de vue sociologique, il pointe également une tendance au boycott chez les catégories socio-économiques plus favorisées. "Les milieux les plus éduqués politiquement sont plus enclins au boycott des élections, c'est une caractéristique phare de l'histoire des élections au Maroc, mis à part quelques rares occasions", explique-t-il. Il y a plusieurs facteurs qui font du monde rural un maillon actif de la participation aux élections, notamment le facteur de proximité où les candidats sont plus proches des électeurs et plus connus, le facteur tribal ou encore le facteur de notabilité (où les candidats notables sont connus de tous). Les citoyens du monde rural sont également plus enclins à s'inscrire sur les listes électorales. Il est également plus facile d'organiser les campagnes électorales sur une surface territoriale restreinte comme les villages et les communes, que dans des villes plus grandes. Avec l'organisation de trois échéances électorales à la fois, il a été attendu que le taux de participation monte considérablement. En général, "les élections législatives et communales enregistrent un taux plus élevé de participation que les législatives pour deux raisons", explique le politologue. La première étant le nombre de candidats qui est élevé et qui se reflète sur la mobilisation sur le terrain. La deuxième étant l'enjeu de proximité, puisque ces élections sont les plus proches du citoyen et ont le plus d'influence sur son quotidien et son milieu de vie. Enfin, pour ces élections, fait savoir M. El Bouz, "les milieux proches du PJD ont aussi lancé un appel au boycott dans leurs fiefs électoraux, dont Casablanca est une composante majeure". Un appel émanant de "crises internes" et d'un déchirement politique du parti, qui a commencé à montrer ses marques dès avril 2021, avec une rébellion de la Jeunesse du parti, une des plus larges au Maroc. Sans influer directement sur les résultats, "cet appel au boycott a dû avoir un effet, même minime" explique M. El bouz, surtout auprès des adhérents et sympathisants du PJD.