* La fiscalisation des Offices risquerait de réduire leur budget et, par conséquent, aurait un impact négatif sur leur périmètre d'intervention. * Les Offices perçoivent des subventions destinées à faire face aux dépenses de fonctionnement, tout en permettant une régulation de la politique de l'eau qui dégage un écart entre le prix de vente effectif et le coût du service de l'eau. A partir de janvier 2006, date annoncée de l'entrée en vigueur de l'accord de libre-échange avec les Etats-Unis, a commencé le compte à rebours pour l'agriculture marocaine. Le Maroc disposera de 10 à 15 ans selon les filières et les produits pour mettre à niveau son agriculture avant d'être soumis à une concurrence sans limites. Mais il faut dire que l'agriculture marocaine n'est pas un modèle d'efficience dans un pays comme le nôtre à vocation agricole. Dans un pays semi-aride, une large portion des terres cultivables est consacrée aux céréales et à des récoltes à faible valeur ajoutée et qui sont grandes consommatrices d'eau. Dans de pareilles conditions et suite à des réunions marathoniennes, le ministère des Finances a émis une note stipulant que les Offices de Mise en Valeur Agricole (ORMVA) sont désormais appelés à payer les impôts dus en matière d'IS et de TVA. Pour plus d'explications, les ORMVA ont pour mission d'assurer la gestion de l'irrigation essentiellement dans un contexte de menace de pénurie d'eau. En effet, dans sa nouvelle stratégie, Mohand Laenser, ministre de l'Agriculture, a annoncé récemment une hausse des tarifs de l'eau d'irrigation. Le ministre justifie cette décision par la nécessité d'assurer la pérennité financière des Offices de mise en valeur agricole. Le gouvernement s'est engagé d'ailleurs à leur régler, dès 2006, les arriérés de la Sodea et ceux de la Sogeta qui s'élèvent à 100 MDH. Face à ces propos, on s'interroge pour savoir si la fiscalisation des offices ne risquerait pas de réduire leur budget et par conséquent avoir un impact négatif sur leur périmètre d'intervention. Une autre question se pose d'emblée: pourquoi lesdits offices n'étaient-ils pas sollicités à payer l'impôt auparavant ? D'après R. Lazrak, fiscaliste, «un office est un établissement public, d'où la nécessité de faire la différence entre deux choses : un établissement à caractère administratif dont la mission est de rendre une prestation sans chercher à gagner de l'argent, d'où l'exonération ; et les établissements à caractère industriel ou commercial qui, lorsqu'ils réalisent des bénéfices, devraient payer l'impôt. Mais les offices qui, à ma connaissance, ne réalisent pas de bénéfices, ne doivent pas payer l'impôt ». Selon un expert-comptable, «les redevances perçues par les offices à l'occasion de la vente de l'eau d'irrigation étant assimilées à des impôts suite à une circulaire relative à l'assujetissement des offices au code de recouvrement des créances publiques, une taxation laisse entendre que ceux-ci vont payer l'impôt sur l'impôt». Il estime par ailleurs que les offices perçoivent des subventions destinées à faire face aux dépenses de fonctionnement et constituent une régulation de la politique de l'eau qui dégage un écart entre le prix de vente effectif et le coût du service de l'eau. Il précise que ces offices, à l'instar des agences de bassin hydraulique, constituent des organes de collecte des redevances pouvant être assimilées à des taxes consécutives à la consommation d'eau d'irrigation. Cette collecte a été attribuée aux agences et offices dans l'esprit de l'instauration de la fiscalité affectée, qui consiste en la création d'une relation directe entre le contribuable et l'organisme indépendant à même de consolider l'esprit de la mutualisation. Cette taxe a été instaurée dans l'objectif d'une rationalisation de la consommation d'eau. Mieux encore, les produits de cette fiscalité affectée seront réinvestis dans les périmètres d'intervention concernés à l'occasion de la réhabilitation des réseaux, de l'aménagement et de l'extension du périmètre qui relève directement de la fonction de l'Etat. L'agriculture n'est pas encore tirée d'affaire. En amont, se pose le problème de la capacité financière des agriculteurs. Certes, sur ce volet, des batteries d'aides et de subventions directes aux exploitants sont prévues. Mais de là à fiscaliser les offices, on remarque un manque de coordination dans la politique gouvernementale. En effet, ce n'est que trois ans après son arrivée aux commandes que le gouvernement Jettou prend le taureau par les cornes. Une grande partie des travaux est aujourd'hui consacrée à la mise à niveau du secteur. Mais là encore, le ministre des Finances continue à fiscaliser à tour de bras afin de faire face aux différentes dépenses.