* Lexonération de lIS va permettre aux fonds dinvestissements dopter pour les OPCR et élargir leur champ daction. * Le capital-investissement est aujourdhui une réelle industrie qui a besoin dun cadre réglementaire attractif. * Abdelkader Boukhriss, expert-comptable associé au sein du cabinet Société Fiduciaire du Maroc, explique. - Finances News Hebdo : La Loi de Finances 2011 propose d'exonérer les institutions spécialisées dans le financement par capital-risque de l'IS, concernant les revenus de leurs participations dans les sociétés. Quelles appréciations faites-vous de ce nouveau dispositif ? - Abdelkader Boukhriss : Dabord, je voudrais rappeler le contexte actuel. Pour bénéficier de lexonération dimpôt sur les sociétés, les OPCR doivent détenir dans leurs portefeuilles-titres au moins 50% dactions de sociétés marocaines non cotées en Bourse dont le chiffre daffaires, hors TVA, est inférieur à 50 millions de dirhams. Or, les études qui ont été faites montrent que cette condition restreint le champ dinvestissement pour les fonds. La Loi de Finances 2011 apporte une réponse favorable en proposant la suppression de cette condition prévue à larticle 7-III du Code général des impôts. - F.N.H. : Pensez-vous que cette mesure pourrait réellement servir à développer le capital-investissement, ou faudrait-il y adjoindre des mesures d'accompagnement ? - A. B. : Cette mesure est nécessaire, mais sûrement pas suffisante. En effet, la suppression de cette barrière permettra aux fonds dinvestissement dopter pour les OPCR et, par là même, élargir leur champ daction. Toujours sur ce même registre, les fonds ont besoin dune fiscalité adaptée à leurs véhicules dinvestissement, tant au niveau de la TVA sur frais de gestion pour alléger les trésoreries desdits fonds, que sur le traitement fiscal des plus-values en distinguant les titres de placement et les titres de participation. Quant aux autres mesures daccompagnement, il serait souhaitable de mettre en place un dispositif incitatif pour les entreprises qui ouvrent leur capital à ces fonds, au même titre que les entreprises qui sintroduisent en Bourse. - F.N.H. : Donc, à elle seule, cette mesure pourrait-elle effectivement pousser les sociétés d'investissement en capital-risque à prendre davantage de participations dans les sociétés non cotées en Bourse? - A. B. : Cette mesure va encourager les fonds dinvestissement à sorienter vers les OPCR. Il ne faut pas perdre de vue que le capital-investissement est une source non négligeable de financement et de soutien aux entreprises non cotées. Cest un véritable agent de changement pour les entreprises au niveau du mode de management et de gouvernance. Les incitations fiscales sont déterminantes dans le calcul de la rentabilité et toute disposition réduisant le poids fiscal ne peut quaider au renforcement des actions des fonds dinvestissement et au développement de cette activité. - F.N.H. : Est-ce que l'effet fiscal est le seul handicap que rencontrent les sociétés d'investissement en capital-risque ? - A. B. : Le capital-investissement est aujourdhui une réelle industrie qui a besoin dun cadre réglementaire attractif sous tous les aspects, tant juridique que fiscal. Létude qui avait été réalisée par le cabinet Fidaroc Grant Thornton avait proposé une série de recommandations au même titre que lélargissement du ratio dinvestissement aux sociétés non cotées. Pour développer le capital-investissement au Maroc, dautres mesures sont nécessaires. Sans prétendre être exhaustif, je cite notamment celles incitant les investisseurs institutionnels à investir une part de leurs réserves techniques dans les fonds dinvestissement, la refonte du statut de la société anonyme simplifiée, pour donner un plein effet à cette forme de société, et lautorisation daccéder aux valeurs mobilières composées, telles que les bons de souscription dactions. - F.N.H. : Quel impact cette mesure pourrait-elle avoir sur les recettes fiscales ? - A. B. : Cest très difficile de mesurer limpact direct dune telle incitation fiscale sur le budget de lEtat. Ceci étant, la mise en place de ce type de mesure na pas uniquement un impact direct sur les recettes fiscales, mais aussi un impact indirect. Le capital-investissement étant une source alternative de financement, son développement contribue fortement à la croissance de léconomie nationale et à la création demplois. Par conséquent, lincitation des fonds dinvestissement à augmenter leur engagement ne peut quaméliorer les recettes fiscales.